

Portrait de Saint-Simon, ce roi des potins, et immense écrivain, autour de quelques secrets.
François Raviez (maître de conférences à l'université d’Artois).
Saint-Simon était de toutes les intrigues. Il n'y avait pas une intrigue dont il ne soit au courant. A la cour, il était surnommé le "voyeux" à cause de sa manie de toujours mettre son nez dans toutes les affaires. Une réputation bien méritée ? Peut-être, mais pour notre plus grand plaisir.
Le texte du jour
« Louis XIV s'étudiait avec grand soin à être bien informé de ce qui se passait partout, dans les lieux publics, dans les maisons particulières, dans le commerce du monde, dans le secret des familles et des maisons. Les espions et les rapporteurs étaient infinis. Il en avait de toute espèce : plusieurs qui ignoraient que leurs délations allassent jusqu'à lui, d'autres qui le savaient, quelques-uns qui lui écrivaient directement en faisant rendre leurs lettres par les voies qu'il leur avait prescrites, et ces lettres-là n'étaient vues que de lui, et toujours avant toutes autres choses, quelques autres enfin qui lui parlaient quelquefois secrètement dans ces cabinets, par les derrières. Ces voies inconnues rompirent le cou à une infinité de gens de tous états, sans qu'ils en aient jamais pu découvrir la cause, souvent très injustement, et le roi une fois prévenu ne revenait jamais, ou si rarement que rien ne l'était davantage. (…) Aussi à vrai et à faux est-il incroyable combien de gens de toutes les sortes en furent plus ou moins perdus. Le secret était impénétrable, et jamais rien ne coûta moins au roi que de se taire profondément, et de dissimuler de même. Ce dernier talent, il le poussa souvent jusqu'à la fausseté, mais avec cela jamais de mensonge, et il se piquait de tenir parole. Aussi ne la donnait-il presque jamais. Pour le secret d'autrui, il le gardait aussi religieusement que le sien. Il était même flatté de certaines confessions et de certaines confidences et même confiance ; et il n'y avait maîtresse, ministre ni favori qui pût y donner atteinte, quand le secret les aurait même regardés. »
Saint Simon, Mémoires, Tome XIII, chapitre 19, p.78
Lectures
Saint Simon, Mémoires, Tome XIII, chapitre 19, p.78
Saint Simon, Mémoires, Tome IX, chapitre 7
Saint Simon, Mémoires, 1711, Tome IX, chapitre 16
Extraits
Une demande en mariage ou les drôles de noces de Saint-Simon
La Dauphine : Lecture de Jean Levrais
Références musicales
François Couperin, Les barricades mystérieuses
Louis Couperin, Allemande grave
Scarlatti, Sonate pour piano en Ré majeur K 492
Aufgang, Barock
Les Frères Jacques, Madame la Marquise a dit
L'équipe
