Shining est un film culte dont on reconnaît autant l’ingéniosité que la trahison du roman de King. Arpentons les couloirs de l'hôtel filmé par Kubrick en un mouvement inéluctable, comme une marche vers l'éternité, où le frisson surgit dans le familier grâce à la partition sonore...
- Anne Goliot-Lété maîtresse de conférences en études cinématographiques à l’Université de Paris
“Come play with me” semble nous dire Shining.
À quel jeu joue-t-on avec Shining ? Comment nous repérer dans ce film labyrinthique ? Qu’est-ce qui suscite la peur, le malaise ?
L'invitée du jour :
Anne Goliot-Lété, maîtresse de conférences en études cinématographiques à l’Université de Paris
Un film sur le temps
Au début du film, on entend le Dies iræ, qui a été intégré au répertoire du chant grégorien au 13e siècle. Ce qu'on entend ici c'est donc une mélodie qui a traversé l'histoire de la musique, puis, on entend le synthétiseur Moog tout à fait caractéristique des années 70... Donc 2 minutes 40 de film, ce sont 3h30 de trajet pour Jacques jusqu'à l'hôtel, mais surtout des siècles et des siècles d'histoire de la musique qui sont traversés. Ce début de film donne une espèce d'épaisseur temporelle et c'est important parce que c'est vraiment un film sur la temporalité.
Anne Goliot-Lété
Quand la raison passe le relais à la musique
Le son est très important chez Kubrick, comme la musique. Il est non seulement un grand mélomane, mais travaille aussi ses films, ses images, d'une manière musicale. Il explique qu'il préfère ne pas trop rationaliser, ne pas trop travailler le récit dans son côté causal, logique, mais plutôt travailler la poésie et la musicalité.
Anne Goliot-Lété
Shining, de l'Illiade à l'Odyssée
Ce qui est intéressant par rapport à la structure du film, c'est qu'on a un lieu clos qui nous conduit du côté de l'Iliade comme forme de récit, mais le lieu clos est tellement immense qu'on a aussi dans le film quelque chose de l'ordre de l'Odyssée, puisque les personnages arpentent les couloirs... On les voit beaucoup déambuler, se déplacer, ce qui donne lieu d'ailleurs au fameux plan, au travelling au steadicam.
Anne Goliot-Lété
Le steadicam, un plan culte
Le steadicam c'est un dispositif qui permet de monter la caméra sur le corps du chef opérateur, ça permet des longs travellings sans rails et sans le problème que génère souvent la caméra à l'épaule, c'est-à-dire des soubresauts. On a une forme de souplesse très précieuse dans un film comme celui-ci.
Anne Goliot-Lété
Le "Shining"
Le Shining c'est avoir la possibilité parfois de voir ce qui s'est passé, de voir des moments du futur, mais il me semble que dans le film, c'est traité sur le mode de la frontière entre les mondes.
Anne Goliot-Lété
Textes lus par Bernard Gabay :
- Stephen King, Anatomie de l’horreur, éditions Albin Michel, 1981
Sons diffusés :
- Extraits du film Shining, de Stanley Kubrick, 1980
- Archive de Stanley Kubrick, 1980 (diffusé dans À voix nue 2011, France Culture)
L'équipe
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