Comment peut-on dater les textes bibliques et quelle est l’histoire des canons de la Bible ? : épisode 2/8 du podcast Naissance de la Bible. Anciennes et nouvelles hypothèses

Page tirée de la Bible hébraïque de Joseph Assarfati, manuscrit de 1299, Bibliothèque nationale de Lisbonne, document extrait de l'ouvrage collectif "La Bible : une encyclopédie contemporaine" (Bayard, p. 171)
Page tirée de la Bible hébraïque de Joseph Assarfati, manuscrit de 1299, Bibliothèque nationale de Lisbonne, document extrait de l'ouvrage collectif "La Bible : une encyclopédie contemporaine" (Bayard, p. 171) - J. Assarfati/BN Lisbonne/Bayard
Page tirée de la Bible hébraïque de Joseph Assarfati, manuscrit de 1299, Bibliothèque nationale de Lisbonne, document extrait de l'ouvrage collectif "La Bible : une encyclopédie contemporaine" (Bayard, p. 171) - J. Assarfati/BN Lisbonne/Bayard
Page tirée de la Bible hébraïque de Joseph Assarfati, manuscrit de 1299, Bibliothèque nationale de Lisbonne, document extrait de l'ouvrage collectif "La Bible : une encyclopédie contemporaine" (Bayard, p. 171) - J. Assarfati/BN Lisbonne/Bayard
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Quelles sont les difficultés pour dater les 5 premiers livres de la Bible, - le Pentateuque chez les chrétiens, - la Torah chez les juifs? Demande l’éxégète-philologue, Thomas Römer. Peut-on postuler que le Pentateuque aurait été achevé au VIe siècle avant l’ère chrétienne ?

Avec
  • Thomas Römer Administrateur du Collège de France et Professeur titulaire de la chaire "Milieux bibliques"

Quels sont les textes qui seraient de l’époque de Salomon ou de l’époque perse ? 

Entre stimulante érudition et actualisation des recherches, Thomas Römer, titulaire de la chaire des Milieux Bibliques, ancien Doyen de la Faculté de Théologie de l’université de Lausanne, où il enseigne également la Bible Hébraïque, poursuit sa grande enquête au coeur des textes bibliques. Il interroge cette année la « Naissance de la Bible. Anciennes et nouvelles hypothèses ». 

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Thomas Römer, philologue et exégète s’attache à faire dialoguer l’archéologie moderne avec les sciences bibliques critiques. Dans cette perspective, il vient de publier avec l’archéologue Israël Finkelstein Aux origines de la Torah (chez Bayard). Dans une interview récente autour de ce livre, Thomas Römer rappelle :

« les grands changements qui sont intervenus dans l’archéologie de la Terre sainte, notamment concernant les récits des origines, des patriarches ou l’Exode. Ces récits ne s’avèrent pas toujours étayés par l’archéologie. Ainsi les royaumes d’Israël et de Juda ne deviennent importants qu’à partir des VIIIe-VIIe siècles av. J.-C. Cette approche a remis en question un certain nombre d’idées sur les règnes de David et de Salomon. » Ce « bouleversement des chronologies situe désormais la plupart des écrits bibliques à partir des VIIIe-VIIe siècles av. J.-C. »

De fait, explique-t-il encore, il ne faut plus regarder « la chronologie biblique comme une succession mais plutôt comme des récits fondateurs buissonnants, certains étant plus récents que d’autres. C’est une invitation à repenser les frontières entre histoire, historicité et récits bibliques. Les patriarches ou l’Exode sont des récits mythiques et n’ont pas forcément de fondements historiques même s’ils peuvent reposer sur des traces de mémoire ». 

Pour Thomas Römer, il s’agit alors « de s’intéresser aux contextes historiques dans lesquels les textes bibliques ont vu le jour. Ces textes doivent être analysés de manière historique. Ils ne sont pas tombés du ciel, ils ont une histoire. » 

Fragment de papyrus provenant de Qumrân, extrait des Psaumes. Musée d'Israël, Jérusalem. Document extrait de l'ouvrage collectif "La Bible : une encyclopédie contemporaine" (Bayard, p. 186)
Fragment de papyrus provenant de Qumrân, extrait des Psaumes. Musée d'Israël, Jérusalem. Document extrait de l'ouvrage collectif "La Bible : une encyclopédie contemporaine" (Bayard, p. 186)
- Qumrân/Musée d'Israël/Bayard

« Pour mener à bien cette démarche exégétique, nous travaillons sur les récits les plus anciens de Qumrân en comparant leur diversité selon les transcriptions, les différences de style, de vocabulaire, les ruptures, une sorte d’archéologie du texte. À partir de ces sources, nous apprenons à distinguer leurs différentes strates. Il ne faut pas oublier qu’ils ont été écrits principalement sur des parchemins ou des papyri, supports très fragiles, réécrits tous les 30-40 ans. Ces réécritures ont impliqué des modifications riches d’enseignements. Nous comparons également ces textes avec d’autres sources notamment du Proche-Orient, rapprochant par exemple la structure d’un livre du Deutéronome de celle de textes de vassalité de l’Empire néo-assyrien. L’informatique vient à notre aide par comparaison des différents récits bibliques soulignant leurs évolutions et changements. ».

Ce sont ces questions que nous retrouvons aujourd’hui.  Pourquoi est-il difficile de fixer une ligne de démarcation claire entre l’hébreu biblique « classique » et l’hébreu « tardif » ? Quand les textes ont-ils été fixés et qu’est-ce qu’un canon ? La Torah fut-elle compilée exclusivement à Jérusalem ?

Nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 21 mars 2019 pour le cours de Thomas Römer, aujourd’hui Comment peut-on dater les textes bibliques et quelle est l’histoire des canons de la Bible ?

Pour prolonger :

  • Thomas Römer  vient de publier avec l’archéologue Israël Finkelstein Aux origines de la Torah. Nouvelles rencontres, nouvelles perspectives (chez Bayard en 2019). 
  • Il a également contribué au stimulant et très bel ouvrage collectif, à la riche belle iconographie, La Bible, une encyclopédie contemporaine. Origines, archéologie, traductions, découvertes (Bayard, 2018)
  • Sur des dessins de Léonie Bischoff, il a également publié Naissance de la Bible : comment elle a été écrite, aux éditions Le Lombard, Collection La petite bédéthèque des savoirs