L'espace, une décharge à ciel ouvert

Débris spatiaux
Débris spatiaux - ESA
Débris spatiaux - ESA
Débris spatiaux - ESA
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Loin de se contenter de polluer la Terre, l'homme a réussi à faire de l'espace une immense décharge au dessus de nos têtes. Des milliers de particules et de débris dérivent ainsi à des milliers de km/h, slalomant entre satellites et autres engins humains.

Cet été, vous vous êtes peut-être allongés dans l’herbe, sur une couverture, pour regarder les cieux, admirer ces lumières qui nous viennent de l’espace. Mais alors que vous vous exclamiez devant la majestueuse traînée d’une comète, ce que vous ne saviez pas, c’est qu’il s’agissait en réalité d’un débris lointain, pénétrant notre atmosphère dans une volute de flammes. 

Ce sont ainsi des millions de déchets de toute taille, qui flottent à 36 000 kilomètres de la terre. “L’océan d’en haut”, comme l’appelait Victor Hugo, est en passe de devenir aussi pollué que notre bonne vieille planète bleue. 5 000 objets mesurant plus d’un mètre, 20 000 de 10 cm et plus, 150 millions de fragments de quelques millimètres. Une myriade  de déchets qui dérivent à plus de 40 000 km/h à une proximité dangereuse de nos satellites et autres engins spatiaux. 

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Des millions de débris à la dérive

Il semblerait que l’homme ait toujours un temps de retard pour savoir ce qui est déchet et ce qui ne l’est pas. Il s’est ainsi déversé pendant plus d’un quart de siècle sur l’une des dernières zones encore épargnée par son activité. Le temps pour l’homme de se retourner et de contempler son action, il trouve déjà derrière lui une trace indélébile de son activité. 

Ainsi, il y a vingt ans, on voulait croire à la disparition graduelle de ces déchets, inexorablement attirés par la Terre et brûlés par le feu de l’atmosphère. Le problème c’est qu’un tel phénomène prendrait jusqu’à trente ans pour se produire naturellement. Or on ne cesse d’envoyer des engins dans l’espace qui, abandonnés en fin de vie, ou percutés par d’autres débris ne font qu’augmenter le nombre de ces déchets flottants. C’est ce que l’on appelle l’effet Kessler : les nouveaux objets issus des collisions produisent eux-mêmes de nouvelles collisions et ainsi de suite.

En 2007, la Chine a sciemment détruit l’un de ses satellites météo en fin de vie à l’aide d’un missile, créant instantanément plus de 2000 débris dans l’espace. Deux ans plus tard la collision accidentelle d’Iridium 33, satellite américain de télécommunications et de Cosmos 2251, vieux satellite militaire de l’ère soviétique a généré plus de 3000 débris catalogués. 

Une menace pour les satellites 

Car cette nuée de déchets est loin de dériver paisiblement. Propulsés à toute vitesse par la collision qui les a créés, ces débris sillonnent l’espace à plusieurs dizaines de milliers de kilomètres par heure. Comme l’explique Holger Krag, responsable des débris spatiaux à l’Agence Spatiale Européenne, “l’énergie contenue dans une particule d’un centimètre de diamètre frappant un satellite à une telle vitesse, correspond à peu près à celle dégagée par l’explosion d’une grenade”. 

On imagine à peine les dommages que pourraient causer des particules de plus grosse taille s’ils entraient en contact avec un satellite ou même avec la station spatiale internationale. Station qui doit ainsi effectuer huit à dix manoeuvres, très coûteuses, par an, afin d’éviter la collision avec des débris spatiaux. Pour se donner une idée de la violence d’une telle collision, on peut penser à la scène apocalyptique du film Gravity, où l’explosion d’un satellite entraîne un déchaînement d’objets de toute taille, lancés dans un espace sans frottement ni gravité. 

Le risque étant qu’une de ces tempêtes de déchets stellaires ne viennent endommager l’un des nombreux satellites qui permettent de maintenir rien de moins que l’internet et la téléphonie mondiale. 

Des bulles d'atmosphère pour détruire les déchets de l'espace

La science fiction vient se frôler au réel pour établir des méthodes de nettoyage du grand vide. Certains travaillent ainsi à un “robot-poubelle” capable de se saisir de débris pour les rapatrier vers une atmosphère plus basse, voire vers la Terre. Mais il est bien plus difficile d’attraper des débris en mouvement dans l’espace. De nombreux chercheurs travaillent donc à la possibilité d’influer sur leur course sans avoir à les toucher. 

Parmi ces idées visant à débarrasser l’espace de ses déchets, on pourra relever celle consistant à faire monter dans les cieux des grosses bulles d’air. On les ferait alors éclater au milieu des débris, les faisant sortir de leur orbite, pour foncer se désintégrer vers notre atmosphère. En dépit de son caractère particulièrement poétique, cette option n’est cependant pas la plus crédible.

Aujourd’hui, la méthode la plus réaliste pour se débarrasser des déchets de l’espace, consisterait à les bombarder de puissantes charges électriques à l’aide de canons à ions pour dévier leur orbite et les plonger vers la terre. Et pour financer tout cela, on envisage la création d’une taxe pollueur-payeur, le signe avant coureur que l’espace est déjà un marché comme les autres.

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