

Et si le peuple était une construction bien utile à ceux qui veulent... s'en extraire ? Pour l’écrivain Philippe Muray inscrit dans une tradition d’auteurs dressés contre le peuple, comme Baudelaire, décrire la masse c’est s’en extraire, devenir le seul individu sur Terre et être alors un écrivain.
- Alexandre de Vitry essayiste
L'écrivain Philippe Muray, 1945-2006, a accueilli, reçu, décrit et dénoncé la voix de son époque.
Son ouvrage paru en 1999, Le 19e siècle à travers les âges, opère un changement dans sa théorie, s'inscrivant dans une tradition d’écrivains dressés contre la masse du peuple, qui lui permet d’inventer une nouvelle manière de faire de la littérature, et qui lui paraît bonne...
Pour lui, le seul moyen de devenir écrivain passe alors par la critique du peuple, son modèle étant Charles Baudelaire, le phare qui éclaire tout le 19e siècle, celui qui comprit la nature du siècle comme avènement du peuple sanctifié, le comprenant et s'en étant extrait.
L'invité du jour :
Alexandre de Vitry, professeur en littérature, essayiste, auteur de Sous les pavés, la droite, aux éditions Desclée de Brouwer et L’Invention de Philippe Muray aux éditions Carnets Nord.
Le regard de Philippe Muray sur le peuple
Ce dont veut parler Philippe Muray c’est la masse grouillante, le multiple, le nombre, l’humanité comme prolifération, c'est cela qui l'intéresse. Et cequ’il a du mal à supporter c'est la transformation de cette masse horrifique en une valeur positive, soutenue par un discours religion qu’on a l’habitude d’appeler le romantisme, ce qu’il a observé au cours du 19ème siècle. C’est le premier regard de Muray sur le peuple.
Alexandre de Vitry
Le tournant du "19e siècle à travers les âges"
Philippe Muray était un théoricien particulier, inclassable, mais ce qu’il essaye de devenir c’est un écrivain. Cela s'opère grâce à son ouvrage "Le 19e siècle à travers les âges" parce que cette pensée théologico-politique qu'il développe lui permet d’inventer une manière de faire de la littérature qui lui paraît bonne, inscrite dans une tradition d’écrivains dressés contre la masse du peuple.
Alexandre de Vitry
Qu'est-ce qu'un écrivain pour Philippe Muray ?
La valeur des valeurs pour muray c’est l’individu, l'épanouissement individuel, dans une tradition nietzschéenne à certains égards. Le paradoxe c'est que pour Muray, un individu écrivain ne se réalise que dans la mesure où il est capable de faire apparaître cette masse, de lui donner une forme. Qu'est-ce que l'écrivain pour Muray ? Celui qui s’extrait de la masse, devient le seul individu sur la terre en décrivant cette masse.
Alexandre de Vitry
Le style de Philippe Muray
Le style de Muray cherche à faire entendre et vibrer la voix de l’époque, identifier la façon dont l’époque parle et à exagérer ce discours. Il y a là évidemment une visée critique, le but est de ridiculiser l’époque mais malgré je pense qu'il y a peu d'écrivains qui comme lui ont pu la faire entendre et rentrer dans la littérature.
Alexandre de Vitry
Textes lus par Élie Semoun :
- La critique de la masse mutée en peuple, extrait du 19e siècle à travers les âges de Philippe Muray, 1999, chapitre I.5, éditions Denoël
suivi d'Edith Piaf, La foule - Le peuple en vacances, extrait de Spleen de Paris de Baudelaire, 1869, chapitre 14
suivi d'une musique de Frank, Retro Funk
Sons diffusés :
- Archive de Philippe Muray au micro de François Angelier sur France Culture, 1999
- Extrait de L'invention de Philippe Muray d'Alexandre de Vitry
- Chanson de Mefret, Les démagos "vous allez me traiter de réac"
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