L’écrivaine Hélène Cixous fait sa Masterclasse en public à la BNF, et répond aux questions de Caroline Broué. Elle nous parle de son œuvre de fiction, de son rapport au théâtre, et de l'écriture, qu'elle soit diurne ou nocturne.
- Hélène Cixous Ecrivaine
Jacques Derrida disait d’elle qu’elle est était un "olni", objet littéraire non identifié. Hélène Cixous, écrivaine, universitaire, dramaturge, est auteure d’une œuvre aussi bien littéraire que théâtrale, et d’essais sur la littérature, la philosophie, la psychanalyse, ou encore sur les arts. Du Prénom de Dieu, son premier recueil en 1967, jusqu’à Défions l’augure publié cette année, elle est l’auteure de plus de 70 ouvrages, publiés dans de nombreuses maisons d’édition – longtemps aux éditions Des femmes d’Antoinette Fouque, et depuis presque 20 ans, chez Galilée.
Née en 1937 à Oran, elle est la fille du docteur Georges Cixous né à Oran et mort à Alger alors qu’elle avait 10 ans, et d’Eve Klein, femme juive née en Allemagne, décédée en 2013, très présente dans l’œuvre d’Hélène Cixous. L’écriture vient à elle à la mort de son père, c’est en tout cas un événement qu’elle décrit comme faisant partie de son "mythe personnel".
Mon père c’était l’Algérie, ma mère l’Allemagne. L’Algérie était un pays à l’agonie quand j’étais petite. À 3 ans j’étais déjà à l’intérieur d’une scène d’une grande violence politique. C’est une expérience d’effroi devant les méchancetés humaines, les innombrables espèces de cruauté, de mise à mort de l’autre, de mépris, d’interdit.
J’ai vu d’un côté l’extraordinaire bonheur qui existait dans ma petite famille, un tout petit espace où vivaient, comme dans un paradis, toutes les langues. Et tout autour, l’extérieur, qui était hideux. J’ai alors pensé, dans ma plus petite enfance, qu’il fallait trouver un autre monde.
La joie qui règne dans l’enceinte familiale se heurte à l’environnement extérieur. La littérature lui semble alors être un monde où la beauté et la liberté peuvent exister sans entrave.
J’ai eu besoin d’un refuge. Au sens très fort du mot, je pense que ma façon de me précipiter vers la littérature, c’était un instinct, un instinct de fuite, savoir où l'on pouvait trouver un asile. Je cherchais la beauté et la liberté.
Admiratrice de Joyce, Shakespeare et Montaigne, agrégée d’Anglais et docteure d’Etat, sa thèse a porté sur James Joyce et a été éditée chez Grasset. En 1968 elle contribue à la création de l’université expérimentale de Paris-8 Vincennes, où elle enseignera jusqu’en 2005. Elle a instauré le premier doctorat en études féminines et, depuis 1983, tient un séminaire au Collège international de philosophie. Egalement dramaturge, ses pièces sont mises en scène par Simone Benmussa au théâtre d'Orsay, par Daniel Mesguich au Théâtre de la Ville et par Ariane Mnouchkine au Théâtre du Soleil.
J’ai beaucoup de mal à écrire pour le théâtre. Mais c’est toujours une aventure passionnante. (…) C’est exaltant, c’est un mariage avec le public, alors que quand j’écris des romans, il n’y a pas de public.
Hélène Cixous ne dissocie pas la lecture de l’écriture. "Lire c’est écrire, c’est le premier temps de l’écriture" dit-elle.
Le deuxième temps, c’est l’exercice de l’écriture. Affronter dans l’écriture les contraintes des sujets :
Je me suis mise à écrire ce qu’on ne peut pas écrire. Ecrire ce qu’on ne peut pas écrire, c’est d’ailleurs la chose qu’il faut faire.
Mais aussi écrire dans différentes conditions, en veille comme en rêve :
Pendant la nuit je note très rapidement quelques germes de rêves. Et comme j’écris la nuit, très rapidement, ça donne des choses extrêmement bizarres. Ce sont des œuvres d’une certaine manière ! (…) Et à l’aube, entre le jour et la nuit, je rédige. Et là les chats se transforment en sphinx solidaires, ils m’accordent la demi-heure qu’il me faut pour rédiger le plus rapidement possible un rêve qui est encore palpitant, qui n’est pas encore devenu spectre, vapeur…
Retrouvez la vidéo de la masterclasse ci-dessous :
>>> Pour aller plus loin, une sélection d'Annelise Signoret >>>
Bio-bibliographie sur le site des éditions Galilée (un de ses principaux éditeurs)
Pages consacrées à Hélène Cixous sur le site de l’Université de Stanford (en anglais)
Hélène Cixous, l’écriture comme schibboleth : entretien avec Véronique Bergen, auteur de Hélène Cixous, La langue plus-que-vive (Honoré Champion, 2017)
Quelques questions à Hélène Cixous, posées par Françoise Collin dans la revue féministe, les Cahiers du Grif (n°13, 1976)
Le livre que tu n'écriras pas : Entretien avec Hélène Cixous recueilli par Frédéric-Yves Jeannet en 2005. A lire sur le site littéraire Remue.net
Hélène Cixous : Le récit comme tissage de la vie et de l’écriture, article de Maxime Decout paru dans la revue Itinéraires, 2013-1
Hélène Cixous interroge l’exil à partir de son œuvre et de son expérience biographique. Une rencontre organisée le 16 janvier 2014 par la Maison des Sciences de l'Homme à revoir sur Canal-U
Du théâtre, j'attends tout : Hélène Cixous, essayiste, romancière, dramaturge, collaboratrice de longue date d'Ariane Mnouchkine au Théâtre du Soleil dialogue avec le journaliste Olivier Barrot à la SACD le 2 décembre 2015
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