L’ortie, qui s’y frotte s’en régale

L'ortie, une bien bonne mauvaise herbe.
L'ortie, une bien bonne mauvaise herbe.  ©Maxppp - Zenshui 81
L'ortie, une bien bonne mauvaise herbe. ©Maxppp - Zenshui 81
L'ortie, une bien bonne mauvaise herbe. ©Maxppp - Zenshui 81
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Eloge d’une soupe gourmande avec la plus vertueuse des mauvaises herbes.

Oui, Caroline, qui s’y frotte s’y pique. Je veux bien sûr parler de l’ortie. Je crois qu’après 55 jours de confinement sous les toits parisiens, j’aurais été capable de me rouler dans une haie vive tellement je ne pouvais plus voir en peinture le papier peint de mon perchoir.

Je sais, vous allez me dire, « ah oui la soupe à l’ortie, ce truc modeux et bobo, ce mirage culinaire pour urbains en mal de campagne ». Ce n’est pas tout à fait faux. Mais, moi, si j’ai choisi de vous parler ce matin de la grande famille des urticacées, c’est qu’elle pousse partout. Entre deux failles de bitume en ville, sur le bord des talus des routes comme dans une clairière de forêt profonde. 

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L’ortie, elle se fout de la carte de France en vert et en rouge, de la règle des 100 kilomètres pour se déplacer autour de chez soi. Elle est toujours à portée de main pour vous chatouiller. Il faut dire que ses rhizomes, qui sont ses tiges souterraines, lui permettent de se faufiler dans les endroits les plus délirants et de faire la nique à la faucille et à la tondeuse. Il paraît même qu’elle fait enrager les adeptes de ces poisons que sont les désherbants systémiques.

Pourtant, on n’a pas été toujours aussi méchant avec l’ortie. La légende familiale veut que mon arrière-grand-mère se frottait le dos avec ses feuilles quand « elle avait mal aux reins » comme elle disait. Cette incitation à l’autoflagellation remonte à loin puisque l’on raconte que les légionnaires romains se fouettaient à l’ortie pour soulager leurs jambes fatiguées et apaiser leurs douleurs articulaires. On prête aussi à l’ortie une foultitude d’autres propriétés. Dans l’Antiquité, Hippocrate évoquait 61 remèdes à base d’ortie pour soigner la goutte, la calvitie ou encore lutter contre les douleurs dentaires. Si l’ortie vous titille, allez donc sur l’Internet consulter la passionnante thèse de docteur en pharmacie de Julien Delahaye. Il y cite notamment la prestigieuse école de médecine de Salerne, qui au Moyen-Âge, célébrait ainsi l’ortie : « Ce qui rend un malade maigre, C’est quand il ne dort aisément ; L’ortie apaise son tourment, Empêche aussi qu’il ne vomisse, Mieux que ne ferait la Réglisse. Sa graine jointe avec le miel Des coliques chasse le fiel ». Julien Delahaye raconte aussi que dans la mythologie germanique, on prêtait à l’ortie le pouvoir d’éloigner la foudre. Un proverbe, tantôt serbe, tantôt hongrois dit que la « foudre ne frappe pas l’ortie », en référence à l’impunité des méchants.

La recette de la soupe d'orties

Je vous propose la recette du passionnant « Cueillettes sauvages en Auvergne-Limousin-Quercy, glaner 60 plantes et fruits ». C’est aux éditions Artémis. 

  • Cueillez avec des gants 4 à 5 grosses poignées d’ortie, si possible, à l’écart des talus pollués et des friches industrielles qui peuvent receler des métaux lourds. 
  • Lavez-les soigneusement pour en retirer le pouvoir urticant. Otez les tiges. 
  • Dans une cocotte, versez 3 cuillères à soupe d’huile d’arachide et faites revenir un oignon émincé. Ajoutez cinq pommes de terre taillées en petits cubes, puis les feuilles d’orties.
  • Couvrez d’eau, salez et poivrez, puis portez à ébullition et laissez cuire trente minutes. 
  • Mixez, puis portez à nouveau sur le feu en ajoutant 15 cl de crème fraîche. Servez sans attendre

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