

Vincent Delecroix fantasmait devenir rocker, poissonnier, mais il est finalement devenu philosophe et romancier. Il a écrit sur le chant, l’ironie, la perte et la consolation. Alors comment philosophie et littérature cohabitent-elles en celui pour qui les mots creusent sans toujours consoler ?
- Vincent Delecroix philosophe et romancier
Être philosophe, est-ce un métier ? Est-ce une vocation ? Comment se fabrique un concept ? Et quel est le rôle du philosophe dans la cité ?
L'invité du jour :
Vincent Delecroix, philosophe et romancier
La philosophie comme l’art du boucher… ou plutôt du poissonnier ?
Quand j’étais plus jeune, je voulais devenir rocker… Et entre rocker et philosophe, il y a un intermédiaire : je voulais être poissonnier ! Je suis sûr que je terminerai poissonnier, c’est un métier qui me fascine, je ne connais rien de plus beau qu’un étal de poissonnier, c’est le plus beau des tableaux, et ce n’est pas simplement pour le côté nature morte flamande. Faute d’y parvenir, je fais de la philosophie. Platon comparait le philosophe à l’art du boucher, pour moi c’est plutôt celui du poissonnier… On ne coupe pas de la même manière mais il faut être aussi délicat ! Chez Platon, le principe de la dialectique est qu’il ne faut pas casser les os, le vrai boucher sacrificateur respecte, pour le poissonnier je pense que c’est pareil…
Vincent Delecroix
Un combat amoureux douloureux
Ce qui me fascine ce sont les effets de seuil entre la littérature et la philosophie, il y a un passage parfois brutal, assez douloureux. Ça ne reste jamais quelque chose d’absolument naturel, je ne philosophe pas en allant acheter mon pain ou en découpant des poissons, ce sont des moments où la pensée se cristallise, et ça me fascine. C’est un heureux combat, un combat amoureux mais la plupart du temps c’est douloureux parce que le principe de la lecture philosophique, en particulier, c’est que ce qui vous intéresse c’est ce que vous ne comprenez pas ! Ça polarise, ça vous solliscite, parfois il y a une fulgurance et dans ce cas-là ce n’est pas le monde entier qui s’éclaire mais il y a des accès de lumière : il faut goûter ça !
Vincent Delecroix
Contre l'esprit de sérieux
Je déteste viscéralement l’esprit de sérieux, ce que ridiculisent Flaubert par exemple ou même Søren Kierkegaard, qui est pourtant un auteur grave... mais il y a une telle différence entre la gravité et le sérieux. Je déteste les discours simples, unilatéraux, littéraux, ça me fait froid dans le dos, il y a quelque chose de mortifère et d’autosatisfait qui me désespère. Toute parole qui peut défaire cet esprit de sérieux je m’y engouffre !
Vincent Delecroix
Sons diffusés :
- Chanson de Tamino, Persephone (dans l’album Amir)
- Archive de Thomas Bernhard diffusée dans une émission Radio libre du 10 février 2001
- Archive de Theodor Adorno du 28 septembre 1963, RTF
- Extrait du film Little Odessa, de James Gray, 1995
LES LIVRES DE CHEVET DE VINCENT DELECROIX :
- Pensées, de Pascal
- La Chartreuse de Parme, de Stendhal
- De la nature des dieux, de Antonio Lobo Antunes
L'équipe
- Production
- Production déléguée
- Réalisation
- Collaboration
- Collaboration
- Collaboration
- Collaboration