La Convention Constituante - 155 personnes élues ce week-end dont la moitié de femmes - a neuf mois pour écrire une nouvelle loi fondamentale débarrassée de l'héritage Pinochet. La droite réalise un score moins important que prévu. Entretien avec l'historien Olivier Compagnon.
- Olivier Compagnon Historien, professeur d’histoire contemporaine à l’Université Sorbonne-Nouvelle et directeur du Centre de recherche et de documentation des Amériques (CNRS/Paris 3)
Les Chiliennes et les Chiliens étaient appelés ce week-end à confirmer dans les urnes cette volonté manifestée avec force (lors des grands rassemblements d’octobre 2019), de reprendre en main une transition inachevée ; de contribuer à ré-écrire ex-nihilo une Constitution, et de jeter aux flammes la loi fondamentale actuelle, écrite sous les armes pendant la dictature du général Pinochet.
Les électeurs pouvaient donc pendant deux jours, élire les 155 membres de l’Assemblée constituante… Constituante dont on sait déjà qu’elle sera paritaire, inclura des représentants de la société civile et des populations autochtones..., mais selon sa composition politique, cette Assemblée pourra plus ou moins répondre aux aspirations du mouvement populaire qui l’a portée.
Il y avait un risque que la droite chilienne, dépositaire intellectuelle de la Constitution de 1980, conserve une minorité de blocage. Ce ne sera pas le cas. Même si on peut tout de suite apporter une nuance : l'un des enseignements de cette élection, c'est la sur-représentation des "indépendants", les candidats qui se sont présentés hors partis. Ces indépendants, on peut avoir le réflexe de les associer à la gauche, mais ce n'est pas nécessairement le cas. Il est donc probable que cette droite très sèchement battue va tenter de négocier des coalitions sur tel ou tel point de la Constitution. En revanche, ce qui est certain, c'est qu'on est bien dans le prolongement du mouvement social de la fin de l'année 2019, où la société chilienne avait demandé des transformations profondes à la fois du modèle de gouvernance et de la Constitution. Olivier Compagnon
Toute la question, c'est ce qu'on va réussir ou non à graver dans le marbre, dans cette nouvelle Constitution. C'est certain qu'il y a des enjeux économiques et sociaux, sur la reprise en main par l'Etat d'un certain nombre de biens communs - en matière éducative, de santé, ou d'accès à l'eau, par exemple. (...) Il y a aussi des enjeux sociétaux, comme le droit à l'avortement. Cette question a été réglée de l'autre côté des Andres, en Argentine, il y a peu. Elle va revenir dans le débat chilien dans des semaines qui viennent. Olivier Compagnon
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