Nicaragua : que reste-t-il de sandiniste chez Daniel Ortega ?

Une bannière à l’effigie du président du Nicaragua Daniel Ortega à Managua, en septembre dernier indique « la paix est le chemin ».
Une bannière à l’effigie du président du Nicaragua Daniel Ortega à Managua, en septembre dernier indique « la paix est le chemin ». ©AFP - OSWALDO RIVAS
Une bannière à l’effigie du président du Nicaragua Daniel Ortega à Managua, en septembre dernier indique « la paix est le chemin ». ©AFP - OSWALDO RIVAS
Une bannière à l’effigie du président du Nicaragua Daniel Ortega à Managua, en septembre dernier indique « la paix est le chemin ». ©AFP - OSWALDO RIVAS
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Ce dimanche, les Nicaraguayens se rendent aux urnes pour des élections présidentielles dont les résultats sont connus d’avance, tant le président Daniel Ortega s’est évertué à réduire toute opposition au silence. À l’aube de son quatrième mandat, reste-t-il quelque chose du sandinisme chez Ortega ?

Avec
  • Maya Collombon Maîtresse de conférences en science politique, en détachement CEMCA (centro de estudios mexicanos y centro americanos) à Mexico

Le Nicaragua, pays d’Amérique centrale qui fut l’un des points chauds de la guerre froide… En 79 quand la révolution sandiniste prit le contrôle de Managua la capitale, les Etats-Unis leur menèrent une guerre souterraine en se servant du Honduras pour entraîner et équiper des mercenaires, les Contras, et les envoyer au Nicaragua renverser les sandinistes. L’affaire fut portée devant la Cour internationale de justice de la Haye qui ordonna à Washington d’arrêter « l’usage illégal de la force » – mais Ronald Reagan ignora la Cour.

Quarante ans plus tard, le président du Nicaragua, en poste à nouveau depuis 2007, est un ancien de cette révolution, il en a porté les idéaux de redistribution des richesses et d’égalité sociale… Mais voilà des années maintenant que ses opposants dénoncent la machine juridique imaginée pour réprimer ce qu’Ortega appelle les « ennemis intérieurs ». La répression des manifestations de 2018 avait fait 328 morts, et l’élection présidentielle de dimanche aura du mal à être « transparente et juste » selon l’ONU.

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Avec Maya Collombon, maîtresse de conférences en science politique, en détachement au CEMCA  (centro de estudios mexicanos y centro americanos) à Mexico.

Il y a aujourd'hui au Nicaragua une rhétorique politique qui utilise le label sandiniste, et dont le projet politique est en fait celui de Daniel Ortega. Donc le sandinisme aujourd'hui, c'est ce que Daniel Ortega en fait. Ca n'était pas le cas dans les années 80. Dans ce projet politique, il y a donc la rhétorique à l'adresse des Nicaraguayens et de la communauté internationale, qui est un projet de gauche, de lutte contre la pauvreté, d'aide sociale, etc. Mais la réalité et les pratiques politiques sont en fait depuis très longtemps différentes. Cette rhétorique politique sandiniste se juxtapose avec des politiques macroéconomiques de type néolibéral qui existent depuis les années 90 et qui ont été poursuivies par le gouvernement de Daniel Ortega pendant toutes les années 2010, et depuis. La croissance économique nicaraguayenne a majoritairement favorisé une élite économique qui s'est constituée autour du Parti sandiniste et des intérêts de Daniel Ortega et de son clan.  Maya Collombon 

Pour la gauche à l'échelle internationale, le Nicaragua a gardé une image qui date des années 80, quand il représentait un symbole de la révolution dans un petit pays d'Amérique centrale. Il me semble que beaucoup ne se sont pas rendu compte de la manière dont le Nicaragua s'est transformé, dont les projets politiques qui sous-tendaient la politique de Daniel Ortega et de sa femme Rosaria Morillo étaient différents, beaucoup plus personnalisés. C'est la répression de 2018 qui a permis à une partie de cette communauté internationale de se rendre compte de la façon dont le Nicaragua avait évolué au cours de ces dernières décennies.  Maya Collombon

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