Burkina Faso, De la transition à l'élection : une révolution solide ?

Burkina Faso, De la transition à l'élection : une révolution solide ?
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**Qui pourra garantir l'état de droit et lutter contre la corruption ? Mais qui aussi pourra incarner l’insurrection jeune et d’inspiration sankariste ? ** C'est un symbole de la dynamique démocratique en Afrique et c'est un moment important pour le Burkina Faso...

Ce dimanche, cinq Millions et demi d'électeurs devraient aller voter pour élire un président et un parlement…

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Cela fait un peu plus d’un an que le Président Blaise Compaoré, qui avait pris le pouvoir il y a.... 27 ans a démissionné… Sa tentative de révision constitutionnelle pour se maintenir au pouvoir avait échoué devant la société civile et une partie de la classe politique…

Depuis une autorité de transition assure le pouvoir, mais pas sans risque : elle a été temporairement démise par une tentative de coup d'Etat en septembre... Dernier soubresaut de l'ancien régime ?

Il faut noter la grande stabilité des institutions et de la société civile - et leur souci d'intégrité, ce n'est pas rien de le dire : Autorités de Transition, Conseil Constitutionnel, Commission Electorale, Assemblée nationale – qui doit être renouvelée avec 127 sièges à pourvoir...

Transparence et ouverture affichée, 14 candidats se présentent ce week-end, tous sur le thème de la lutte contre le corruption, la prise en compte de la jeunesse, le développement économique...

Un test à plusieurs niveaux pour le Burkina Faso : 1) la mobilisation de la société civile, de la jeunesse, sur fond de référence sankariste - 2) la capacité d'adaptation de la classe politique - 3) le regard des Etats de la région, voire plus pour un pays calme dans une région troublée par le jihadisme notamment...

Xavier Martinet

General Gilbert Diendere awaits Niger's President Mahamadou Issoufou asks to ensure that Pdt Michel Kafando is reinstalled
General Gilbert Diendere awaits Niger's President Mahamadou Issoufou asks to ensure that Pdt Michel Kafando is reinstalled
© Reuters

_...En France , Laurent Bigot est un ancien diplomate, de longue date spécialiste de l’Afrique de l’Ouest. Il a été renvoyé du Quai d’Orsay après avoir publiquement prédit l’effondrement du régime du président Compaoré. Aujourd’hui à la tête du cabinet Gaskiya, il estime que le processus électoral burkinabé excluant des candidats sous prétexte qu’ils ont servi l’ancien régime de Blaise Compaoré constitue la principale erreur d’un processus de transition très critiqué.

En Belgique , le dernier coup d’état de septembre dernier donne l’occasion de revenir sur le destin de l’ancien président Thomas Sankara. Chantre de l'anti-impérialisme occidental, il représente encore aujourd’hui la figure tutélaire du récent "printemps burkinabè". Il avait tenté de mener d'une main de fer le Burkina Faso sur la voie du développement économique, avant d'être assassiné lors d'un précédent coup d'Etat, mené en 1987 par les partisans de… Blaise Compaoré ! Près de trente ans après sa mort, le culte de celui qu'on surnomme "Che Sankara" est encore entretenu à travers toute l'Afrique. C’est d’ailleurs lui qui avait rebaptisé son pays Burkina Faso, le "pays des hommes intègres", en remplacement du nom de Haute-Volta. Vivant chichement avec sa femme et ses deux fils dans un palais présidentiel délabré, il n'avait pour tout bien que sa guitare et sa Renault 5 d'occasion, un véhicule qu'il imposa comme voiture de fonction à tous les membres de son gouvernement, jusque là habitués aux luxueuses berlines.

Au Burkina même, Bernard Zongo, un activiste de la société civile a établi un tableau comparatif pour détailler ce que proposent les candidats à la présidentielle aux Burkinabè de la diaspora. Car le vote des citoyens qui ont quitté le pays, pour trouver du travail dans d’autres pays africains ou en Europe, comptera énormément dans la compétition électorale. Leurs votes sont déterminants.

L’enjeu principal du pays concerne la lutte entre la jeunesse africaine d’une part, bombe à retardement désireuse de changement qui veut avoir sa place dans le champ politique, social et économique, et les satrapes ou "hommes en uniforme" d’autre part, désignés comme étant en connivence avec l’affairisme politique. Cette jeunesse burkinabée, qui se réfère à ses héros, tels que Thomas Sankara, s'informé par le biais des réseaux sociaux et souhaite être un exemple vis-à-vis des « présidents à vie » africains. Elle prouve qu’en Afrique, le jeu politique et économique est devenu largement une lutte des classes d’âge.

Mais le pays est également devenu un enjeu stratégique essentiel dans la lutte contre le terrorisme. Du fait des frontières qu’il partage avec le Nord-Mali, ainsi que par la présence de forces spéciales américaines et françaises, Ouagadougou est le lieu névralgique du renseignement français (opération Sabre, DGSE et renseignement militaire) opérant au sein du dispositif militaire Barkhane.

Le général Diendéré avait déclaré le 17 septembre qu’il libérerait les responsables politiques « otages », qu’il mettrait en œuvre des élections inclusives et qu’il remettrait le pouvoir à des civils. Mais où en est-on, finalement, à ce jour ?

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