Intégration, radicalisation et discrimination, le sort de la 2e génération (13/15) : épisode 28/15 du podcast Intégration : constats et débats

Yacine, 15 ans, adolescent partis pour la Syrie. Capture d'écran, via "LaDépêche.fr", image reprise par "Le Nouvel Obs" en 2014.
Yacine, 15 ans, adolescent partis pour la Syrie. Capture d'écran, via "LaDépêche.fr", image reprise par "Le Nouvel Obs" en 2014. - La Dépêche/Le Nouvel Obs "Ce que l'on sait des Français candidats au djihad"
Yacine, 15 ans, adolescent partis pour la Syrie. Capture d'écran, via "LaDépêche.fr", image reprise par "Le Nouvel Obs" en 2014. - La Dépêche/Le Nouvel Obs "Ce que l'on sait des Français candidats au djihad"
Yacine, 15 ans, adolescent partis pour la Syrie. Capture d'écran, via "LaDépêche.fr", image reprise par "Le Nouvel Obs" en 2014. - La Dépêche/Le Nouvel Obs "Ce que l'on sait des Français candidats au djihad"
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Comment mesurer l’ampleur d’un phénomène, comme les radicalisations ? Comment caractériser la causalité dans des choses aussi complexes, alors que se mêlent le hasard et la nécessité? S’interroge le démographe sociologue François Héran.

Avec

Nouvelle diffusion du 10/09/2020

Comment appréhender aujourd’hui le salafisme, qui peut apparaître dans certaines situations récentes, comme un terreau pour des actions violentes? Pourquoi l’hostilité à l’égard des Occidentaux? Comment peut intervenir la question du séparatisme et de l’entre-soi ? 

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François Héran, titulaire de la chaire « Migrations et société », se partage entre le Collège de France et l’animation de l’ Institut Convergences Migrations. Dans le cadre de sa série intitulée, « Intégration : constats et débats » l'anthropologue-démographe revient sur les différents travaux et enquêtes qui tentent d’appréhender le thème complexe de l’intégration.  

L’introduction de son cours a fait l’objet d’une publication dans la revue La Vie des idées. François Héran rappelle :

"Le chercheur en sciences sociales n’a pour objectif ni d’alarmer l’opinion ni de la rassurer. (…) En matière d’intégration, le tableau est contrasté, ce qui écarte d’emblée toute vision manichéenne et nous pousse à chercher des explications vérifiables. (…) Dans mon esprit, l’énoncé « L’intégration des immigrés : constats et débats » – véhicule discrètement trois convictions : 

- « l’intégration des immigrés et de leurs descendants (avec tous les harmoniques de la notion et toutes ses dissonances) est un sujet digne d’intérêt, à la fois comme concept théorique et comme réalité empirique ;

- "la notion d’intégration est hautement controversée, au point d’être rejetée par la plupart des intéressés et d’être récusée par nombre de chercheurs, mais c’est précisément ce qui en fait l’intérêt. Si la notion d’intégration était d’emblée consensuelle, il serait inutile d’en parler aussi longuement ; 

- «  il y a un lien inséparable entre débats et constats. La science sociale doit débattre de tout, y compris de l’établissement des faits. Il n’y a pas de constat sans débats, c’est entendu. Mais il faut rappeler que l’inverse est également vrai : pas de débat sans constats."

Pour François Héran, "on ne peut pas philosopher indéfiniment sur l’intégration des immigrés ou même sur l’intégration de la société en général sans s’appuyer à un moment donné sur des faits d’observation

"Certains auteurs valorisent l’idéal de l’intégration, d’autres le jugent insuffisamment contraignant, d’autres encore dénoncent dans le mot d’ordre de l’intégration un instrument de domination. Mais l’exercice tournerait à vide si nous n’essayions pas d’appréhender aussi l’intégration comme un ensemble de réalités concrètes, une suite de processus observables au fil du temps – pas seulement l’intégration telle qu’elle doit être ou ne pas être, mais l’intégration en acte, l’intégration telle qu’elle se fait, telle qu’elle se constate empiriquement. Avec des données provisoires et imparfaites, sans doute, mais en sachant que les données imparfaites sont aussi des données perfectibles."

Aujourd’hui et demain, François Héran nous plonge dans de grandes enquêtes. Il va ouvrir en fin cours le question des discriminations.

François Héran poursuit l’interrogation initiée dans le cours précédent sur les liens qui peuvent exister entre le communautarisme, l’Islam et le radicalisme. Il revient aujourd’hui sur l’important débat autour des sources du radicalisme. Il s’est attaché en particulier aux travaux d’Olivier Roy et de Gilles Kepel qui analysent différentes facettes du parcours djihadiste. 

Le cours s’est achevé hier sur le nihilisme des jeunes djihadistes et leur fascination pour la mort telle qu’Olivier Roy a tenté de l’analyser. François Héran a noté que c’était difficile de déterminer si cette théorie est psychologique ou psycho-sociale.  Après un rappel de la richesse des recherches sur tous ces sujets très complexes, François Héran poursuit sa lecture des travaux de Gilles Kepel sur les terreaux du djihadisme. 

A côté de l’étude des textes dans leurs langues d’origines, des phénomènes de propagandes et de réseaux, François Héran relève comment Gilles Kepel a pu s’intéresser à un certain contexte socio-économique, comme la marginalisation sociale… la place du clientélisme des mairie, la position ambiguë du salafisme. Quant au politologue François Burgat, il se demande pourquoi l’hostilité croissante des musulmans envers l’Occident ? Comment entrent en jeu le politique et les rapports de domination ?

Nous gagnons le Collège de France, les 21 et 28 février 2020 pour le cours de François Héran, aujourd’hui  «  Intégration, radicalisation et discrimination, le sort de la 2e génération »

Autour de l'image de Une :

L'image de Une est extraite de l'article du Nouvel Obs, " Syrie. Ce que l'on sait des Français candidats au djihad", publié le 20 janvier 2014

"Sur le plan psychologique, le processus d'endoctrinement est savamment décortiqué depuis de nombreuses années. Le profil de ces jeunes est désormais un schéma classique : ils ont entre 18 et 25 ans, plutôt originaires des banlieues des grandes villes et en rupture sociale ou scolaire. A chaque témoignage, ce sont souvent les mêmes commentaires qui accompagnent les révélations sur les profils des candidats français au djihad : leur mode de vie "normal" ne fait planer aucune suspicion."

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