Le Cid, ou comment se venger d’un soufflet : épisode • 1/4 du podcast Philosophie de la gifle

Alexandre Pavloff (Rodrigue) dans Le Cid, mise en scène de Brigitte Jacques Wajeman à la Comédie Française, 2005
Alexandre Pavloff (Rodrigue) dans Le Cid, mise en scène de Brigitte Jacques Wajeman à la Comédie Française, 2005 ©Getty - Raphael GAILLARDE/Gamma-Rapho
Alexandre Pavloff (Rodrigue) dans Le Cid, mise en scène de Brigitte Jacques Wajeman à la Comédie Française, 2005 ©Getty - Raphael GAILLARDE/Gamma-Rapho
Alexandre Pavloff (Rodrigue) dans Le Cid, mise en scène de Brigitte Jacques Wajeman à la Comédie Française, 2005 ©Getty - Raphael GAILLARDE/Gamma-Rapho
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Pourrait-on considérer une gifle comme un rite de passage ? Est-ce au fond l’histoire du Cid de Corneille ? Celle de la construction d’un sujet, Rodrigue, qui veut se faire reconnaître comme une personne tout en imposant sa singularité, le tout symbolisé en un geste : le soufflet.

Avec
  • Patrick Dandrey Professeur émérite de littérature française du XVIIe siècle à Sorbonne Université

Quelle est la différence entre une gifle et une paire de gifles ? Est-ce que l'affront ne survient pas dès la première ? Et qu'est-ce que la seconde apporte ? Une confirmation, une surenchère ou un point final ?
Dans Le Cid de Corneille, c'est un soufflet que le comte donne à Don Diègue, souffletque son fils Rodrigue devra venger en prenant le risque de perdre Chimène.
Alors soufflet, gifle, baffe, torgnole, aller-retour ou droite, quand ma main se pose sur la joue d'autrui en faisant du bruit, est-ce là que tout commence ? Ou est-ce là que tout finit ?

L'invité du jour :

Patrick Dandrey, professeur émérite à la Sorbonne

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La gifle au théâtre

Si la gifle est présente assez souvent dans les comédies, un peu plus rarement dans les tragédies, c'est que c'est un beau phénomène théâtral : phénomène dramatique parce que la gifle est à la fois concrète, physique, le théâtre c'est de l'incarnation, mais elle est en même temps psychologique, morale, symbolique, et le théâtre c'est aussi avec des corps, dire des sentiments et des situations, dire des émotions, et la gifle est un fait physique.    
Patrick Dandrey

Une pièce plus romanesque que tragique

Il s'agit d'un sujet tragique qui est bourré de matière et qui est beaucoup plus romanesque que tragique, sujet qui provient d'une tradition épique puisque Le Cid a réellement existé au 11ème siècle. C'est un sujet narratif et exalté, plein d'amour. Le soufflet déclenche un processus de violence canalisée dans une pièce qui mériterait d'être un peu "Les Trois Mousquetaires". En même temps, le soufflet déclenche un processus de tension, de déchirement. On le voit bien, les personnages sont en tension morale et affective, tensions qui sont intériorisées, intimisées. Il y a une dimension passionnelle, c'est un théâtre d'amour et c'est une pièce qui apporte aussi un effet affectif.    
Patrick Dandrey

Les âges de la vie

Il y a aussi une autre dimension : il s'agit du soufflet à un vieillard, qui enclenche un rituel de passage, celui de cet adolescent, qui, par une suite d'épreuves à surmonter, va naître à lui-même et se faire reconnaître par une communauté, se faire reconnaître comme adulte en remplaçant son père rejeté dans l'âge des vieillards. Dans "Le Cid", il y a tous les âges de la vie_..._ Et la pièce est vraiment tendue entre son caractère romanesque, et le ton tragique.
Patrick Dandrey

Sons diffusés :

  • La Dame de chez Maxim, pièce de Georges Feydeau, 1899, mise en scène de Jean de Beer et Jacques Reynier à la Comédie Française, 6 novembre 1958, RTF
  • Jean Rochefort résume Le Cid dans Les Boloss des Belles Lettres
  • Henri Salvador, Le Cid rock
  • Extraits du Cid, mise en scène de Jean Vilar, 22 janvier 1955 au Théâtre National du Palais de Chaillot à Paris
  • Chanson de fin : Maria Callas, Pleurez mes yeux (Acte III), Air de Chimène dans Le Cid, opéra de Jules Massenet (1885)
Les Chemins de la philosophie
59 min

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