Emmanuel Levinas est né en 1905. Il a connu la guerre et l'exil. Quel lien faut-il faire entre son expérience de prisonnier de guerre et son questionnement sur le visage ? Que signifie un visage qui parle ? Et pourrions-nous élargir le champ du visage à l'animalité ?
- Corine Pelluchon Philosophe, professeure à l'université Paris-Est Gustave Eiffel, spécialiste de philosophie politique et d'éthique normative et appliquée
Le visage chez Levinas est bien plus qu'une illustration ou qu'un exemple, c'est le point auquel se ramène sa pensée. Il l'investit de manière philosophique très forte. Levinas est-il particulièrement adapté à notre temps ?
L'invitée du jour :
Corine Pelluchon, philosophe, professeure à l'université Gustave Eiffel, spécialiste de philosophie politique et d'éthique normative et appliquée (environnementale, animale, médicale)
Les différentes facettes du visage :
Levinas distingue le support anatomique (les yeux, les oreilles, la bouche), la figure c’est-à-dire le vecteur expressif (visage triste, gai) et le visage qui déchire le sensible. Ce que je vois de quelqu'un ne dit pas tout et c’est cet échec de faire le tour d’autrui qui va justement me renseigner sur mon rapport à lui. Une personne n’est pas quelque chose dans le monde, n’est pas mon horizon, elle m’échappe et elle m’assigne des limites. Elle souligne les limites de mon pouvoir de constituer, de connaître et peut-être du pouvoir de mon pouvoir.
Corine Pelluchon
Les animaux ont-ils un visage ?
L’animal est le témoin de notre humanité, parfois même le témoin de la violence entre les hommes. Levinas met l’animal hors circuit de l’éthique. Les animaux ne sont pas comme les humains, d’ailleurs, ils ne sont pas responsables de nous. Par contre, ils sont l’objet de notre responsabilité et notre manière de les exploiter en dit long sur qui nous sommes. Les animaux creusent les traits de notre visage et questionnent le test du qui suis-je ? Le visage n’est pas le seul lieu de l’éthique mais il est aussi l'endroit de ma vulnérabilité, de mon besoin de nourriture, de ma mortalité, et si cela est le lieu de l’éthique alors les animaux comptent…
Corine Pelluchon
Textes lus par Hélène Lausseur :
- Emmanuel Levinas, Ethique et infini (1961), Le livre de poche, p. 78.
- Emmanuel Levinas, Totalité et infini (1931), 3ème partie, Le livre de poche, p. 216-217.
Sons diffusés :
- Extrait du film La liste de Shindler, Steven Spielberg
- Extrait du film Le Joker, Todd Phillips
- Texte lu par Adèle Van Reeth : Difficile liberté, (1963), le livre de poche, p. 215-216.
- Archive d'Emmanuel Levinas, France Culture, 1981
- Chanson de fin d'émission Votre visage de Charles Trenet
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