

De quelle façon un entrepreneur de création, tel un architecte, repousse-t-il les limites et avec quels risques? Le sociologue Pierre-Michel Menger analyse ce qu'est la notion de durabilité, appliquée aux oeuvres d’art. A quelles épreuves de sélection et du temps ces oeuvres sont-elles soumises ?
- Pierre-Michel Menger sociologue, titulaire de la chaire Sociologie du travail créateur au Collège de France
Enfin, que pouvons-nous apprendre des brocanteurs « de l’aube », sur le marché aux puces, qui transforment "progressivement" un bien "par une identification de ses caractéristiques", et de fait, dévoilent sa valeur ?
Pierre-Michel Menger est titulaire de la chaire de Sociologie du travail créateur, au Collège de France et Directeur d'études à l’EHESS. Il poursuit, cette semaine, sa grande enquête inaugurée en 2019, sous le titre « Comment achever une œuvre ? Travail et processus de création ».
Dans son premier cours, il a rappelé de quelle façon les "motifs de perfection et d’imperfection" peuvent être "des thèmes stratégiques du jeu créateur" chez les artistes et il est revenu sur la "tension dynamique" et fondamentale, entre le fait "d’achever et d'inachever en art". C’est "un modèle exploratoire", selon ses mots, qu’il soumet aux études de cas, cette année. Il a réuni "3 cas fameux", "sous le thème du processus de travail créateur", l’architecte Frank Lloyd Wright, le compositeur Pierre Boulez, et le sculpteur Auguste Rodin.
Pierre Michel Menger a aussi proposé deux "intrigues" :
"La première intrigue s’applique aux carrières, et à certaines œuvres clés dans ces carrières, la seconde intrigue s’applique à la carrière des oeuvres. J’emploi le mot intrigue comme le fait Paul Ricoeur, pour souligner comment enchâsser une analyse généralisante et une mise en récit narratif, à partir d’analyse de cas. Le point de jonction de ces deux intrigues réside dans la question : comment s’y prend-on quand on travaille de projet en projet, quand on achève et qu’on recommence, quand on laisse des choses de côté et qu’on peut les reprendre, quand on organise le travail en de multiples projets déployés simultanément, mais qui avancent à des rythmes différents ?".
Pierre-Michel Menger a rappelé également les immenses inégalités qui touchent le monde de la création et les incertitudes de revenus parmi les créateurs. De nombreux artistes ont une activité alimentaire à côté de leur activité créatrice. De facto, ils sont "multitâches". Mais dans le cas de nos fameux trois créateurs, Rodin, Boulez et Wright, dans quelle mesure la démultiplication de soi n’est-elle plus une contrainte, liée à la survie matérielle, mais "une conquête, liée à la création" ?
Le cours s’est achevé sur la question des prises de risques et de la démultiplication de nos trois artistes, en « hommes orchestres », « entrepreneurs » de création multitâches, qui cherchent à la fois à innover et à repousser les limites… Et ce faisant, comment nous offrent-ils des oeuvres qui franchissent l’épreuve du temps ? Comment ces oeuvres se transforment-elles en durant ? Après un premier focus sur le compositeur et chef d'orchestre, Pierre Boulez, Pierre-Michel Menger met un coup de projeteur sur l’architecte Frank Lloyd Wright.
Nous gagnons le Collège de France, le 5 mars 2021 pour le cours de Pierre Michel Menger, aujourd’hui, « Introduction, 2e partie : de la durabilité dans le monde créateur. »
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