

Suite aux annonces du président Macron pour répondre à la colère des gilets jaunes, nombre de médias et commentateurs pointent le risque pour la France de voir son déficit déraper. Une indignation à deux vitesses qui traduit le pouvoir politique des détenteurs de la dette.
Nous parlions hier de la réaction des marchés aux choix politiques du gouvernement italien, eh bien en France, la réaction des médias ne s’est pas non plus fait attendre, suite aux déclarations d'Emmanuel Macron
Cette série d’annonce visant à améliorer le quotidien des Français les plus précaires serait vu comme un aveu de faiblesse de la part du président Macron. Elle agirait comme le révélateur de la nature profonde du peuple et de l’économie française : toujours enclins aux joies de la dépense et du déficit.
Il y aurait ainsi une banalisation, une perte de crédibilité de la France sur la scène internationale. La France est désormais renvoyée à son statut d’État-membre du Club Med, aux côté de l’Italie, de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce. Cette expression d’une redoutable violence politique et symbolique vise ainsi à qualifier les Etats du sud de l’Europe comme de sympathiques fainéants vivant au crochet de leurs voisins du Nord, sérieux et travailleurs.
C’est le quotidien allemand, Die Welt, qui a ouvert le bal, expliquant que la France devenait la nouvelle Italie et faisait désormais courir un risque à la monnaie unique. Rapidement relayé par les médias français, le journal conservateur s’en est pris à l’irresponsabilité du président français expliquant, je cite, que sa « réaction à la foule en jaune devait déclencher la sonnette d’alarme à Berlin » et d’ajouter, « Emmanuel Macron n’est plus un partenaire pour sauver la zone euro mais un facteur de risque ».
Retour à la case départ donc pour le président français qui s’était pourtant efforcé de jouer au bon élève en présentant un déficit consciencieusement en dessous des fatidiques 3% .
Une indignation des marchés pourtant sélective. On s'aperçoit avec cette attaque en règle de la presse et des commentateurs libéraux que toutes ces dépenses n’ont pas la même valeur : partout des cris d’orfraie se font entendre, s’alarmant de la perte de crédibilité du président Macron, à mesure qu’il s’éloigne de la trajectoire de déficits annoncée.
Or on n’entendait pas ces pythies de l’endettement se manifester lorsque le gouvernement décidait de raboter l’ISF, de supprimer l’impôt sur les dividendes ou encore d’effacer l’exit tax. Ni quand le gouvernement précédent mettait en place le très coûteux mécanisme du CICE, censé relancer la machine économique et dont on attend toujours les résultats.
On rappelera que les mesures annoncées par Macron pour répondre à la colère sociale sont estimées entre 8 et 10 milliards d’euros. Contre près de 12 milliards pour le paquet d’aides fiscales accordées aux plus riches et plus de 45 milliards pour le CICE!
Ce n’est donc pas seulement le coût économique des mesures qui entre en compte. Pas plus que leur efficacité économique au demeurant. Ce qui est jugé en réalité c’est leur attrait pour une catégorie d’individus, investisseurs ou épargnants, connaissant bien leurs intérêts et les moyens de les protéger.
A cet égard, le déficit et la dette apparaissent comme des objets profondément politiques. Car au-delà de ces attaques médiatiques, révélatrices mais néanmoins anecdotiques, c’est la question du traitement réservé à la dette française par les marchés qui est en jeu. Les agents économiques, en choisissant de détenir ou non une partie de cette dette formulent un jugement, une sanction envers les politiques du pays.
En achetant des obligations d’État, ces agents économiques deviennent pour ainsi dire « actionnaires » de cet État et pèsent sur l’élaboration des politiques publiques. Pour un peu que celles-ci ne servent plus l’intérêt des riches épargnants, ils n’auraient alors aucun mal à aller investir dans une valeur plus sûre, en Allemagne ou ailleurs.
Cette mise en concurrence des pays, qui se se traduit par la différence des taux d’intérêt de la dette, débouche inéluctablement sur une compétition au moins disant sociale, une politique uniforme favorisant exclusivement ces riches épargnants, susceptibles d’être intéressé par le rachat de cette insoutenable dette.
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