

Un amendement propose d'interdire les vols intérieurs substituables par un trajet en train. Il s'inscrit dans le phénomène plus large de "flygskam" ou " honte de prendre l'avion", qui tend à se développer chez un nombre croissant de consommateurs, soucieux de réduire leur empreinte écologique.
Une proposition déposée par le député Insoumis François Ruffin et la présidente de Génération Ecologie, Delphine Batho, dans le cadre de la loi d’orientation sur les mobilités, actuellement en examen au Parlement vise ainsi à réduire les pollutions liées à l’aviation en « supprimant les liaisons aériennes intérieures pouvant être réalisées par transport ferroviaire en une durée inférieure ou égale à cinq heures ».
Leur logique est donc assez simple : arrêter de prendre l’avion pour faire un Paris-Bordeaux ou un Paris-Lyon, quand l’option ferrée est presque aussi rapide. En l'occurrence, une heure d’avion pour rejoindre la capitale de la Gironde, contre un peu plus de deux heures pour le train à grande vitesse. Mais c’est sans compter le temps de déplacement vers les aéroports bien souvent excentrés, qui mettent alors presque à égalité l’avion et le TGV.
Or si la grande vitesse a permis d’abolir les distances et de mettre un certain nombre de grande ville à quelques heures de la capitale, le trafic aérien n’a cessé -quant à lui- de se développer vers ces mêmes destinations. Il a notamment été porté par le prix souvent plus faible des vols qui ne sont, rappelons-le, toujours pas taxés sur le kérosène
Le problème c’est que l’empreinte carbone de ces court-courriers est loin d’être la même que celle de la voie ferrée. Comme le pointe la direction de l’aviation civile, un trajet Paris-Bordeaux en train émet ainsi 1,4kg de CO2 par passager, contre 72kg pour le même voyage en avion. Soit une consommation 52 fois plus importante, que les deux députés entendent limiter autant que possible. D’après France Info, ce serait ainsi 72 vols quotidiens qui pourraient être supprimés avec l’adoption de l’amendement.
Mais il semblerait que cette prise de conscience dépasse largement les bancs de notre hémicycle. Les députés français se sont ainsi appuyés sur l’expérience néerlandaise, où les députés verts de Groenlink ont réussi à former une coalition pour interdire les vols Bruxelles-Amsterdam, qu’à peine 200 km séparent.
Comme l’explique le ministre néerlandais des chemins de fer, l’objectif est d'inciter les passagers à prendre le train, qui doit redevenir une alternative attrayante et simple à l’avion.
Mais au-delà de ces initiatives parlementaires, on a également vu émerger des initiatives citoyennes pour alerter quant au rôle néfaste de l’avion sur l’environnement. On a notamment vu fleurir, ces derniers temps, un terme aux consonances nordiques, le « flygskam », qui vise à rendre compte de la défiance montante de certains citoyens envers le transport aérien.
Signifiant littéralement « honte de prendre l’avion », ce phénomène parti de Suède tend à se développer chez un nombre croissant de consommateurs, soucieux de réduire leur empreinte écologique. Le gestionnaire d’aéroports Swedavia a ainsi enregistré une chute de près de 6% des vols domestiques en Suède. Et le phénomène ne cesse de s’amplifier.
Le sujet a même été au coeur du dernier congrès de l’Association internationale du transport aérien, qui se tenait à Séoul du 1er au 3 juin dernier. Le président de l’association, l‘ancien président d’Air France, Alexandre de Juniac, s’est d’ailleurs dit inquiet du climat actuel, arguant des efforts déjà mis en œuvre par le secteur pour réduire ses émissions de CO2 et mettant en garde contre les dangers d’une telle évolution pour les emplois liés à l’aviation : soit plus 100 000 emplois directs.
Un risque dont les porteurs de l’amendement sur les vols intérieurs sont bien conscients. Comme le rappelle Delphine Batho : « nous savons que la sortie des énergies fossiles aura des conséquences pour l’emploi ». Il s’agit donc de les anticiper pour que cette transition se fasse le plus sereinement possible.
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