Quelle réception pour la philosophie contemporaine française aux Etats-unis?
- François Cusset Historien des idées, professeur de civilisation américaine à l’Université de Paris Nanterre
Foucault, Deleuze, Derrida, et compagnie : comment les États-Unis ont-ils lu ces auteurs français ? Et comment expliquer leur succès si différent outre-Atlantique ? François Cusset, auteur de "French Theory", éclaire aujourd'hui ces déplacements inattendus de la pensée française en terre américaine.
Le texte du jour
« Pour parler de la « déconstruction en Amérique », il faudrait prétendre savoir de quoi on parle — et d'abord ce qu'on entend ou délimite sous le mot « Amérique ». Or qu'est-ce que l'Amérique, dans ce contexte? Si j'étais moins souvent associé à cette aventure de la déconstruction, je risquerais en souriant modestement cette hypothèse : l'Amérique, mais c'est la déconstruction. Ce serait, dans cette hypothèse, le nom propre de la déconstruction en cours, son nom de famille, sa toponymie, sa langue et son lieu, sa résidence principale. Comment définir les États-Unis aujourd'hui sans intégrer ceci dans la description : l'espace historique qui, aujourd'hui, dans toutes ses dimensions et à travers tous ses jeux de force, se montre incontestablement le plus sensible, le plus réceptif ou le plus réactif devant les thèmes et les effets de la déconstruction? Comme un tel espace représente et met en scène à cet égard la plus grande concentration au monde, on ne saurait le définir sans que la définition n'intègre au moins ce symptôme, si du moins on pouvait parler de symptôme. Dans la guerre qui fait rage au sujet de la déconstruction, il n'y a pas un front, il n'y a pas de fronts, mais s'il y en avait, ils passeraient tous par les États-Unis, ils définiraient le lot et en vérité le partage américain. Mais nous avons appris, de « la » déconstruction, à suspendre ces attributions, toujours hâtives, de nom propre. Il nous faut donc abandonner l’hypothèse. Non, « déconstruction » n'est pas un nom propre, et Amérique n'est pas le sien. »
Jacques Derrida, Mémoires : pour Paul de Man
Lectures
- Jacques Derrida, Mémoires : pour Paul de Man (Galilée, 1988)
- Roland Barthes, Le bruissement de la langue. Essais critiques IV (Seuil, 1984)
Extraits
- Ghost Dance, film de Ken McCullen (1983)
- Le bon la brute et le truand, film de Sergio Leone (1966)
- Archive Roland Barthes : documentaire Arte « Le théâtre du langage » 12/11/2015
- Archive Michel Foucault : source « Enquête et commentaires 20/09/1961
- Archive Avital Ronell : émission « Les vendredis de la philosophie » 20/11/2006
- Archive Gilles Deleuze : INA 04/1997
- Archive Jacques Derrida : source NCC 08/05/2008
Références musicales
- Nicholas O’Toole, The Exit code
- Steve Reich, Music for 18 musicians
- Neil Young, American Dream
- Frank Zappa, Bobby Brown Goes down
L'équipe
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