“Misery”, chronique d’un écrivain séquestré : épisode • 4/4 du podcast Stephen King, anatomie de l’horreur à l’écran

"Misery", de Rob Reiner, 1990
"Misery", de Rob Reiner, 1990 - Copyright Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc.
"Misery", de Rob Reiner, 1990 - Copyright Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc.
"Misery", de Rob Reiner, 1990 - Copyright Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc.
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Un écrivain populaire est séquestré et torturé par une infirmière retraitée, insatisfaite de la fin de la saga dont il est l'auteur. Stephen King, en 1987, nous offre un roman questionnant le rapport entre l’écrivain et l’écriture, comme la seule chose pour le sauver de la folie ?

Avec
  • Mélanie Fazi Autrice et traductrice

L'invitée du jour :

Mélanie Fazi, autrice (notamment de nouvelles fantastiques) et traductrice (dans le domaine des littératures de genre)
autrice d’articles sur Stephen King dans la revue Bifrost la revue des mondes imaginaires n°80 : Stephen King ou la part des ténèbres (2015)

Ecrire pour lutter contre ses démons

Quand on lit tout le corpus de King sur les écrivains, puisque c'est un thème qu'il a abordé dans énormément de livre, il y a un thème qui revient de manière obsessionnelle, c'est que l'écrivain utilise l'écriture pour lutter contre ses démons. C'est un acte vraiment intime de rendez vous avec lui-même, de lutte contre lui-même. Et pour moi, Misery pose cette question : quel est le rôle de l'écriture pour l'écrivain? C'est celle de le sauver de quelque chose. Et là, c'est vraiment la bouée. Ce livre que Paul Sheldon va devoir écrire en captivité, qu'il écrit au départ sous la contrainte pour sauver sa peau, il va l'écrire pour sauver sa peau d'une autre manière, c'est à dire se sauver lui-même de la folie_._
Mélanie Fazi

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Grand écart entre le livre et le film

Il y a une différence fondamentale entre le livre de Stephen King et son adaptation au cinéma. La plus fondamentale c'est que le propos n'est pas le même et le film va tordre à plusieurs reprises les éléments du roman pour les faire adhérer à ce discours qu'il tient jusqu'au bout : dans le roman, Paul Sheldon se persuade que ses fans l'obligent à écrire des livres mi-aventure, mi-romance, dont il ne peut plus, la série "Misery", il voudrait être reconnu comme un grand écrivain tout court. Sauf qu'au fur et à mesure du roman, il se rend compte qu'il a toujours adoré ça. Et le film va tordre complètement cet élément du roman écrit en captivité pour défendre la thèse que non, en fait, ce qu'il voulait écrire, c'est autre chose, alors que le roman nous dit tout autre chose.    
Mélanie Fazi

La peur de ne plus pouvoir écrire

Stephen King, le personnage... : en fait, je pense que deux se confondent quand on lit aussi bien ce qu'il écrit, lui, sur sa propre écriture dans les Écritures, notamment, et ses livres. C'est obsessionnel. C'est un thème abordé la toute fin de Misery : la peur d'avoir été tellement traumatisé qu'il ne pourra plus jamais écrire. C'est ce qu'il fait dans Shining. Pour moi, que le personnage de Jack Torrance bascule, c'est qu'il a perdu l'écriture. Donc, à partir de là, l'hôtel peut s'emparer de lui puisqu'il n'a plus ce bouclier qui était l'écriture. C'est aussi le point de départ d'un roman, Sac d'os. Ça revient énormément, vraiment, et on peut supposer que c'est une peur très présente chez lui.  
Mélanie Fazi

Textes lus par Bernard Gabay :

  • Stephen King, Écriture : Mémoires d’un métier, chapitre 36, traduit de l’américain par William Olivier Desmond, éditions Albin Michel
  • Stephen King, Misery, partie II, chapitre 22, traduit de l’américain par William Olivier Desmond, éditions Albin Michel

Sons diffusés :

  • Archive de George RR Martin, le 21 juin 2016
  • Extraits du film Misery, de Rob Reiner, 1990
  • Archive de Stephen King, 15 novembre 2013, dans Interactiv, France Inter
  • Archive de Stephen King, Matinale de France Inter, le 15 novembre 2013 

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