

Comment la révolte palestinienne de 1937 devient-elle un moment important de la constitution du nationalisme palestinien ? S’interroge l’historien Henry Laurens. Comment le keffieh devient-il le symbole de cette révolte ?
- Henry Laurens Professeur au Collège de France, titulaire de la chaire d'Histoire contemporaine du monde arabe.
Comment la violence devient-elle terrible, dans cette crise ? Entre la très dure répression des Britanniques qui ont le mandat de la Palestine et qui mettent en place une brutale législation antiterroriste, et l’engrenage infernal des représailles et contre-représailles entre Arabes et juifs?
Henry Laurens, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire "Histoire contemporaine du monde arabe" a ouvert la semaine passée le large chapitre de " l'hégémonie britannique 1926-1956" dans le cadre de sa série pluriannuelle, intitulée "Les crises d'Orient".
Nous suivons l’évolution des pays du Proche-Orient, la Syrie et le Liban sous mandat français, la Palestine sous celui des Anglais, l’Irak indépendante, mais liée par le traité d’alliance anglo-irakien, l’ensemble Egypte-Soudan, l’Arabie Saoudite qui se sent encerclée, les modernisateurs autoritaires avec la Turquie Kemaliste et l’Iran de Rheza Khan, et, pour des raisons stratégiques et de communications, cette géographie s’étend aux Balkans ou aux confins de l’Union Soviétique…
Le dernier cours s’était achevé sur la question de l’élaboration d’un premier plan de partage pour la Palestine. Henry Laurens avait résumé les termes du rapport Peel publié le 7 juillet 1937, qui se fonde sur
L’impossibilité de faire émerger une identité commune entre Juifs et Arabes. En fonction des différents scénarios d’immigration, les Juifs deviendraient majoritaires entre 1947 et 1960.
Les obligations britanniques envers les deux populations sont inconciliables. La cantonalisation est impossible car elle implique la présence permanente d’un arbitre britannique. il ne reste plus qu’à diviser la Palestine en trois parties.
De leur côté, avait expliqué l’historien :
Les nationalistes arabes décident de tenir un congrès en Syrie (…) Le congrès s’ouvre à Bludan, dans la région de Damas, le 8 septembre 1937. Les délégués sont palestiniens, libanais, syriens, irakiens et égyptiens.
Les résolutions votées le 10 septembre insistent sur l’identité arabe de la Palestine, le refus du partage et de l’État juif, l’abolition du mandat et l’arrêt de l’immigration juive.
Du coup, rappelle Henry Laurens :
les Britanniques commencent à s’inquiéter. Le Haut comité Arabe a réussi à mobiliser les opinions publiques arabes, y compris en Égypte où les Frères musulmans s’en prennent aux Juifs d’Égypte.
La compensation accordée aux Arabes qui serait une Syrie du sud destinée à fusionner avec d’autres États, en premier lieu la Transjordanie, perturbe tout le système politique arabe en voie de formation. L’Arabie saoudite s’inquiète du risque de voir renforcer les positions des Hachémites.
La révolte éclate en Palestine en 1937, comme nous allons le voir en première partie de cours. À partir du second semestre 1938, la réalité politique du Proche-Orient est dominée par la menace croissante de la guerre.
Nous allons découvrir en seconde partie, comment l’Orient arabe se met sur le pied de guerre, comment les démocraties libérales ont abandonné les juifs d’Europe, et comment les Égyptiens ont opéré une conversion culturelle à l’arabisme.
Et nous gagnons le Collège de France le 28 novembre 2018.
Pour prolonger :
Henry Laurens a notamment publié Les crises d'Orient. Question d’Orient et Grand Jeu (1768-1914), chez Fayard en 2017 et prochainement le tome 2 de ces crises d’orient va paraître sous le titre La naissance du Moyen Orient 1914-1949.
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