Qu’arriva-t-il aux Philistins et à leur dieu Dagôn après avoir déporté l’arche d’Israël dans la ville d’Ashdod? Comment la double victoire des Philistins est-elle contrebalancée par la double défaite du Dieu Dagôn ? Comment "la main de dieu" s’avère-t-elle une notion très courante au Proche-Orient?
- Thomas Römer Administrateur du Collège de France et Professeur titulaire de la chaire "Milieux bibliques"
Qu’est-ce que la stratégie d’évitement du seuil? Quelles sont les plaies envoyées à la ville d’Ashdod puis à Gath quand l’arche est à nouveau déplacée par les Philistins ?
Thomas Römer, titulaire de la chaire des Milieux Bibliques, ancien Doyen de la Faculté de Théologie de l’université de Lausanne, nous entraîne dans une vaste enquête au coeur des textes bibliques mais aussi dans la perspective des dernières découvertes archéologiques et philologiques dans le cadre de sa nouvelle série intitulée "L’Arche d'alliance : mythes, histoires et histoire". L’exégète s’attache aux textes bibliques qui en parlent en croisant avec les autres sources du monde antique pour analyser les transformations de la fonction originelle de l’arche.
Thomas Römer montre que l’histoire de l’arche participe à l’unification multiséculaire et progressive de
"la religion d’Israël autour de Yahvé et de lui seul."
Dans un entretien au Nouvel Observateur, il rappelle les différents contextes d’écriture de la Bible. Selon lui,
"le règne de Josias marque à cet égard un tournant. Avec sa réforme politique et religieuse, dans les années 620 av. J.C., le roi opère un grand ménage dans le temple de Jérusalem. Pour consolider une royauté et une identité affaiblies, Josias centralise la religion judéenne autour de Yahvé et élimine les cultes qui lui étaient liés, comme celui d’Aresha, sa parèdre. (...) Ce que la Loi du Deutéronome exige n’est d’abord qu’une monolâtrie, c’est-à-dire le fait de n’adorer qu’une seule divinité, Yahvé, et en un seul endroit, au temple de Jérusalem".
Après la destruction de Jérusalem en 587 av JC., l’exégète rappelle que "la société judéenne vit une crise identitaire profonde". Et de commenter :
"Le coup de génie des intellectuels judéens en exil va être de retourner cette rhétorique des vainqueurs au profit de Yahvé. Les scribes qu'on appelle aujourd'hui "deutéronomistes", puisqu'ils s'inspirent du style et de la théologie du Deutéronome, vont donc récrire l'histoire.
À la fin du Livre des Rois (2 Rois 24-25), ils expliquent ainsi que c'est Yahvé lui-même qui a décidé tous ces événements et qu'il s'est servi des Babyloniens comme d'un outil entre ses mains pour punir son peuple et les rois qui se sont sans cesse écartés de sa volonté, qui est inscrite dans le livre du Deutéronome. Et si Yahvé s'est montré capable de contrôler les dieux de Babylone, c'est que ceux-ci ne sont pas de vrais dieux, mais des statues qu'on promène, de vulgaires bouts de bois ou de métal fondu sans le moindre pouvoir".
Dans le cours précédent, nous avons assisté ainsi à la défaite du dieu des Philistins face à l’arche. Nous découvrons cette semaine comment la supériorité de cette arche des Hébreux va être démontrée.
Nous gagnons tout de suite l’amphithéâtre du Collège de France, le 5 avril 2018 pour le cours de Thomas Römer, aujourd’hui "L'arche en territoire philistin".
Bibliographie :
Thomas Römer, L'invention de Dieu, Seuil, 2014
Thomas Römer, sur des dessins de Léonie Bischoff, Naissance de la Bible : comment elle a été écrite, Le Lombard, Collection La petite bédéthèque des savoirs, 2018
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