Cultivez l’indiscipline et l’imagination aux fourneaux avec les épices du quotidien.
Ce matin, vous nous parlez de votre instrument fétiche en cuisine
Entre mon poivrier et moi, c’est une très vieille histoire. Tout môme déjà, je faisais des gammes avec ce moulin en bois patiné par le temps. D’abord une pincée sur les œufs au jambon du dimanche matin. Puis une franche rasade sur le lapin que l’on apprenait à fricasser dans la cocotte. Et aussi quelques tours sur les tranches d’une tomate du jardin toute chaude de l’été.
J’ai hésité sur le nombre de tours du moulin quand il a fallu assaisonner mes premières terrines. J’ai découvert le bonheur d’un autre tour sur du fromage. Essayez donc sur un morceau de morbier ou de fourme de Montbrison. Vous verrez…
Mais le top du top, reste le poivre noir sur le bifteck du samedi. Trois tours juste au sortir de la poêle que l’on déglace avec un trait d’eau chaude pour faire ce jus divin que l’on éponge avec de la baguette fraîche. Et surtout, surtout, il faut toujours se souvenir qu’il n’y a de vrai poivre que fraîchement moulu ; que le poivre en poudre est un rogaton de cantine d’autoroute et qu’il est aussi stupide de vouloir mélanger différentes sortes de poivres qu’un rosé de Provence avec un riesling.
Il y a beaucoup de sortes de poivres ?
Je pourrais vous parler du poivre Timiz qui pousse à l’état sauvage dans les forêts éthiopiennes, entre 650 et 2250 mètres d’altitude. Du poivre noir de Kampot qui provient du Cambodge. Du poivre Cubèbe ou « poivre à queue » récolté sur l’île de Java en Indonésie.
Du poivre de Kerala qui pousse sur la côte de Malabar, au Sud de l’Inde. Voyez-vous Caroline, les poivres sont pluriels, foisonnants, enivrants, piquants, brûlants et il y a de quoi donner le tournis à votre moulin mais surtout ils sont une très belle invitation à vous autoriser toutes les libertés en cuisiner.
C’est tout le sens du dernier livre d’Elisabeth Scotto Du shiso dans la crème anglaise publié aux éditions de l’Epure. Journaliste et auteure, Elisabeth Scotto est une grande signature de la littérature culinaire. Elle a été Madame Fiches cuisine du magazine Elle, une vraie institution pour qui aime se mettre aux fourneaux. Régalez-vous en allant sur son blog où elle explique son goût pour les épices qui réveillent un plat ronronnant ; les aliments et les ustensiles découverts tout près de chez elle ou au bout du monde. Bref : elle aime "s’amuser avec la nourriture !", dit-elle.
Elisabeth Scotto milite pour l’indiscipline aux fourneaux dans son dernier livre. Elle veut sortir le poivre du train-train du quotidien. Comme d’autres ingrédients tels la vanille, le cumin, la cannelle, la citronnelle, le safran, le sumac. "Libérons-les !" proclame-t-elle.
Pour choisir un poivre, elle conseille d’en croquer un grain ou mieux d’en prendre deux ou trois que vous introduirez avec parcimonie dans votre cuisine quotidienne.
Recette d'Elisabeth Scotto du "poisson citronné, crème fouettée poivrée".
Il vous faut quatre filets de poissons, du bar, de la dorade… ; 2 cuillères à soupe de jus de citron vert ; 4 cuillères à soupe d’huile d’olive goût intense ; 150 grammes de crème liquide très froide ; du sel et du poivre du moulin.
Coupez le poisson en tranches très fines. Arrosez-les de jus de citron et laissez mariner trente minutes au frigo. Epongez-les et répartissez-les sur quatre assiettes. Ajoutez quelques tours de moulin à poivre et nappez d’huile d’olive. Fouettez la crème fraîche jusqu’à ce qu’elle soit ferme, en ajoutant du poivre du moulin à volonté. Répartissez la crème fouettée en gros flocons dans chaque assiette et servez aussitôt. "De l’huile d’olive et de la crème ! Oui, et ça marche très bien ensemble !", conclut Elisabeth Scotto.
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