Quiconque a vécu les fantastiques années 80, avec leur formidable désir de vivre, de rattraper le temps perdu, de s’éclater dans les grands paquebots de nuit, se souvient de la manière dont la fête s’est finie. Oh ! le Palace n’a pas fermé en un soir. Il s’est vidé petit à petit, comme si quelque malin génie avait éteint une à une les lumières pour nous refouler un à un, solitaire et égaré, dans la nuit blême. Au début, ce ne fut qu’une rumeur, qu’on s’est empressé de nier. Un « cancer gay » ? allons donc ! Puis, de merveilleux amis ont commencé à manquer les plus belles soirées des disparitions étranges se sont produites. Les rangs se sont clairsemés. On dansait encore, mais le cœur n’y était plus. Ce n’était donc pas « de l’intox » il y avait bien une maladie nouvelle, le Sida, qui n’était pas un « cancer gay », puisqu’il touchait aussi certaines copines.
C’est en France qu’a été isolé pour la première fois le coupable, dès l’année 1983 à l’Institut Pasteur. Un virus, le VIH, a été mis en lumière, ainsi que ses effets terrifiants sur le système immunitaire. Mais reconnaissons qu’il a fallu plusieurs années avant que tant les personnes à risque que les autorités sanitaires saisissent la gravité de ce qui était en train de se passer. Pendant longtemps, nous avons assisté, impuissants, à l’agonie d’amis, désespérés de se voir vieillis prématurément.
Aujourd’hui, trente ans après, où en sommes-nous ? On meurt de moins en moins du Sida, du moins en France. L’infection au VIH est contrôlée, les antirétroviraux ont démontré leur efficacité. Le Sida s’apparente à une maladie chronique comme une autre. Il semble bien que certaines personnes pourraient même se passer complètement de médicaments au bout de quelques temps, si seulement ils avaient été traités très vite après avoir été contaminés. C’est en tous cas ce que révèle l’étude de Visconti : les patients traités contiennent naturellement leur infection. La précocité du traitement est donc une nécessité vitale. La question du dépistage est donc prioritaire. D’autant qu’on estime, en France, à 30 000 le nombre de personnes qui ignorent leur séropositivité et risquent donc de contaminer leurs partenaires. Faudrait-il aller jusqu’à un dépistage systématique de l’ensemble de la population ?
L’alternative, c’est le dépistage à réaliser soi-même, les auto-tests, déjà en vente aux Etats-Unis, et à propos desquels il y a eu, en France, bizarrement, des polémiques. Pouvoir, de manière anonyme, et avec un degré de taux de probabilité très élevé (93 % pour les séropositifs) diagnostiquer sa propre infection, demeure encore la meilleure manière de combattre « l’épidémie cachée ». Le Comité consultatif d’éthique semble s’inquiéter des risques de pression qui pourraient être exercés sur un partenaire. Mais il vient néanmoins de donner son feu vert à la vente en pharmacie de l’auto-test de dépistage. Sachant que ce sont les personnes qui ignorent être porteurs du virus qui sont responsables de la majorité des contaminations, n’y a-t-il pas là le meilleur moyen d’enrayer la progression du VIH ?
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