Archéologie des erreurs collectives : épisode • 3/12 du podcast Fictions Politiques

Détail de la couverture du Prince de Machiavel (Traduction de J. Risset et présentation de P. Boucheron) / Plaque à la mémoire de Marc Bloch à l'entrée du Palais Universitaire de Strasbourg (ex-Université Marc Bloch), 2010
Détail de la couverture du Prince de Machiavel (Traduction de J. Risset et présentation de P. Boucheron) / Plaque à la mémoire de Marc Bloch à l'entrée du Palais Universitaire de Strasbourg (ex-Université Marc Bloch), 2010 - Nouveau Monde Editions/Wikicommons/Ji-Elle
Détail de la couverture du Prince de Machiavel (Traduction de J. Risset et présentation de P. Boucheron) / Plaque à la mémoire de Marc Bloch à l'entrée du Palais Universitaire de Strasbourg (ex-Université Marc Bloch), 2010 - Nouveau Monde Editions/Wikicommons/Ji-Elle
Détail de la couverture du Prince de Machiavel (Traduction de J. Risset et présentation de P. Boucheron) / Plaque à la mémoire de Marc Bloch à l'entrée du Palais Universitaire de Strasbourg (ex-Université Marc Bloch), 2010 - Nouveau Monde Editions/Wikicommons/Ji-Elle
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Quelle est la vérité du politique ? De Machiavel, fin observateur du désenchantement républicain et de l’Italie en guerre, à partir de 1494, au grand laboratoire de Marc Bloch, de la Grande guerre au second conflit mondial, quelle "anthropologie du pouvoir sur le vif" ?

Avec
  • Patrick Boucheron Historien, professeur au Collège de France, titulaire de la Chaire d’histoire des pouvoirs en Europe occidentale (XIIIe-XVIe siècle)

"Qu’est-ce que cela pourrait être une erreur collective", demande Patrick Boucheron, titulaire de la chaire « Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIᵉ-XVIᵉ siècle.

Le médiéviste, qui aime déborder sur la Renaissance, nous entraîne cette semaine dans une grande enquête autour des « fictions politiques », titre de la série de cours qu’il a donnés début 2017, au moment de l’investiture de Donald Trump et alors que le débat sur les « faits alternatifs » faisait rage dans un contexte d’effritement démocratique et de montée des populismes. Le questionnement de la vérité politique par Patrick Boucheron nous a conduit hier aux fables de Machiavel, - le Prince devant apprendre à imiter le lion et le renard pour conserver le pouvoir Aujourd’hui l’historien s’attache à « la vérité effective de la chose » dans le chapitre XV du Prince. Patrick Boucheron qui ne cesse de revenir à « l’homme d’action, toujours sur la brèche » et à son œuvre, rappelle dans son recueil de chroniques radio qui doit paraître en mai sous le titre Un été avec Machiavel aux Editions des Equateurs, qu’il voit chez l’homme politique, diplomate, "le maître des déniaisements".

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"Voici pourquoi il fut, durant toute l’histoire, l’allié des mauvais jours (…) ce franc-tireur sait toujours se porter aux avant-postes, nous obligeant à le lire non pas au présent, mais au futur".

Dans son essai Leonard et Machiavel, l’historien note que la compréhension du Prince est paralysée depuis que l'on se demande s'il est "un manuel destiné à apprendre aux princes « l'art de tyranniser », comme le soutient Diderot, ou bien au contraire s'il est une leçon de résistance adressée aux républicains, ainsi que l'espérait Rousseau". Pour Claude Lefort,

"Machiavel nous met en demeure de nous situer au point d’indétermination politique"

Si Machiavel est captivant, explique encore Patrick Boucheron,

"c’est précisément parce qu’il permet de comprendre comment l’énergie sociale des configurations politiques déborde toujours les sages ordonnancements dans lesquels on prétend les enfermer. (…) au moment où l’on s’inquiète de savoir si une situation politique va déboucher sur telle ou telle issue, mieux vaut comprendre qu’elle est animée par un mouvement d’ensemble qui les emporte de plus loin."

A l’actualité de la réflexion de Machiavel, répond celle de Marc Bloch, « historien immense et résistant héroïque », au carrefour de la naissance des sciences sociales, selon les mots de Patrick Boucheron, qui cherche à comprendre le politique par le dedans. L’auteur des Rois thaumaturges en 1924, effrayé par les aberrations, va des « Des bobards de la grande guerre » à « l’éclat trompeur des rois ». Patrick Boucheron nous propose aujourd’hui et demain une « Archéologie des erreurs collectives » où il s’agira de rompre le charme théologico-politique.

L'historien médiéviste s’interrogeant sur « la dégradation de la parole publique que nous subissons aujourd’hui » fait l’hypothèse des expérimentations pour l’Amérique trumpienne, du spectacle bien mal nommé « téléréalité ».

"Là s’est patiemment construite cette indifférence à la 'vérité effective de la chose', pour parler comme Machiavel.

Mais, dans tous les cas, c’est bien dans la fiction que s’invente la politique à venir. Et nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 24 janvier 2017.

Bibliographie de Patrick Boucheron, 2012-2017
Bibliographie de Patrick Boucheron, 2012-2017
- Nouveau Monde Edtions/Seuil/Editions des Equateurs

Pour prolonger:

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Sur la page de ce cours, après la vidéo, Patrick Boucheron propose les grands axes de son cours, émaillés de citations et de références bibliographiques. Parmi ces références :

"Ainsi, au front, on voyait le même homme, alternativement, accepter bouche bée les récits les plus fantaisistes ou repousser avec mépris les vérités les plus solidement établies" (Marc Bloch, _*_Réflexions d’un historien sur les fausses nouvelles de la guerre,_ *_1921)

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