Assimilation et intégration, des modèles américains à l’assimilation des provinces conquises en France : épisode 5/15 du podcast Intégration : constats et débats

Membres de la Commission sur l'Immigration aux Etats-Unis, connue également sous le nom de Dillingham Commission (George Grantham Bain Collection,  Library of Congress)
Membres de la Commission sur l'Immigration aux Etats-Unis, connue également sous le nom de Dillingham Commission (George Grantham Bain Collection,  Library of Congress) - Library of Congress / Wikicommons
Membres de la Commission sur l'Immigration aux Etats-Unis, connue également sous le nom de Dillingham Commission (George Grantham Bain Collection,  Library of Congress) - Library of Congress / Wikicommons
Membres de la Commission sur l'Immigration aux Etats-Unis, connue également sous le nom de Dillingham Commission (George Grantham Bain Collection,  Library of Congress) - Library of Congress / Wikicommons
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Face à l’afflux des migrants, au début du XXe siècle, quelles ont été les approches antagonistes du creuset américain? Quelle a été la croisade de l’américanisation entre 1915 et 1918 ? François Héran revient sur le modèle d'assimilation aux USA, le pluralisme culturel et l’Amérique transnationale.

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Et la France, agrégat d’une multitude de « petits pays » , fruit de l’annexion des provinces, comment s’est-elle unifiée, comment a-t-elle assimilé ses régions? S’interroge François Héran.

Le démographe-sociologue nous entraîne des Etats-Unis à la France, dans le cadre de sa nouvelle série intitulée « Intégration : constats et débats ». Il nous propose encore aujourd’hui une vaste enquête socio-historique.

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Titulaire de la chaire « Migrations et sociétés », François Héran se partage entre le Collège de France et l’animation de l’ Institut Convergences Migrations

Dans les cours précédents, François Héran a présenté les différents usages et l’évolution du terme « assimilation ».  Cette notion est apparue d'abord dans les colonies où il s'agissait d'empêcher les hommes libres de couleur, les affranchis, d’apparaitre égaux aux blancs par leur habillement ou les mariages mixtes. Il s’agissait de leur interdire tous les signes ostensibles de l’assimilation et d’une ascension sociale, afin d’éviter d’abolir toute distance entre gens de couleurs et colons.  A rebours de cette « assimilation répréhensible » dans les colonies, au tournant des XVIIIE-XIXe siècles, la notion de l’assimilation devient « une injonction à réaliser l'unité de la nation » a rappelé François Héran. De Sieyès, aux historiens de la restauration, il s'agit alors d'intégrer l'ensemble du territoire français, d'assimiler les différentes races qui sont censées s'affronter dans la nation française, explique le démographe. Nous allons retrouver cette question de l’annexion et de l’assimilation des provinces françaises en deuxième partie de cours. 

Mais pour l’heure, François Héran poursuit son analyse des débats, des controverses autour de l’immigration américaine du XVIIIe siècle à aujourd’hui. 

Dans le cours précédent, il a montré qu’il n’y avait pas vraiment de correspondance univoque entre les vocabulaires américains et les vocabulaires français autour des notions de l’intégration et de l’assimilation. Nous avons vu également que le nativisme, le thème « de l'Amérique aux Américains » a surgi très, très tôt, dès les années 1840.

A partir de 1905, les contemporains, rappelle François Héran, ont été « très sensibles » à la « montée considérable de l’immigration avec notamment les apports italiens, russes, polonais, juifs essentiellement ». Ces populations non anglophones, décrites comme moins exposées à l’influence américaines ont pu être jugées moins désirables. Alors que la pièce de Zangwill qui a initié le mot melting pot, clame « tous dans le grand creuset de Dieu et ça va faire l’Amérique! », François Héran a présenté les approches antagonistes du creuset aux Etats-Unis. 

En fait ce rêve romantique de fusion demeure assez rare dans son sens fort. Le démographe rappelle :

« C'est l'usage banalisé, consistant à dire le melting pot américain, pour dire l'Amérique de l'immigration, l'Amérique dans toute sa diversité migratoire » qui l’emporte. « C'est un peu paradoxal, note encore François Héran, parce qu’on utilise la notion qui fait référence à un outil de fusion, alors qu'en fait, on décrit une diversité ».

Cette diversité, cette idée de fusionner indifféremment toutes les origines, sont critiquées par les défenseurs d’une Amérique qui doit rester dominée par les blancs anglo-saxons. C’est alors la mise en avant de la « conformité aux normes britanniques » et de l’idée de « l’américanisation des immigrés ». 

Le cours s’est achevé sur les riches travaux de la commission Dillingham, créée par le Congrès en 1907. Ses travaux pluridisciplinaires ont été publiés entre 1907 et 1911. Toutes sortes d’associations, syndicats, ligues ont été interrogées pour essayer de comprendre si les différentes origines non anglo saxonnes ou non teutonne, comme on disait à l'époque, étaient capables de s'intégrer. 

Nous gagnons le Collège de France les 10 et 24 janvier 2020 pour le cours de François Héran, aujourd’hui "Assimilation et intégration, des modèles américains à l’assimilation des provinces conquises en France".