Qu’est-ce qui est en jeu pour le sultan Mahmud II, quand il procède à l’abolition des janissaires, corps d'élite de l’armée turque ? Comment ont pu s’exprimer le mécontentement et les résistances du peuple face à cette abolition violente ?
- Edhem Eldem professeur d'histoire à l'Université de Bogaziçi à Istanbul, titulaire de la chaire internationale d'histoire turque et ottomane au Collège de France
Rediffusion du 14/10/2019
Quel a pu être le poids économique des janissaires dans la société ottomane? A quelle « révolution à l’envers », procède le sultan qui se transforme en autocrate moderne? Comment Mahmud II se rebelle-t-il contre l’ordre normal des choses dans la capitale ottomane?
Edhem Eldem se partage entre Paris et Istanbul où il est professeur à l’université anglophone de Boğaziçi. Titulaire de la chaire internationale d'Histoire turque et ottomane au Collège de France, pour 5 ans, l’historien turc nous entraîne dans une grande série pluriannuelle intitulée, "L’Empire ottoman et la Turquie face à l’Occident".
Depuis la semaine passée, il s’attache à l’ère des reformes, entre 1820-1830. Il analyse la violente crise de l’été 1826 et la construction de l’identité de Mahmud II en sultan moderne. Il montre comment il va introduire l’image d’un sultan souriant et donnant lui-même l’exemple de ses réformes au sein de la ville, avant d’imposer son portrait officiel dans les casernes et les administrations…
Quand Edhem Eldem a initié sa série de cours au Collège de France en janvier 2018, Marc Semo a proposé aux lecteurs du journal Le Monde un stimulant portrait de l’historien turc ( "Edhem Eldem, l’histoire pour bataille", Le Monde,12 janvier 2018).
« La vocation d'Edhem Eldem, rappelle-t-il, pour le métier d'historien ne fut pas précoce. Né à Genève en 1960, déménageant de capitale en capitale, de lycée français en lycée français au gré des postes de son père, diplomate, il se consacre d'abord à des études d'ingénieur, qui l'ennuient, puis aux sciences politiques, avant de rencontrer Robert Mantran, le grand historien de l'Empire ottoman. Ce dernier l'invite à venir étudier à l'université d’Aix-Marseille. C’est dès lors une carrière internationale qui s’ouvre pour l’historien turc qui le mènera à Paris et aux Etats-Unis. »
Marc Semo cite dans ce même article Edhem Eldem à propos de la Turquie sous l’égide de Recep Tayyip Erdogan où, "depuis le coup d'Etat raté de juillet 2016, la situation est devenue de plus en plus difficile" :
"Nous faisons face à une dérive autoritaire que l'on ne peut simplement expliquer par la soif de pouvoir d'un seul homme."
Il est possible d'y entendre l'écho des mots du Professeur de Boğaziçi lors de son cours au Collège de France lorsqu'il parlait de Mahmud II :
"Le sultan est tiraillé entre l’ivresse du pouvoir et la crainte d’un attentat. Il se produit de plus en plus en public, mais ces bains de foule sont parfois l’occasion de réactions presque paranoïaques, comme lorsqu’il fait arrêter un individu dont l’attitude et le regard lui avaient parus suspects."
Dès lors pour Edhem Eldem, il s’agit de s'interroger sur les racines de l'autocratie dans son pays.
La semaine passée nous avons découvert un Mahmud II, traumatisé par les événements de 1808, quand le sultan Selim III a cherché à réorganiser l’armée. Les janissaires se sont révoltés, ont marché sur Constantinople, avant de déposer Selim III qui a été exécuté peu après en juin 1808. Mahmud II sera l'initiateur des réformes, dans l’empire ottoman tout en craignant les risques de contre-révolution.
Alors à quelle mise au pas de la ville de Constantinople s’est livré le sultan Mahmud II quand il a aboli les janissaires ? Quel a été dans ce contexte le rôle des cafés dans la société ottomane ?
Nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 1er février 2019, pour le cours d’Edhem Eldem, aujourd’hui, « Autocratie et résistances »
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