Emma vous parle de sa BD "La charge émotionnelle et autres trucs invisibles", et Nicolas Escach de l’exercice militaire Trident Juncture en mer Baltique. Les chroniques s'intéressent aux sentiments en politique et aux canulars scientifiques.
- Emma Illustratrice, Bédéiste
- Nicolas Escach Géographe, université de Caen, maître de conférences à Sciences Po Rennes
Le Réveil Culturel par Tewfik Hakem :
Un an après le début du mouvement Me Too, Tewfik Hakem s'entretient avec avec Emma, illustratrice, féministe, révolutionnaire et revendiquant le mot "autrice ", pour la parution du troisième tome de sa BD La charge émotionnelle et autres trucs invisibles, paru aux éditions Massot.
On grandit tous dans cette culture du viol. C'est un contexte qui tend à responsabiliser les victimes de violences sexuelles - en majorité des femmes - et à déresponsabiliser les agresseurs - en majorité des hommes. En gros, ce que va porter la culture du viol comme idée, c'est que c'est aux femmes de se débrouiller pour échapper au viol qu'on présente un peu comme un impondérable, quelque chose qui serait comme un orage - si on fait pas attention on risque de se retrouver dessous - sans mettre en valeur le fait que les auteurs d'agressions sexuelles sont des êtres humains qu'on peut éduquer différemment, qu'on peut raisonner. Je parle de mon expérience personnelle, même si j'ai du mal à parler des agressions que j'ai vécues, mais il y a eu "Me Too", il y a eu toutes ces femmes qui ont parlé et je me suis dit si elles le font, je peux le faire.
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Le Journal des Idées par Jacques Munier :
Les propos de Gérard Collomb, début septembre, sur le manque d’humilité de l’exécutif et notamment le terme grec d’hubris (démesure) que l’ex-ministre a employé, ont inspiré des commentaires savants.
Commentant la chute de popularité du président dans les sondages, Gérard Collomb avait déclaré : « je pense qu’aujourd’hui peut-être, les uns et les autres, nous avons manqué d’humilité. L’hubris, c’est la malédiction des dieux, quand à un moment donné vous devenez trop sûr de vous ». Et l’agrégé de lettres classique est revenu sur le thème pour conclure sa sortie médiatique : « Les dieux aveuglent ceux qu’ils veulent perdre. » Dans Le Point, Romain Brethes s’arrête sur cette notion essentielle chez les anciens Grecs, qui remplit les tragédies et que nous avons adoptée telle quelle, faute de lui trouver un équivalent exact dans notre langue. Démesure, orgueil, arrogance, outrage… la faute morale s’apparente à un défi à la puissance des dieux et une injure qu’ils ne tardent pas à venger.
C’est s’approcher du rang où la foudre de Zeus brille trop aux yeux prévient le chœur dans Agamemnon, la tragédie d’Eschyle, alors que le roi des rois rentre chez lui triomphant après avoir vaincu Troie. On connaît la suite, l’assassinat par sa femme Clytemnestre et son amant. Mais le terme hubris a également un sens juridique, il qualifie « un outrage, une violence extrême commise à l’égard d’autrui ». Au tribunal – ajoute Romain Brethes – il avait « un poids considérable, car il impliquait que l’offensant avait cherché à humilier son adversaire et à outrager son honneur, qui définit socialement l’individu dans la société grecque ». Lorsque le président Macron tance un gamin irrespectueux – commente l’helléniste – il est dans son rôle, mais quand il revient lui dire « Apprends d’abord à avoir un diplôme et à te nourrir toi-même… », il bascule dans l’humiliation, « fort de son statut, non de président de tous les Français, mais de sur-diplômé qui a bien gagné sa vie ». De même avec l’horticulteur sans emploi auquel il conseille de traverser la rue pour trouver du travail, c’est la dignité de son interlocuteur qu’il malmène. Conclusion : « Si la verticalité du président est une donnée de la fonction, l’horizontalité du citoyen, lorsqu’il parle à un autre citoyen, en est une autre. » Ce qui renvoie aussi à la notion d’individu, doté d’une égale dignité et d’un droit au respect, dont on a vu qu’elle est ancienne.
