En mars 2019, Jean-Marie Laclavetine publiait "Une Amie de la famille", osant briser cinquante années de silence après la disparition tragique de sa sœur aînée. Dans "La Vie des morts", l'écrivain s'adresse à "celle qui ne l'a jamais quitté" pour lui raconter sa vie et les témoignages reçus.
- Jean-Marie Laclavetine Editeur, romancier, novelliste, traducteur
Jean-Marie Laclavetine explique ce qui a déclenché l’écriture de La vie des morts en prolongation d'Une amie de la famille__, évoquant l'accident de sa sœur noyée sous ses yeux à Biarritz, en 1968.
Il lui aura fallu cinquante ans pour sortir du silence. Les nombreux courriers ou témoignages reçus après la publication d’Une amie de la famille, de tous ceux qui avaient connu sa sœur Annie ou avaient vécu un deuil, sont à l'origine de ce second récit La Vie des morts. L'écrivain s'adresse à sa sœur, "fantôme familier et bienveillant".
C’est l’idée d’un dialogue effectif qui existe et qui se perpétue contre vents et marées entre les morts et les vivants. J’avais vraiment envie de parler de la place que les morts ont dans notre vie. Mais une place qui n’est pas celle des cimetières, des pierres tombales, du marbre noir et figé. Mais d’une vie effective, parce que j’essaie de raconter dans ce livre comment notamment la mort de ma sœur et d’un certain nombre de personnes que j’ai aimées, a transformé ma vie, l’a littéralement transformée. Et comment ma vie s’est organisée, comme pour beaucoup de vivants, autour d’un dialogue, dialogue silencieux bien souvent, avec ceux qui ont disparu. C’est un dialogue qui n’est pas si triste que cela, si funèbre ; qui est aussi un dialogue plein de mouvements et d’espoir.
Je me suis rendu compte de la place essentielle que tenaient les morts.
Lecteur passionné, Jean-Marie Laclavetine raconte le sentiment de deuil ressenti, dans son enfance, en vivant littéralement la mort de Porthos dans le roman d'Alexandre Dumas Le Vicomte de Bragelonne.
C’est intéressant de voir à quel point nous sommes habités par la littérature, elle nous met en contact avec les morts.
Cette mort de Porthos je la ressentais comme un deuil, mais en même temps elle n’était pas définitive, je savais bien que j’allais pouvoir un jour reprendre cette lecture (….) Porthos était mort sans être mort, ça c’est le miracle de la littérature. Et j’allais pouvoir en parler à mes amis, j’allais pouvoir en rêver. Cette mort de Porthos se prolongeait dans la vie et c’est ce miracle-là dont j’avais envie de parler dans "La Vie des morts".
Si je suis devenu écrivain c’est grâce à la mort de ma sœur c’est elle qui m’a guidé vers les livres et l’écriture, parce que je n’avais pas d’autre issue que celle-là. Si je n’avais pas vécu ce grand choc à quinze ans ma vie aurait pris une toute autre tournure. (...) C'est aussi une leçon de ce deuil et de ce long silence.
Ma vie s’est organisée autour d’un dialogue silencieux avec ceux qui ont disparu.
L'écrivain et éditeur évoque son amitié avec Roger Grenier, depuis la publication de son premier roman chez Gallimard. Et sa connivence avec cet "anarchiste, doux, discret, très bienveillant", avec qui il partageait "un même regard ironique sur le monde alentour".
Une Amie de la famille a reçu le Prix Marguerite Duras en 2019.
- Par Philippe Garbit
- Réalisation : Virginie Mourthé
- Avec la collaboration de Hassane M'Béchour
- Indexation web : Véronique Vecten, Documentation Sonore de Radio France
- La Nuit rêvée de Jean-Marie Laclavetine - Entretien 1/3 (1ère diffusion : 04/04/2021)
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