Allumer le feu en cuisine

Le Shepherd’s Pie, plat préféré de Johnny Hallyday
Le Shepherd’s Pie, plat préféré de Johnny Hallyday - Flickr
Le Shepherd’s Pie, plat préféré de Johnny Hallyday - Flickr
Le Shepherd’s Pie, plat préféré de Johnny Hallyday - Flickr
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A sa manière Jacky Durand, rend hommage, lui aussi, à Johnny Hallyday et à son plat préféré : le Shepherd’s Pie.

Mercredi matin, quelques heures après l'annonce de sa disparition, je suis allé boire mon café dans un bistrot de l'Est parisien. Et vous savez quoi, il était là Johnny, juste à portée de poignée de main, derrière le zinc accroché en noir et blanc à côté de Steve McQueen, d'Edith Piaf et de Michael Jackson. Et là soudain, on a pris comme un retour de baffe, un constat que l'on a fait il y a des siècles : Johnny Hallyday est sans aucun doute l'icône la plus répandue derrière les comptoirs de nos bistrots, de Vierzon à Montbard en passant par Hazebrouck. 

Tenez, dans nos bars kabyles du nord de Paris, il figure toujours en compagnie de Matoub Lounès, le grand chanteur et poète kabyle assassiné en 1998. Si comme nous vous êtes amoureux du décorum des bars-tabac-épicerie-casse-croûte à toute heure, vous aurez sans doute remarqué qu'il y a un autre cliché incontournable à côté du percolateur et de la pompe à bière : c'est cette photo de Léo Ferré, de Jacques Brel et de Georges Brassens en train de tailler une bavette. Une rencontre immortalisée par le photographe Jean-Pierre Leloir, le 6 janvier 1969. Mauvaise langue que l'on est, on s'est souvent demandé si cette photo n'était pas donnée en cadeau par les marchands de limonade et de café

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Pour en revenir à Johnny Hallyday, il est de tous les looks sur les murs des licences IV : en cuir façon Mad Max, en yé-yé dépoitraillé ou encore en motard cow-boy de la mythique route 66 traversant les Etats-Unis.

Il y en a pour tous les goûts du taulier du lieu, cœur d'artichaut, ours rugueux, midinette enflammée avec toujours un dénominateur commun : on ne transige pas sur Johnny, ceux qui ne l'aiment pas sont priés de terminer leur verre et d'aller boire ailleurs.

Mais plus encore que son effigie, c'est la voix du chanteur qui imprègne nos années bistrot. « On a tous quelque chose de Johnny », quelque part accoudé à un zinc désert ou serré comme des sardines sur une banquette en moleskine. On l'a entendu rugir au fin fond de la Haute-Marne dans un routier de campagne avec véranda et géraniums d'hiver et vue sur le bitume. On a vu des mômes reprendre comme une seule flamme son « Chant des partisans » dans un bar bondé. 

En soixante ans de carrière, Johnny Hallyday a assiégé tous les juke-box, les chaînes Hifi, les MP3 qui ont fait chanter et danser dans les rades de France. Il a été le compagnon du demi de bière solitaire, de la tribu des diabolo menthe, des saucisses frites et du petit crème de dix heures. Il a allumé le feu sous les verres de bourbon, a anticipé nos gueules de bois avec sa « gueule », teinté la mélancolie d'un Picon bière avec « J'ai oublié de vivre » . 

Depuis le temps que l'on se répète que « les cimetières sont peuplés de gens irremplaçables », on n'a toujours pas réussi à faire reculer cette grosse colère qui nous assaille quand ils disparaissent. Johnny parti, même si sa photo demeure au dessus du bar, il manquera toujours au comptoir.

Mais très peu pour nous d'aller aujourd'hui sur les Champs-Elysées. L'hommage est pour nous un plat qui se mitonne en solitaire. 

Tiens Johnny, on aurait bien aimé lui concocter un de ses plats préférés qu'il racontait dans Libération en 2011 : le Shepherd’s Pie. « Un hachis Parmentier anglais avec des oignons, des carottes et du tabasco. Ma femme le fait très bien. Elle cuisine admirablement. Sans gras », disait-il dans Libération. Vous savez quoi, le hachis parmentier, façon british ou pas, c'est bien l'un de ces petits onguents gustatifs contre la morsure des mauvais jours. Y en a qui appellent ça les aliments doudous et, encore plus académiquement branché, la «comfort food». Nous, on en pince ainsi pour le riz au lait qui, de six heures du matin à minuit, nous réconcilie avec l’ordinaire. C’est une petite mélodie sucrée de la gourmandise dont on ne se lasse pas.

La recette

Pour en revenir au hachis parmentier, on aime beaucoup la recette du boucher parisien Hugo Desnoyer. Dans son hachis parmentier il met majoritairement du panais et un peu de pommes de terre qu'il cuit à l'eau bouillante salée. Il en fait une purée à laquelle il ajoute du beurre et de la crème fraîche. Il fait revenir avec oignon et échalote de la viande d'agneau coupée en petites cubes qu'il répartit ensuite dans un plat à gratin. Il recouvre de la purée et saupoudre de chapelure et enfourne une demi-heure à 180 degrés. Dans ce plat, c'est la douceur des panais qui met en valeur la viande d'agneau. A déguster avec une salade de mâche.