L’utérus est la matrice de la vie, l’origine selon Freud du premier traumatisme vécu : la naissance. Lieu de la maternité, l’utérus est aussi source de clichés sexistes qui perdurent aujourd'hui, comme l’origine de l’hystérie… Le corps féminin crée-t-il des états psychiques qui lui sont propre ?
- Clotilde Leguil Professeure au Département de psychanalyse de Paris 8 Saint Denis, philosophe et psychanalyste de l’Ecole de la Cause freudienne
Une émission présentée par Géraldine Mosna-Savoye
Les médecins grecs de l’Antiquité abordaient l’hystérie comme une affection qui avait à voir avec un organe génital propre aux femmes : l’utérus.
Freud détacha les symptômes hystériques de cette référence anatomique à l’utérus comme organe, mais ce qu’il conserva, c’est l’idée que ces symptômes avaient quand même à voir avec le corps, ce qu’il appela une “conversion somatique”.
Pour Freud, le corps n’est pas celui de l’organisme, celui de la médecine, mais le corps libidinal, investi de jouissance, de puissance, de libido. Lorsque quelque chose du désir est refoulé, cela peut alors passer par l’expression traumatique : une affection qui se présente comme venant du corps mais dont la cause est psychique et non organique…
Alors que reste-t-il de l’utérus dans l’hystérie telle qu’elle a été exploitée après Freud par la psychanalyse ?
L'invitée du jour :
Clotilde Leguil, professeure au département de psychanalyse de Paris 8 Saint-Denis, philosophe, et psychanalyste de l’Ecole de la Cause freudienne
Mystère du corps féminin
Le corps féminin constitue un mystère au niveau de son interprétation, premièrement, anatomique, du fait de cette invisibilité des organes. L'historien Thomas W. Laqueur montre comment, jusqu’au 18ème siècle, on a pensé que le corps féminin, avec ses organes à l’intérieur, était un corps humain inachevé, qu’il était à penser à partir du paradigme du corps mâle. Même la naissance de l’anatomie n’a pas suffi à lever ce mystère, on a continué à concevoir cette anatomie comme une inversion à l’intérieur des organes masculins. Il a fallu le 18ème siècle, sortir d’une vision téléologique et théologique pour accrocher le corps féminin dans toute sa différence : qu’il n’avait plus à être comparé au corps masculin.
Clotilde Leguil
L'hystérie et son lien à la réminiscence
Freud détache l’hystérie d’une affection organique, il la définit à partir d’un certain lien au passé : ce n’est pas seulement un lien au passé au sens d’une nostalgie mais un passé que le sujet ne parvient pas lui-même à formuler. Le sujet hystérique ne sait pas qu’il est attaché à un passé qui a tellement marqué son corps libinal qu’il ne parvient plus à avancer dans la vie. Freud décrit les hystériques comme des êtres qui souffrent de réminiscences, qui ne sont pas seulement des souvenirs conscients mais des retours dans le corps de souvenirs qui sont oubliés mais qui ne sont pas perdus… Ces symptômes hystériques sont presque une chance, à condition de rencontrer la psychanalyse, ils vont lui permettre d’accéder à cette part refoulée qui finalement continue de faire destin tant que le sujet ne parvient pas à l'interpréter.
Clotilde Leguil
Textes lus par Elsa Lepoivre :
- Extrait du Timée, de Platon, 360 av. J.C., traduction de Luc Brisson, éditions GF Flammarion
- Extrait de Anthropologie structurale, de Claude Lévi-Strauss, Magie et religion, chapitre 10 : L'efficacité symbolique, 1958, éditions Plon (avec des musiques de Jean-Jacques Hertz & François Roy : Energia shamanica, interpète : Guillermo Arevalo Kestenbetsa ; et Jean-Pierre Drouet, La ville)
Sons diffusés :
- Mix de début par Laurence Malonda, avec des extraits de : Freud, passions secrètes, film de John Huston (1962), La Boum de Claude Pinoteau (1980), Le Prénom d’Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte (2012), Le Grand Blond avec une chaussure noire d’Yves Robert (1972), Intouchables d’Olivier Nakache et Eric Toledano (2011)
- Chanson d'Elliphant, Uterus
- Archive de Jacques Lacan, 1974, conférence à Rome, diffusée sur France Culture le 7 avril 2001
- Extrait du film Pas de printemps pour Marnie, d’Alfred Hitchcock, 1964
- Extrait de Réponses de femmes, d'Agnès Varda, 1997
- Chanson de Muse, Hysteria
L'équipe
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