"Martin Luther" par Matthieu Arnold

Comment être libre quand on obéit à Dieu ? Comment enseigner ce sentiment vécu, profond et singulier qu'est la foi ? Ou encore, comment opposer aux institutions la fragilité de son cœur ?  

Le texte du jour

A la sainte et inquiète dame, dame Catherine Luther, doctoresse, habitante de Zülsdorf, à Wittenberg, à ma gracieuse et chère maîtresse de maison.

Grâce et paix en Christ !

Très sainte Dame doctoresse,

Nous vous remercions très cordialement pour votre grande inquiétude, qui vous empêche de dormir. Car depuis le temps où vous vous êtes inquiétée pour nous, le feu a failli nous dévorer dans notre logis, juste devant la porte de la chambre. Et hier, sans aucun doute par la puissance de votre inquiétude, une pierre a manqué de nous tomber sur la tête et de nous écrabouiller, comme dans un piège à souris. Car dans nos appartements privés, cela fait bien deux jours que de la chaux et de la colle ont coulé sur nos têtes, jusqu’à ce que nous ayons pris des gens qui ont touché la pierre avec deux doigts ; sur ce, elle est tombée, aussi grande qu’un long coussin et large comme une grande main. Elle avait l’intention de vous remercier pour l’inquiétude de Votre Sainteté, si les anges du ciel ne l’en avaient empêchée…

Si tu ne cesses pas de t’inquiéter, je m’inquiéterai à la pensée qu’en fin de compte la terre pourrait nous engloutir et tous les éléments nous persécuter. Est-ce ainsi que tu apprends le catéchisme et la Foi ? Prie, et laisse Dieu s’inquiéter. Il n’appartient pas de t’inquiéter pour moi ou pour toi. Il est écrit : « Remets ton sort au Seigneur, c’est lui qui s’inquiète pour toi », au psaume LV, et dans beaucoup d’autres passages encore. Dieu soit loué, nous sommes dispos et en bonne santé. (…) Amen.

Martin Luther, Lettre à son épouse Catherine Luther, du 10 février 1546, traduction de Matthieu Arnold pour Gallimard Pléiade 2017, p. 386-387.

Extrait

- Luther, film d’Eric Till (2003)

Références musicales

- National indépendant gospel singers, I got good religion

- Julian Behr, Benedetur pour luth