

Quelles ont été les modalité d’un antilibéralisme diffus, puis intégral ? Demande Pierre Rosanvallon. Qu’est ce qui s’est joué dans la critique de l’avènement de la société des individus au tournant des années 1980? S'agissait-il d'une forme de radicalisation problématique de la modernité?
- Pierre Rosanvallon historien, professeur émérite au Collège de France, titulaire de la chaire d'Histoire moderne et contemporaine du politique au Collège de France
Nouvelle diffusion du 14 mars 2018
Comment la première critique des droits de l’homme, dans un article de Marcel Gauchet pour la revue Le Débat fera-t-elle "date et école" ? Si la formulation stigmatisante et méprisante de ce qu’on appelle le « droit du l’hommisme » n’est pas encore trouvée, comment « le procès en est-il cependant ouvert et suffisamment instruit »? S’interroge encore Pierre Rosanvallon. Comment s’est déchainée depuis lors une radicalisation des aversions, une mise en avant d’un peuple essentialisé et jugé abandonné et comment s’est ouvert le procès de mai 68, la pensée anti-68, canalisant toutes les critiques virulentes de la modernité?
Pierre Rosanvallon, titulaire de la chaire Histoire Moderne et Contemporaine du politique, nous entraîne dans une vaste fresque, qui alterne les séquences d’histoire récente et plus lointaines et celles de récit personnel, où ce grand observateur du laboratoire démocratique, n’hésite pas à faire part de ses aveuglements, de ses enthousiasmes et de ses « perplexités » dans le cadre de la série sur deux ans, Les années 1968-2018 : une histoire intellectuelle et politique.
Le cours précédent s’est attaché, en 2e partie, aux tentatives d’hégémonie intellectuelle de deux courants naissants à droite : les « nouveaux économistes » promoteurs d’une vulgate libérale et la « nouvelle droite », - qualifiée ainsi par « euphémisme », soulignait Pierre Rosanvallon, alors qu’elle marquait le « retour d’une pensée d’extrême droite intellectuellement structurée vers la fin des années 1970 ».
Or "à distance de ces deux premières tentatives contraires et concurrentes d’inverser la marche des idées et qui ont échoué au début des années 1980, c’est une autre vague de fond, d’abord à peine perceptible, qui va se former au large pour venir spectaculairement battre le rivage au tournant du XXIe siècle. Tout un ensemble d’essayistes et d’intellectuels, venant de la gauche pour la plupart, d’abord distants les uns des autres, sans histoire commune, vont progressivement dessiner à gros traits les contours d’une critique du monde contemporain en rupture frontale avec les canons dominants du progressisme. On les qualifiera, plus tard à leur grand dam, de 'nouveaux réactionnaires' ou 'd’antimodernes'."
C’est dans ce contexte que l’historien interroge ce qu’il appelle le "Grand retournement" et qu'il revient sur « l’affaire Lindenberg », Daniel Lindenberg ayant publié en 2002 Le Rappel à l'ordre. Enquête sur les nouveaux réactionnaires (dans la collection La République des Idées).
Et nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 24 janvier 2018 pour le cours de Pierre Rosanvallon, aujourd’hui « ruptures équivoques et critiques de la modernité »
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