Bill Gates, des virus informatiques à ceux qui nous tuent

France Culture
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« Quand j’étais enfant, je craignais par-dessus tout la guerre atomique », avez-vous récemment au Süddeutsche Zeitung, « A présent, les plus grands facteurs de risque global sont tout autres. Si quelque chose peut anéantir des dizaines de millions d’êtres humains, c’est la menace des virus bien plus que la guerre. Les principaux ennemis du genre humain ce ne sont pas les armes, mais les microbes. » Et vous déploriez qu’on continue à consacrer des milliards à perfectionner les systèmes d’armes, plutôt que de les employer à prévenir la prochaine épidémie.

La société que vous avez fondée, Microsoft, est à présent aussi riche que certains Etats et la Fondation que vous avez créée avec ces revenus consacre plusieurs dizaines de milliards à lutter contre les maladies dans les pays pauvres. Vous avez ciblé notamment certaines maladies tropicales négligées , comme l’éléphantiasis, réputées non rentables par les laboratoires. Vous avez financé une start-up émanée du MIT qui aurait mis au point une puce contraceptive, efficace sur commande pendant 16 ans. Elle serait disponible dès 2018.

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Excusez-moi, mais le domaine où l’on vous reconnaissait une réelle expertise, c’est celui des virus informatiques . Ils sont redoutables également, mais ne tuent les gens qu’indirectement. Le coronavirus MERS, qui a déjà contaminé 180 personnes en Corée du Sud a fait chuter la croissance dans ce pays à 2 et demi %, mais ce n’est pas de la même gravité qu’Ebola pour l’Afrique occidentale. Il faudra que vous nous expliquiez comment vous êtes passé d’une catégorie de virus à l’autre et quelles similitudes vous voyez entre elles.

Mais une chose est frappante, c’est l’intérêt croissant des grandes firmes issues de la révolution des technologies de la communication pour notre santé . Apple nous promet, avec son application Healthbook, une montre « assistante de santé ». Elle nous informera non seulement sur nos variations de poids, mais sur notre rythme cardiaque, notre tension artérielle, notre degré d’hydratation, que sais-je encore. Facebook a annoncé la création de communautés de malades et de médecins autour de pathologies particulières. Plus fort encore, Google a lancé une entreprise de biotechnologie de pointe, Calico, dirigée par Larry Page en personne, qui vise à rien moins qu’à ajouter plusieurs dizaines d’années à l’espérance de vie ! Dans un premier temps, on nous promet un programme de diagnostique ultra-précoce du cancer…

Cette passion de firmes pour notre santé de firmes dont le cœur de métier n’avait a priori rien à voir avec la médecine ne manque pas d’intriguer. S’agit-il de pure philanthropie ? On sait qu’aux Etats-Unis, il est de tradition, pour les super-riches de contribuer par le mécénat à la recherche, à la culture et au bien-être de leurs concitoyens moins gâtés par le sort ? Ou bien la médecine serait-elle devenue la « nouvelle frontière » des high-techs , celle qui provoquera les avancées technologiques ayant le plus fort **effet d’entraînement ** sur l’ensemble – comme ce fut le cas, paraît-il, des technologies militaires dans les années 50/80s ?