

Aujourd'hui encore, un tiers des Français ne part jamais en vacances. Des inégalités de pratiques qui sont bien sûr le fruit d'inégalités économiques, mais qui sont également liées à des différences sociales et d'éducation.
Si, depuis une trentaine d’années le taux de départ en vacances des familles françaises varie en réalité assez peu -autour de 60%, les inégalités sociales elles aussi, se perpétuent : les riches sont toujours deux fois plus nombreux à partir en vacances que les pauvres.
Et bien sûr ces inégalités sont encore plus criantes lorsque l’on observe de plus près ces pratiques du temps libre. Au-delà de savoir si les personnes partent ou non en vacances, il faut également regarder où ils partent et s’ils partent plus d’une fois dans l’année.
Partir aux sports d’hiver ne concerne qu’une toute petite partie de la population, en dépit de l’omniprésence médiatique qu’occupent ces pratiques. Ainsi, aux premières heures de l’hiver, les pubs pour les stations de ski colonisent arrêts de métro et encarts de magazines alors que cette pratique ne concerne que 7% de la population. Inutile de préciser que partir plus d’une fois par an ne concerne aussi qu’une part très faible de la population.
Pourtant une enquête sortie il y a quelques semaines nous rappelle que partir en vacances constitue un besoin vital pour 55% de la population. L’étude précise d’ailleurs qu’il ne s’agit ni des séjours de santé, ni professionnels, ni linguistiques, ni les fêtes de famille, ni même les pèlerinages. Il s’agit vraiment de séjours de détente et de loisirs. Selon une autre enquête de l’Observatoire national de la pauvreté, les dépenses liées aux vacances sont jugées comme essentielles pour se sentir intégré à la société.
Ces dépenses n’auraient donc rien de superflu mais constitueraient une source d’intégration et de bien être, au même titre que l’achat de produits d’hygiène, de beauté ou même de numérique. Comme l’explique Sandra Hoibian, directrice du Credoc, « dans une société où ces pratiques sont majoritaires, ne pas avoir de téléphone mobile ou le budget nécessaire pour partir en vacances nuit à l’intégration ».
Malgré ce caractère essentiel, les budgets liés aux vacances sont souvent les premiers à être sacrifiés en cas de difficulté financière. En dépit de leur importance sociale, les dépenses de temps libre restent toujours plus faciles à rogner que celles en matière de santé ou d’alimentation. Quand on parle de se serrer la ceinture, on commence par supprimer les vacances à la plage avant de restreindre les courses du quotidien. Même si les deux ne sont pas nécessairement incompatibles.
Mais ces inégalités ne se limitent pas à des questions financières. Si la question économique est centrale et permet très largement d’expliquer les inégalités de pratiques, elles se cumulent en réalité à des inégalités sociales.
Car bien sûr, il est plus facile de partir deux-trois jours de chez soi lorsque l’on a la maison d’amis ou de famille qui nous attend. Or ces hébergements gratuits concernent avant tout les plus privilégiés dont la famille et les amis ont plus de chance de disposer de maisons secondaires à leur prêter.
Et puis partir sur un coup de tête, quelques jours ou quelques semaines, c’est non seulement une question financière mais c’est aussi une question d’éducation. Ainsi les personnes ayant pris l’habitude, dans leur jeunesse notamment, de partir en vacances ont moins d’appréhension à quitter leur maison, à prévoir une vie hors de chez soi, sans leurs repères, parfois dans une langue étrangère
Pour réduire ces inégalités, il faut donc non seulement mobiliser des aides financières en ciblant particulièrement les classes populaires. Les classes moyennes, souvent salariées, bénéficiant souvent de chèques vacances ou d’aides de leurs employeurs. Mais il est également nécessaire de favoriser l’éducation aux vacances, sur le modèle des colonies de vacances d’autrefois, lieux de découverte et d’éducation populaire pour tous.
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