Textes, textures, images - Leçon inaugurale de Victor Stoichita

"Les Fileuses" (1656). L'œuvre représente le moment où le tisserand Arachne a été transformée en araignée par la déesse Athéna et constitue l'une des œuvres mythologiques les plus connues du peintre.
"Les Fileuses" (1656). L'œuvre représente le moment où le tisserand Arachne a été transformée en araignée par la déesse Athéna et constitue l'une des œuvres mythologiques les plus connues du peintre. - Diego Velázquez (Wikipedia)
"Les Fileuses" (1656). L'œuvre représente le moment où le tisserand Arachne a été transformée en araignée par la déesse Athéna et constitue l'une des œuvres mythologiques les plus connues du peintre. - Diego Velázquez (Wikipedia)
"Les Fileuses" (1656). L'œuvre représente le moment où le tisserand Arachne a été transformée en araignée par la déesse Athéna et constitue l'une des œuvres mythologiques les plus connues du peintre. - Diego Velázquez (Wikipedia)
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Comment l’œuvre d’art peut-elle être un tissu, une toile de connexions ? Comment mieux situer le tableau de Velázquez, "les Fileuses", qui met en scène la fable d’Arachné, dans l’histoire littéraire et picturale de l’Europe ? s’interroge l'historien et critique d'art Victor Stoichita.

Quels sont les liens entre ce chef-d’œuvre de Velázquez et celui peint par le peintre italien Le Titien, sous le titre L’enlèvement d’Europe et comment ces deux tableaux sont-ils liés aux récits mythologiques d’Ovide, Les Métamorphoses ? Quel lecteur d’Ovide a pu être le peintre espagnol Velázquez ? 

L'Enlèvement d'Europe (1560-1562)
L'Enlèvement d'Europe (1560-1562)
- Titien (1490–1576) / Wikipedia

L’historien et critique d’art, d’origine roumaine, Victor Stoichita, est professeur invité au Collège de France, titulaire de la chaire européenne pour l’année 2017-2018.

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Spécialiste de la peinture de la Renaissance et du baroque, notamment en Italie et en Espagne, il s’est particulièrement « intéressé à l’herméneutique des images et à leur fonction dans la tradition occidentale », dans une approche interdisciplinaire, chère à l’esprit du Collège de France, comme cela est rappelé dans la présentation de son riche itinéraire.

La leçon inaugurale qu’il donne sous le titre « Les Fileuses de Velázquez. Textes, textures, images » introduit sa série de cours sur « l’Europe des images, » où il propose d’interroger ce que l’on « peut encore apprendre aujourd’hui des voyages, réels ou virtuels, des artistes », comme Dürer, Bellini, ou Velázquez. Ces  voyages, dit-il, « sont autant de moyens de faire circuler les regards,  les images et les valeurs ». Quelle est alors la place du regard, de  l’image, voire de l’art dans la constitution de l’identité et de la  différence européenne » ? Se demande-t-il. 

L’historien-critique d’art  nous propose une passionnante exploration de deux tableaux qu’il nous décrit, "L’enlèvement d’Europe" par Le Titien au XVIe siècle et "Les Fileuses" par Velázquez au siècle suivant, et il interroge leurs rapports avec Les Métamorphoses d’Ovide, les deux tableaux mettant en scène ou faisant références aux récits mythologiques tissés par l’auteur antique. 

Victor Stoichita qui questionne les jeux de citations et d’intertextualités plus ou moins explicites, note  que 

"Velázquez  se montre sensible aux multiples valeurs symboliques du tissage. Si le «  poème » du Titien se proposait comme la réplique visuelle d’un texte,  le tissu velázquien se propose comme une double réplique : textuelle et figurative. Certains détails l’attestent. Tant le passage de l’histoire d’Europe à la tapisserie d’Arachné (chez Ovide) que le transfert du  tableau de Titien au tapis des Fileuses (chez Velázquez) font appel à une stratégie d’encadrement que le poète célèbre et que le peintre accuse ».

« Si le tableau, s’interroge Victor Stoichita, représente (selon la suggestion de l’inventaire de la collection Arce), la fable d’Arachné,  comment doit-on comprendre sa façon spécifique de se présenter sous  forme de récit dédoublé ? » « Les réponses ont été variées, mais toutes insatisfaisantes à notre sens, note encore le critique. Nous nous  proposons de reprendre cette interrogation, en tenant compte de la  thématique spécifique du tableau, mais aussi de l’importance des notions  de tissu et de connexion dans la poétique des « compositions ingénieuses ». »

Alors comment peut-on considérer, selon les termes de Victor Stoichita, « Les Fileuses comme le sommet du récit pictural sur le récit ? »  Quelle est la « valeur d’emblème que ce tableau acquiert dans  l’histoire de la circulation et de la transmission des images. »? Quel manipulateur de la représentation a pu être le peintre espagnol Velázquez?

Nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 25 janvier 2018 pour la leçon inaugurale de Victor Stoichita, intitulée « Textes, textures, images ». 

Une fois n’est pas coutume, le format de cette leçon inaugurale nous permet de vous proposer ce rituel de passage, dans son intégralité. Vous allez donc entendre toute de suite les mots d’introduction de l’Administrateur du collège de France, Alain Prochiantz, titulaire de la chaire des processus morphogénétique et de Carlo Ossola titulaire de la chaire de littératures modernes de l’Europe néolatine.

Pour prolonger :

La leçon inaugurale de Victor Stoichita « Les Fileuses de Velázquez. Textes, textures, images » est publiée chez Fayard. 

Parmi ses publications :

L’instauration du Tableau. Métapeinture à l’aube des Temps Modernes (Paris, 1993, nouvelle édition Genève, 1999)

L'Œil mystique : peindre l'extase dans l'Espagne du Siècle d'or, Paris, Le Félin, 2011 

L'Image de L'Autre: Noirs, Juifs, Musulmans et "Gitans" dans l'art occidental des Temps modernes, Paris, 2014

L'Effet Sherlock Holmes. Variations du regard de Manet à Hitchcock, Paris, 2015

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