

De Constantinople, la byzantine à Istanbul, l’ottomane, comment cette grande cité édifiée de part et d’autre du détroit du Bosphore, est-elle devenue une ville-référence dans le monde islamique à côté des Samarcande & Ispahan, puis au-delà, ville référence aussi par rapport aux autres grandes cités?
- Sanjay Subrahmanyam Professeur à l'université de Californie à Los Angeles, professeur au Collège de France, Chaire Histoire globale de la première modernité.
Au-delà des rapports entre palais et ville, sous l’empire ottoman, quelle histoire sociale peut-on faire de cette capitale à l’époque moderne, à la croisée de deux continents, l’Europe et l’Asie ?
Sanjay Subrahmanyam, titulaire de la chaire d'Histoire globale de la première modernité, qui se partage entre l'université de Californie à Los Angeles et le Collège de France où il est professeur invité depuis 2013, se penche sur le cas de Constantinople devenue Istanbul, dans le cadre de sa série, intitulée, "Les plaques tournantes de l'histoire globale, XVIᵉ-XVIIIᵉ siècles : Carrefours et lieux de rencontre".
Après Lisbonne et Goa, hier, villes musulmanes conquises par les Portugais, voici Constantinople qui va passer des chrétiens byzantins aux musulmans ottomans en 1453. La ville est alors isolée. Sanjay Subrahmanyam rappelle les crises majeures, qui ont précédé cette conquête : l’attaque par les Arabes en 673-677 et la prise de Constantinople par les croisés entre 1204 et 1261. S’il y a des destructions avec l’arrivée des Ottomans, il note aussi la transformation des bâtiments, dont Sainte Sophie est le fleuron et comment ces bâtiments byzantins ont pu être aussi une source d’inspirations pour le nouvel empire.
Après les Portugais, notre historien qui aime décentrer le regard, changer les points de vue et observer les points de connexion et d’interactions, entre différentes sociétés et cultures, revient donc ce matin sur les Ottomans. Dans le cours qui a ouvert cette série sur l’histoire des villes, Sanjay Subrahmanyam a rappelé comment la ville musulmane avait "toujours posé problème par rapport au modèle, imaginé parfait, de la ville occidentale". Il avait cité André Raymond, qui a publié Ville musulmane, ville arabe. Dans cet ouvrage, il rappelle :
"Ne trouvant dans les théories de Max Weber sur l'évolution des villes occidentales, rien qui pût s'appliquer aux villes qu'ils avaient sous leurs yeux, les spécialistes (ce fut en particulier le cas d'un Jean Sauvaget en Syrie) ne pouvaient que constater qu'ils avaient affaire à un type d'urbanisme qui ne se définissait que par l'énumération morose de tout ce qui lui manquait : la régularité et les institutions de la ville antique et les chartes et les communes de la ville médiévale".
André Raymond écrit encore "La ville n'est qu'une non ville, l'urbanisme musulman qu'un non urbanisme". La première étude de cas avait donc porté sur une ville jugée plus marginale, bien qu’importante symboliquement, La Mecque et l’historien croisant de nombreuses sources, témoignages, cartes, représentations, avait contourné les stéréotypes et rendu sa « vivacité » à la ville Sainte.
Quelles lectures pouvons-nous faire de Constantinople qui devient Istanbul et de ses mutations, du flamboyant centre byzantin où la présence vénitienne très affirmée a été portée par les privilèges commerciaux obtenus en 1082, à la capitale ottomane qui fascine, le Sultan, régnant depuis le palais de Topkapi, édifié sur l’acropole, où il domine la Corne d'Or, le Bosphore et la mer de Marmara à l’époque moderne?
Au-delà des intrigues de palais et de vizirs, se déploie,
"une ville de guildes, de petits métiers et de fêtes", nous dit Sanjay Subrahmanyam,
à partir de laquelle, il serait possible de faire émerger une histoire sociale dans le glorieux XVIIe siècle d’Istanbul…
Pour cette histoire au long cours, nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 8 février 2017, aujourd’hui « des villes et des empires, Constantinople-Istanbul »
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