

Dix ans après l'immolation de Mohamed Bouazizi et sa mort qui embrasa la Tunisie ainsi que l'Egypte, la Syrie, le Yémen..., la transition politique est fastidieuse, la méfiance envers les partis politiques considérable, et la crise sociale, permanente. Entretien avec la doctorante Déborah Perez.
- Déborah Perez Doctorante en sciences politique à Sciences-Po Aix et à l'ENS, spécialiste de la Tunisie et du changement de régime en Tunisie.
Il y a dix ans, un jeune marchand ambulant de Sidi Bouzid dans le centre de la Tunisie retournait contre lui l’allumette qui allait aussi embraser toute la région. La mort de Mohamed Bouazizi déclenchait les printemps arabes et la Tunisie est aujourd’hui le seul pays touché par ce vent nouveau qui ait gardé le cap.
Après le départ du président Ben Ali et de son clan, une transition politique au long cours s’est mise en place, une nouvelle Constitution, un régime parlementaire, plus récemment en septembre un gouvernement de technocrates avec l’intention affichée de sortir des batailles partisanes pour avancer…. Avancer dans un contexte de crise économique et sociale aigüe. Car parmi toutes les raisons qui avaient poussé les Tunisiens dans les rues il y a dix ans, la précarité, la pauvreté, le chômage… n’ont pas disparu.
A lire : l'article du journaliste indépendant Thierry Brésillon sur l' économie de rente en Tunisie.
Les mouvements sociaux ne se sont véritablement jamais arrêtés en Tunisie depuis décembre 2010. Ils ont évolué, ils se sont recomposés, ils ont pris de nouvelles formes. Ils s'enracinent en particulier dans les régions de l'intérieur, c'est-à-dire toute cette Tunisie délaissée, marginalisée, de l'ouest et du sud. Si les premières mobilisations qui ont poussé au départ Ben Ali avaient commencé à Sidi Bouzid, puis à Kasserine, avant de remonter dans le nord du pays, aujourd'hui ces mouvements sociaux prennent une dimension particulièrement importante dans le sud, dans la région de Tataouine. Et ce qu'il est important de souligner, c'est que de la même manière qu'en 2010 ces mouvements sociaux avaient pu remonter jusqu'aux quartiers, jusqu'à la capitale et jusqu'aux grandes villes de la côte, aujourd'hui encore, ces mouvements sociaux sont toujours connectés en phase avec ce qui se passe dans les quartiers périphériques des grandes villes. C'est dans ces quartiers périurbains que vivent une partie des migrants de l'intérieur du pays issus de ces régions marginalisées du sud-ouest. Déborah Pérez
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