C’est une réalité qui n’est pas très populaire en France, où l’on aime d’autant moins le marché et la concurrence qu’on jouit d’un statut censé vous en protéger, mais le fait est que, comme il existe un marché international des cerveaux et des talents, il existe désormais un marché mondial de l’enseignement supérieur. Pas seulement parce qu’enseigner, former, développer des compétences et décerner des diplômes peut s’avérer une activité économique hautement lucrative, comme l’ont compris les Etats-Unis, qui en ont fait une branche économique à part entière : les étudiants étrangers qui se ruent sur leurs universités contribuent à leur balance des paiements à hauteur de 21 milliards chaque année.
C’est la raison pour laquelle les classements internationaux – celui de Sanghaï, ou celui du Times Higher Education ont été si mal ressentis. Ils ont apporté la démonstration que nos universités et même nos grandes écoles – à quelques très rares exceptions près – étaient déclassées, dépassées, plus dans la course. Comme toujours, en pareil cas, c’est d’abord le déni qui l’a emporté : nous ne pouvons pas être mauvais, puisque nous sommes par définition les meilleurs. Si nous apparaissions en queue de peloton, c’est que les arbitres étaient partiaux…
La logique de la mondialisation commence à être mise en application par certaines de nos grandes écoles d’ingénieur et de commerce. Elles nouent des partenariats avec des équivalentes étrangères, vont parfois jusqu’à la création de filiales dans les pays émergents, fortement demandeurs de formations spécialisées. Elles comprennent aussi la nécessité d’internationaliser leurs formations former des directeurs du marketing pour des entreprises turques ou polonaises implique un sérieux élargissement de l’horizon culturel.
Mais les universités, elles, demeurent, dans tous les sens du terme, les parents pauvres de cette mondialisation.
C’est, sans doute, comme l’expliquait François Garçon , dans un essai paru l’an dernier (Enquête sur la formation des élites) qu’on leur demande trop de choses à la fois . A elles, la démocratisation de l’enseignement supérieur – l’inscription est libre et quasi-gratuite en comparaison des standards internationaux et la sélection d’une élite le maillage du territoire et en même temps l’accès à la taille critique, ce qui s’avère contradictoire le développement de pôles d’excellence et l’égalité formelle entre établissements enfin, c’est à elles seules qu’incombe la recherche, puisque, à de rares exceptions près, les grandes écoles n’en font pas.
Le think tank réformiste de gauche Terra Nova vient de publier un rapport destiné à alimenter la réflexion des Assises nationales qui s’ouvrent donc demain. Il recommande en particulier d’inverser le mouvement en faveur de l’autonomie, impulsé par le gouvernement précédent, tout en le complétant par une gouvernance interne des établissements fondée sur la collégialité. Car ces acteurs connaissent mieux que Paris s’adapter à leur environnement.
Vous qui avez annoncé 15 mesures pour améliorer l’impact de la recherche sur l’innovation en entreprises , y êtes-vous favorable ? Ou souhaitez-vous revenir sur cette autonomie au nom d’un autre principe, celui de l’égalité entre les universités ?
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