Le silence a-t-il une histoire ? : épisode 3/4 du podcast Silence !

Le Silence (1890)
Le Silence (1890) - Fernand Khnopff
Le Silence (1890) - Fernand Khnopff
Le Silence (1890) - Fernand Khnopff
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Comment se transforment les « textures » du silence selon les lieux, les temps, les circonstances, et au cours de l’histoire ?

Avec

L’historien des sens Alain Corbin est parti à la recherche d’un silence perdu, qu’il nous réapprend à écouter au gré d’un parcours historique, esthétique, mystique et poétique, d’expériences où se goûtent le silence, se découvrant complexe, pluriel, parfois beau, parfois tragique.

Lectures

- Eugène Fromentin, Un été dans le Sahara, Œuvres complètes Gallimard, 1984, p.54.

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- Maurice Maeterlinck, Le trésor des humbles, « Le silence », p.16-17

- La règle de Saint-Benoit : le silence, seul moyen du salut, lu par Michael Lonsdale

Extrait

- Le chat, film de Pierre Granier-Deferre (1971)

Références musicales

- Stella, le silence

- Ben Frost et Daniel Bjarnason, Unbreakable, silence

- Chant Gregorien, Messe IX aux fêtes de la Sainte Vierge

- Bairstow, Let all mortal flesh keep silence

Alain Corbin
Alain Corbin
© Radio France

Le texte du jour: Hommage à Jean-Louis Jacopin

« Beaucoup affectent l’amour de vivre pour éluder l’amour lui-même. On s’essaye à jouir et à "faire des expériences". Mais c’est une vue de l’esprit. Il faut une rare vocation pour être un jouisseur. La vie d’un homme s’accomplit sans le secours de son esprit, avec ses reculs et ses avances, à la fois sa solitude et ses présences. A voir ces hommes de Belcourt qui travaillent, défendent leurs femmes et leurs enfants, et souvent sans un reproche, je crois qu’on peut sentir une secrète honte. Sans doute, je ne me fais pas d’illusions. Il n’y a pas beaucoup d’amour dans les vies dont je parle. Je devrais dire qu’il n’y en a plus beaucoup. Mais, du moins, elles n’ont rien éludé. Il y a des mots que je n’ai jamais bien compris, comme celui de péché. Je crois savoir pourtant que ces hommes n’ont pas péché contre la vie. Car s’il y a un péché contre la vie, ce n’est peut-être pas tant d’en désespérer que d’espérer une autre vie, et se dérober à l’implacable grandeur de celle-ci. Ces hommes n’ont pas triché. Dieux de l’été, ils le furent à vingt ans par leur ardeur à vivre et le sont encore, privés de tout espoir. J’en ai vu mourir deux. Ils étaient pleins d’horreur, mais silencieux. Cela vaut mieux ainsi. De la boîte de Pandorre où grouillaient les maux de l’humanité, les Grecs firent sortir l’espoir après tous les autres, comme le plus terrible de tous. Je ne connais pas de symbole plus émouvant. Car l’espoir, au contraire de ce qu’on croit, équivaut à la résignation. Et vivre, c’est ne pas se résigner. »

Albert Camus, Noces, « L’été à Alger », 1937, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1965, p.75-76, lecture de Jean-Louis Jacopin

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