L'épopée Pullman

La locomotive Union Pacific Steam, tirant des wagons Pullman en 1920
La locomotive Union Pacific Steam, tirant des wagons Pullman en 1920 ©AFP - ANN RONAN PICTURE LIBRARY / PHOTO12
La locomotive Union Pacific Steam, tirant des wagons Pullman en 1920 ©AFP - ANN RONAN PICTURE LIBRARY / PHOTO12
La locomotive Union Pacific Steam, tirant des wagons Pullman en 1920 ©AFP - ANN RONAN PICTURE LIBRARY / PHOTO12
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Au milieu du XIXe siècle, l'ingénieur américain George Pullman invente les wagons lits. En mauvaise passe à son lancement, c'est la mort du président Abraham Lincoln qui donne un second souffle à cet ambitieux projet.

George Pullman commence sa carrière en reprenant le business paternel, qui consiste à déplacer des immeubles entiers, par exemple pour la construction d’un canal ou la réfection des égouts d’une ville. 

Il se rend d’ailleurs célèbre en 1861 en déplaçant sur vérin le Tremont House à Chicago, un hôtel de six étages en brique, dont il déclara aux journaux qu’il fut déplacé sans qu’aucun client n’ait eu à quitter sa chambre. 

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Pullman se rend rapidement compte que le marché du déplacement d’immeuble n’est pas illimité et décide alors de se lancer dans la fabrication de wagons de grand standing. Pour ses affaires, il passe en effet la majorité de son temps en train, mais il est exaspéré par le manque de confort et les cahots incessants qui l’empêchent de travailler et de se reposer.

Nous sommes au milieu du XIXe siècle et le chemin de fer est alors en pleine expansion aux Etats-Unis. Mais il est presque uniquement destiné au transport de marchandises. Les rares offres pour les passagers sont très inconfortables : c’est à cela que Pullman veut remédier. 

Un entrepreneur à la Schumpeter

George Pullman constate une insuffisance sur le marché et se fait fort de la rectifier. Il va pour cela recourir à un certain nombre d’innovations, qui seront concentrées dans un prototype, appelé Pioneer, et qui offrira par exemple un cabinet de toilette avec eau courante, et des banquettes qui se transforment en couchettes. Inutile de préciser que la décoration est également des plus raffinées. 

Seulement, problème: pour créer ces véritables salons roulants Pullman est obligé de construire des wagons plus grands, plus larges et plus lourds que la moyenne. Mais le système de rail lui ne change pas. Autant dire que ses Pionnières, aussi luxueuses soient-elles, sont condamnées à l’arrêt. 

La mort de Lincoln. La naissance de la Pullman Company

C’est l’assassinat du président des Etats-Unis, Abraham Lincoln, qui va relancer cet ambitieux projet de trains-couchettes.  C’est en effet le luxueux wagon de George Pullman qui est choisi pour conduire le 16e président des Etats-Unis en sa dernière demeure. Celui-ci ne peut pas rouler sur le réseau existant. Qu’à cela ne tienne : rien n’est trop beau pour le président-héros: l’espacement des voies est entièrement refait de Washington jusqu’à Springfield.

On assiste alors à la plus grande opération de communication jamais vue. Au cours des 2 700 kilomètres qui relient la capitale à la ville natale du Président, ce sont plus de 7 millions de personnes qui se pressent pour voir la dépouille du Président… et autant de badauds qui admirent la beauté du train. Au cours du voyage retour, il invite en effet tous ceux qui le souhaitent à monter à bord du wagon Pioneer, pour en apprécier le luxe et le raffinement.

Suite à cette fantastique publicité, Georges Pullman lance sa propre entreprise, la Pullman Palace Car Company, qui connaît une forte croissance jusqu’à son âge d’or dans les années 1920, où la flotte Pullmann compte près de 10 000 voitures. 

Un capitaine d'industrie sensible aux utopies sociales du XIXe siècke

L’entreprise est si florissante que George Pullman construit même au début des années 1880 une ville portant son nom en Illinois. Inaugurée en 1881, il se s’agit pas d’une simple municipalité : elle se veut une solution à la pauvreté et à l’agitation ouvrière. La ville se veut un havre de paix… et de contrôle social. 

Des critiques se font rapidement entendre sur le caractère paternaliste et omnipotent du maître de lieux, qui veille sur le bien-être de ses ouvriers, tout en encadrant fermement les pratiques sociales. George Pullman interdit ainsi les journaux indépendants et les réunions publiques. Ses inspecteurs pénètrent dans les foyers pour vérifier la propreté des locataires et les maisons sont différenciées en fonction du statut social de ses occupants.

Une ascension fulgurante. Un président américain et un capitaine d’industrie paternaliste. Ou comment faire du train, le véhicule des plus folles aventures...

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