

Le Secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo en vol vers Ryad et une fouille turque au Consulat saoudien à Istanbul : derniers rebondissements, dix jours après la disparition du journaliste Jamal Khashoggi. Les soupçons envers l'Arabie Saoudite sont au maximum : mais la pression est-elle réelle ?
- Fatiha Dazi-Héni Chercheuse spécialiste des monarchies de la péninsule arabique à l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire (IRSEM)
Au bout de presque deux semaines de déclarations, Donald Trump dépêche Mike Pompeo à Ryad « en urgence ». Ce qui frappe d'abord, c'est le décalage une illustration du décalage entre la multiplication des révélations turques et des pressions verbales sur le pouvoir saoudien, et le piétinement de la situation : Ryad est toujours soupçonné d’avoir couvert, sinon commandité l’exécution de Jamal Khashoggi, niant toujours avoir connaissance de quoi que ce soit…
Les révélations les plus macabres sont troublantes dans le sens où ils disent détenir des cassettes audio et video, ce qui voudrait dire que les services turcs eux-mêmes espionnaient un Consulat étranger ! Et c’est ce qui embarrasse énormément Erdogan. Fatiha Dazi-Héni, politologue
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La reculade de Donald Trump
Donald Trump semble même reculer : lui qui avait menacé les autorités saoudiennes d’un « châtiment sévère » il y a deux jours, déclarait finalement hier que le journaliste pouvait avoir été tué par des « éléments incontrôlés » : Ryad serait donc disculpé.
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Rien n’est clair dans cette affaire, où les fuites à la presse et les déclarations diplomatiques font le récit flou d'une sorte de grande enquête à ciel ouvert : Jamal Khashoggi, un temps proche du pouvoir mais exilé aux Etats-Unis depuis 2017, est un critique de la gouvernance de Mohammed Ben Salmane, mais pas un opposant notoire.
Jamal Khashoggi a été un des premiers à alerter des changements de paradigmes de la monarchie Al Saoud, qui était collégiale jusqu’à l’arrivée du Roi bin Salman. Lorsqu'il a fait en sorte que son fils devienne l’homme fort du pays, celui-ci a concentré tous les pouvoirs entre ses mains. Et on en arrive aujourd’hui aux dérives du règne d’un quasi despote : la moindre critique fait l’objet d’arrestations, d’intimidations, etc. Fatiha Dazi-Héni, politologue
En l'absence de sanctions américaines, le "coût diplomatique" des tensions est principalement économique mais sans doute pas insurmontable : Washington y risquerait un contrat d’armement de 110 milliards de dollars, Ryad pourrait effrayer les investisseurs du prochain forum économique prévu le 23 octobre. Au moins 6 d'entre eux se sont déjà désistés ces derniers jours.
Quant à la latitude que se donne le régime saoudien : le prince héritier avait déjà risqué un coup de force diplomatique en kidnappant le Premier Ministre libanais Saad Hariri l’année dernière. En comparaison aux soupçons de liquidation de Jamal Khashoggi, l'enjeu géopolitique était plus évident, l'atteinte à la personne moins brutale.
Rendre une nation vibrante et solide, comme ce jeune prince veut faire... cette gouvernance despotique-sultanique entre en contradiction avec la volonté de faire du Royaume un pays qui comptera au XXIè siècle. Il faudrait laisser un minimum d’expression à cette société d'entrepreneuriat pour attirer les investissements étrangers... et on voit mal comment les investisseurs vont se ruer là où on se pose des questions telles que : « Est-ce que ce pays a réellement fomenté la disparition de ce journaliste ? » Fatiha Dazi-Héni, politologue
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Cette carte présente les principaux pays amis, également partenaires commerciaux et diplomatiques, du Royaume saoudien :

Fatiha Dazi-Héni @berlinest + IRSEM @IRSEM1
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