On pourrait croire que la santé est un bien naturel dont nos corps seraient plus ou moins dotés, il n’en est rien : la recherche nous montre au contraire qu’il s’agit d’un bien social qui varie selon notre niveau de vie, notre habitat et notre environnement quotidien.
- Virginie Chasles maître de conférences à l’Université Jean Moulin (Lyon III), auteur de « Santé et mondialisation » (2010)
Avec Virginie Chasles, géographe, professeure à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne
Pas de surprises, les inégalités de santé prolongent les inégalités socio-économiques, "voire même les creusent." explique Virginie Chasles. Du fait de l'inégale distribution géographique des facteurs favorables et défavorables à la santé.
Inégalités territoriales
On peut lire ces inégalités à l'échelle régionale. Dans certaines parties du territoire les risques de mortalité sont plus élevés. "Il y a dix ans d'écart d'espérance de vie entre Mayotte et les Yvelines," cite la géographe "dans le département du Nord, l'espérance de vie est de 77 ans quand elle est de 82 ans dans les Pyrénées-Atlantiques."
Encore à plus petite échelle, l'Île-de-France fait état d'un écart d'espérance de vie de près de huit ans pour les hommes du 16ème arrondissement parisien et ceux du canton de Villeneuve-Saint-Georges.
L'accès aux soins
Les déserts médicaux
Il existe des endroits où il est compliqué d'avoir accès aux soins, et les territoires ruraux ne sont pas les seuls concernés : certains espaces urbains le sont aussi. C'est ce qu'on appelle des territoires "en tension médicale" explique la géographe, "l'offre de soins y est insuffisante pour répondre aux besoins des populations."
Certaines études montrent des impacts en "termes de renoncement aux soins et de retard de diagnostic avec des conséquences graves pour certaines pathologies. Par exemple, on a montré que le risque de mortalité en lien avec les AVC est augmenté pour les populations vivant à plus de 50 kilomètres d'une unité hospitalière cérébrovasculaire" ajoute Virginie Chasles.
La téléconsultation, une avancée ?
La télémédecine a des atouts et peut apporter des éléments de réponse. Mais pour la géographe, cela ne suffit pas : "le contact humain reste primordial dans la prise en charge de la santé des populations."
En revanche, la télé-expertise "permet de rétablir un peu de justice socio-spatiale dans les territoires en permettant à tous les patients, quel que soit leur lieu de résidence, de pouvoir bénéficier d'un avis expert pour prendre en charge leur pathologie" affirme Virginie Chasles.
Enjeux environnementaux
Les inégalités de santé s'accentuent dans les zones où la pollution est la plus importante. "D'une part les moins favorisées sont les plus exposées aux dégradations environnementales" et d'autre part ces populations déjà fragilisées sont plus sensibles à la pollution : "un état de santé déjà dégradé est un facteur aggravant et les conséquences sanitaires sont plus importantes" déclare la professeure.
Ces inégalités se retrouvent dans toutes les zones post-industrielles françaises et notamment dans le nord : "l'Observatoire Régional de la Santé dans le nord de la France a révélé l'inégalité d'exposition à la pollution et l'inégalité en termes de proximité vis-à-vis des équipements polluants."
Anticiper les problèmes médicaux
La prévention joue un rôle majeur en santé publique et là encore, l'espace dans lequel on vit engage des comportements plus ou moins bénéfiques.
Grâce au sport
Il est important de réduire les risques pour la santé, en étant dans une démarche préventive : "de ce point de vue l'aménagement du territoire peut être mobilisé de différentes façons. C'est le cas pour les comportements individuels et notamment pour ceux que l'on considère comme étant favorables à la santé."
"On observe que le degré de sédentarisation des populations est influencé par la disponibilité d'espaces qui permettent la pratique d'une activité physique." Il peut aussi être lié aux difficultés pour certains d'adopter un mode de déplacement actif par exemple, "si notre environnement de proximité ne permet pas de se déplacer à vélo ou à pied."
Et à l'alimentation
L'adoption de certains comportements alimentaires favorables à la santé pèse aussi dans la balance les inégalités. L'accès à une alimentation saine nécessite un certain niveau de revenu et d'éducation. Mais c'est aussi "conditionné par la qualité de l'offre alimentaire de proximité. Dans les quartiers par exemple, l'offre alimentaire est de moindre qualité" conclut Virginie Chasles.
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