Comment le bouddhisme arrive-t-il en Chine? Comment marque-t-il après la centralisation et la propagande des Han, une première expression de spiritualité universaliste en Chine?
- Anne Cheng Sinologue, professeure au Collège de France, titulaire de la chaire "Histoire intellectuelle de la Chine"
Anne Cheng, titulaire de la chaire «Histoire intellectuelle de la Chine» questionne cette année ce qu’elle appelle « la prétention chinoise à l’universalité » et toute cette semaine, elle interroge le rapport à la « centralité » et aux marges dans la pensée classique du Pays du Milieu, dans le cadre de sa **série pluri-annuelle intitulée, "Universalité, mondialité, cosmopolitisme - Chine, Japon, Inde ».
**Nous avons découvert comment les Han, poussés par des "considérations géopolitiques" liées aux incursions des peuples nomades barbares, Xiongnu, ont poussé leurs investigations vers l’Asie Centrale, aux confins de l’empire Romain et surtout vers l’Inde. C’est alors la découverte du bouddhisme et de sa spiritualité non violente.
Dans son ouvrage, Histoire de la Pensée Chinoise, Anne Cheng situe les « débuts de l’aventure bouddhique en Chine » :
"Alors que effondrent aux alentours des IIIe et IVe siècles, toute une vision du monde et un système de valeurs forgés pendant les quatre siècles de la dynastie Han et que se réaffirment les aspirations individuelles, le bouddhisme venu de l'Inde apporte une nouvelle façon de concevoir l'existence, bouleversant de fond en comble les perceptions chinoises – processus historique qui aboutira à une assimilation véritable sous les Tang à partir du huitième siècle".
Dans son ouvrage Histoire de la Pensée Chinoise comme dans la série que nous suivons cette semaine, Anne Cheng souligne que c’est "Dès le premier siècle après Jésus-Christ que ce sont manifestés les premiers signes d'une présence bouddhique au Pays du Milieu".
"Il faut rappeler que le bouddhisme fut, avant l'arrivée du christianisme, la première expression d'une spiritualité universelle en même temps que d'une culture étrangère à s’introduire dans une Chine qui venait de se constituer un sens très fort de son identité Han. C'est à la faveur d'un désarroi à la fois physique et moral du monde chinois au lendemain de l'écroulement des Han, suivi de trois siècles de divisions, que le bouddhisme prend un ancrage profond en Chine, intervenant là où la mentalité confucéenne s'est révélée déficiente : par-delà toutes les distinctions hiérarchiques, c'est à tous les hommes que s’adressent le folklore de l'au-delà - paradis ou enfer - de la doctrine du karma qui met tout un chacun à la même enseigne."
Anne Cheng nous présente aujourd'hui l’étonnement des Chinois en Inde, face aux "éléphants montés" pour aller au combat et l’interrogation face à la multiplicité des centres et des royaumes dans ce pays écrasé par une "chaleur étouffante" mais aussi face à ces gens plus faibles, peut-être, moins guerriers, qui pratiquent "la voie du Bouddha"… Ces investigations font aussi l’état des richesses, éléphants, rhinocéros, métaux précieux, songeant aux tributs que peuvent apporter ces lointaines peuplades.
Et nous gagnons l’amphithéâtre du Collège de France, le 26 janvier dernier, pour le cours d’Anne cheng, aujourd’hui « « Vers la sinisation du bouddhisme ? »
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