Aujourd’hui, on rêve dans la soupière.
Je dois vous faire un aveu : j’aime la soupe mais je préfère encore davantage la faire. Car la soupe, c’est ma songerie du matin quand je vais au marché et que je divague entre les navets boule d’or, les carottes, les choux, les poireaux, les patates, les blettes et j’en passe.
Il y a dans la soupe une sorte de sincérité avec l’ingrédient, avec son origine, sa saisonnalité. Et ça doit faire un bail que cela dure, j’imagine depuis que l’homme a compris que quelques légumes, quelques plantes cuits dans un peu de flotte pouvaient nourrir, réconforter, rassembler. Qui plus est, la soupe est un faitout de tolérance qui accueille à la fortune du pot tous les ingrédients comestibles : la carcasse du poulet qui fera un fameux bouillon, le bouquet de thym qui embaumera la soupière ; les épices qui font voyager.
La soupe est de toutes les latitudes tout autour de la terre : bortsch russe ; phô vietnamien ; minestrone italien ; harira marocaine ; miso japonais ; corn chowder américaine sans compter la soupe de tripes des Balkans et de Turquie censée soigner la gueule de bois.
Oui et depuis des temps anciens comme le raconte Jean Vitaux dans son « Bouquin de la gastronomie ». C’est aux éditions Robert Laffont. Il cite notamment le « bouillon de Vipères pour purifier la Masse du sang », de Vincent La Chapelle publié dans « Le cuisinier moderne » en 1735. Allez, je vous donne la recette pour la bonne bouche à l’heure du petit-déjeuner :
« Prenez un poulet et le dégraisser, de la pimprenelle, de la chicorée, du cerfeuil et de la laitue, de chacune une poignée, bien épluchées, lavées et coupées menu ; ajoutez-y une vipère écorchée vive que vous couperez par morceaux, après lui avoir ôté la tête, la queue, et les entrailles ne réservant que le corps, le cœur et le foie ; faites bouillir dans trois chopines d’eau réduites à trois demi-setiers : ôtez-le du feu. Passez-le par une étamine, et le partager en deux bouillons, pour en prendre un tous les matins à jeun.
On en continuera l’usage, pendant quinze jours, en se purgeant devant et après la quinzaine : au lieu des herbes rafraîchissantes, on se servira d’un demi-gros d’herbes vulnéraires de Suisse, assorties, lorsqu’il s’agira de purifier plus puissamment la Masse du Sang. »
Rassurez-vous, je ne vais pas vous imposer ce démoniaque brouet sur le site de France Culture mais une soupe aux pois chiches à la provençale que je vais préparer en savourant « Le cœur du monde » de Bernard Lavilliers tiré de son dernier album « Sous un soleil énorme ».
La soupe aux pois chiches à la provençale
Cette recette est tirée de « Minestrones et soupes du monastère » de Frère Victor-Antoine d’Avila-Latourrette (ed. Marabout, 2012, 15,90 euros).
Pour six portions, il vous faut :
- 400 g de pois chiches secs ;
- 12 cl d’huile d’olive ;
- 1,5 cl d’eau ;
- 4 blancs de poireaux, émincés ;
- 225 g d’épinards, hachés ;
- 4 gousses d’ail, hachées ;
- 4 cuillères à soupe d’herbes de Provence (thym, romarin, origan, marjolaine et feuille de laurier) ;
- 1 cuillère à café de beurre ;
- des croûtons frits ;
- du sel et du poivre du moulin.
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