Essor et reflux de la démocratie économique : épisode • 1/9 du podcast Figures juridiques de la démocratie

William Gropper's "Construction of a Dam" (1939), is characteristic of much of the art of the 1930s, with workers seen in heroic poses, laboring in unison to complete a great public project.
William Gropper's "Construction of a Dam" (1939), is characteristic of much of the art of the 1930s, with workers seen in heroic poses, laboring in unison to complete a great public project. - Wikicommons
William Gropper's "Construction of a Dam" (1939), is characteristic of much of the art of the 1930s, with workers seen in heroic poses, laboring in unison to complete a great public project. - Wikicommons
William Gropper's "Construction of a Dam" (1939), is characteristic of much of the art of the 1930s, with workers seen in heroic poses, laboring in unison to complete a great public project. - Wikicommons
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Quels sont les liens étroits et anciens entre la face politique et la face économique de la démocratie ? s'interroge Alain Supiot. Comment la démocratie pose-t-elle la règle de la répartition des richesses ? Comment le droit social peut-il être ancré dans une représentation partagée de la justice?

Avec
  • Alain Supiot Juriste, docteur honoris causae, professeur émérite au Collège de France

Comment "le travail indépendant pour tous", s’avère-t-il la base d’un régime démocratique, "que chacun puisse vivre, dans l’indépendance, du fruit de son travail"? demande encore le juriste Alain Supiot. Quels sont les dispositifs en France, en Allemagne et aux Etats-Unis qui ont pu exprimer l’idée de démocratie économique à l’âge industriel? Comment cette démocratie économique a-t-elle reflué sous l’effet du tournant néolibéral? 

La Grande Bretagne du Brexit, l’Italie et son étrange coalition gouvernementale, la France des gilets jaunes, mais aussi la Suède et l’Allemagne, aux dernières élections de 2018, montrent tour à tour au fil des crises politiques et économiques qui les touchent, combien nos vieilles démocraties sont bousculées par le doute, la colère sociale et l'angoisse. 

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Face à un laboratoire politique qui semble bien en panne, quelles questions se poser et comment nourrir sereinement le débat dans une approche plurielle et interdisciplinaire? 

A partir de l’analyse juridique, Alain Supiot, titulaire de la chaire État social et mondialisation : analyse juridique des solidarités,  observe de manière privilégiée les grandes mutations qui nous touchent.

Le juriste s’est notamment attaché dans les séries de cours que nous avons diffusés en 2017 et en 2018 aux effets du recul du gouvernement par les lois,  conséquence de la globalisation et de la gouvernance par les nombres, dans un monde contemporain où tout est soumis, désormais ou presque, au « calcul d’utilité ». Nous avions vu que l’ordre juridique se trouvait inféodé à l’ordre économique et que de nouveaux liens, des "nouvelles figures de l’allégeance" émergeaient alors que l’Etat social s’effaçait…

Alain Supiot, membre de la Commission mondiale sur l'avenir du travail, a débuté en 2016 et sur deux ans, une grande réflexion autour des " Figures juridiques de la démocratie économique", que nous vous proposons en ce début d'année. Le juriste précise en ouverture de sa nouvelle série :

"La démocratie économique est entendue (c’est une première définition !) comme l’ancrage du droit social dans une représentation partagée de la justice. Si l’on admet  — dans le prolongement des analyses de Karl Polanyi — que les marchés sont « un élément utile mais secondaire dans une société libre », le problème qui se pose aujourd’hui est de « ré-encastrer » les marchés dans la société et de cesser de réduire la vie humaine à la vie économique, et la vie économique à l’économie de marché. Ceci suppose des dispositifs juridiques qui obligent à prendre en considération l’expérience concrète de ceux qui travaillent."

Face aux conséquences désastreuses de la crise de 1929, François Mauriac avait fait part à son frère dans une lettre de ses grandes inquiétudes et de sa tristesse face à la jeunesse accablée par les maux de l’époque, en 1932 :

"Nous aurons été bien gâtés en comparaison de nos enfants. [...] Ce que nous observons de tout près, dans notre famille, c’est l’anéantissement de la classe moyenne [...]. Nos enfants seront des besogneux s’ils ne sont pas armés. Il faut apprendre à être à la fois heureux et pauvres." 

Cette angoisse du grand bourgeois, propriétaire terrien a nourri la révolte de l’écrivain Mauriac contre la politique fiscale du début des années trente et le poids des charges et fait naître le journaliste engagé contre les injustices et la montée des fascismes. 

Comme le rappelle Alain Supiot, dans la grande série qui 'ouvre aujourd'hui, 

"la proclamation des droits économiques et sociaux a résulté au XXème siècle de l’expérience historique des deux guerres mondiales. La référence à cette expérience est explicite dans la Déclaration de Philadelphie de 1944 :

L'expérience a pleinement démontré le bien-fondé de la déclaration contenue dans la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, et d'après laquelle une paix durable ne peut être établie que sur la base de la justice sociale"

Dans une première partie, Alain Supiot analyse la "prise du pouvoir économique par les managers", qui "ont privilégié l’investissement et la politique salariale sur les intérêts des actionnaires", pour favoriser la croissance des entreprises, du New deal au tournant des années Thatcher-Reagan, puis dans une deuxième partie, il revient sur les effets destructeurs de ce qu’on appelle la Corporate gouvernance, qui a condamné les entreprises au court-termisme?

Et nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 28 octobre 2016, pour le cours d’Alain Supiot, « Figures juridiques de la démocratie économique  »

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Présentation de l'Institut d'études avancées Nantes dont ALain Supiot est lefondateur en 2008 ; il en préside aujourd'hui le comité stratégique.

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