Plus récente et problématique est celle d’individualisme. Dans son enquête sur les sources du mot, qui vient de paraître à CNRS Éditions sous le titre Individualisme, Marie-France Piguet explore dans ses origines les ambivalences du néologisme, tantôt renvoyé à une forme d’égoïsme et de rupture du lien social, ou au contraire à une affirmation de l’autonomie et de la liberté personnelle. Les premières attestations au début du XIXe siècle oscillent en effet entre ces deux pôles. Commentant les conséquences sociétales de la Révolution française, Joseph de Maistre déplore « le protestantisme politique poussé jusqu’à l’individualisme le plus absolu ». L’éthique protestante est également au cœur des analyses de Lamennais, qui reconnaît son « utilité, en réagissant contre l’autorité absolue qui, tendant à détruire la liberté de l’esprit humain, sa spontanéité, opposait à son développement une infranchissable barrière ». Protestantisme et philosophie des Lumières auraient donc conduit à la Révolution, entendue comme une émancipation de l’individu, de sa liberté, de sa raison et de ses droits, mais la stigmatisation des attributs politique, intellectuel et spirituel de l’individu, reste présente dans l’orbite sémantique du terme « individualisme », qui l’associe à une conduite sociale empreinte d’indifférence à l’égard d’autrui et caractérisée par un confortable isolement dans la société. Aujourd’hui, conclut la linguiste et lexicographe Marie-France Piguet, le terme renvoie aussi « à une inquiétude diffuse qui se nourrit de la conscience partagée d’un affaiblissement, d’une dégradation, voire d’une décadence des croyances, des liens, des contraintes et des solidarités qui tissaient la vie sociale d’autrefois ».
Le remède à cela : ce que le philosophe australien Peter Singer – célèbre défenseur de la cause animale - appelle « l’altruisme efficace », titre de son dernier livre paru aux éditions Les Arènes. Il s’en explique dans Philosophie magazine. En matière de don aux associations caritatives, par exemple, au lieu d’agir sous le coup de l’émotion, on peut en faire une question de choix rationnel. Des organismes utilisent des méthodes d’audit pour évaluer l’action des ONG, de manière à déterminer laquelle saura employer le plus efficacement l’argent collecté. À propos de la crise migratoire, le philosophe constate qu’elle a pour effet de porter au pouvoir des partis d’extrême-droite, anti-européens, climatosceptiques et incompétents sur le plan économique. Il suggère de s’accorder sur un quota généreux de demandeurs d’asile issus des camps de réfugiés de l’ONU, mais de refuser l’immigration illégale. L’idée étant qu’il ne suffit pas de mettre la pression sur l’adversaire politique mais de lui proposer une issue acceptable.
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Les Enjeux Internationaux par Xavier Martinet :
A vingt jours d’un des plus grands exercices de l’OTAN en Europe du Nord (Trident Juncture en Norvège), les Etats Baltes et Scandinaves sont inquiets. Face à une activité militaire russe plus intense, la région reçoit depuis cette année un soutien militaire accru des USA et de l'UE.
Xavier Martinet s'entretient avec Nicolas Escach, géographe, université de Caen, maître de conférences à Sciences Po Rennes.
L'Humeur du matin par Guillaume Erner :
Le pénis est-il responsable du réchauffement climatique ?
Probablement pas, voilà un raccourci que l’on peut qualifier d’hasardeux, et pourtant cela fait partie des absurdités que deux universitaires américains ont réussi à faire avaliser par des revues dites scientifiques. Peter Boghossian et James Lindsay, un philosophe et un mathématicien, se sont livrés à un canular, proposant des articles délirants : par exemple sur l’absence de culture du viol chez les chiens, proposant que l’on dresse les hommes comme des chiens, pour les empêcher de violer, entre autres joyeusetés.
Plus délirant encore que ces articles, que leur contenu, c’est le fait qu’ils aient été acceptés par les comités de lecture des revues scientifiques, montrant ainsi le caractère pseudo scientifique de ces soi-disant organes de sélection.
Les blagues potaches font partie des plaisirs de la vie, un plaisir de la vie qui, de surcroît ici, donne à penser : il s’agit de montrer que ces pseudo pratiques scientifiques reposent en réalité sur des mots clés, les rapprochant d’un genre littéraire plus que d’une quelconque démonstration, puisque ces faux papiers ont été acceptés par ces revues.
Alors maintenant qu’on a bien rigolé, posons-nous la question suivante : de qui se moque-t-on ? Car ce canular n’est pas le premier, et ce sont toujours des mêmes que l’on se moque, autrement dit des constructivistes sociaux. Pour le dire simplement, il existe deux manière d’appréhender la réalité humaine, l’une considère qu’elle est faite de normes et de conventions choisies par les individus pour les individus — ça c’est le constructivisme — tandis que d’autres considèrent que ces pratiques ont des sources naturelles, biologisant ainsi l’origine des pratiques sociales.
Or, ce sont toujours des constructivistes que l’on se moque, alors que les naturalistes peuvent être tout aussi ridicules, ayant recours à un jargon pseudo darwinien pour enfoncer des portes ouvertes ou défoncer des problèmes complexes à coups de raccourcis saisissants. Chez les pseudo constructivistes le pénis est responsable du réchauffement climatique, chez les pseudo naturalistes le pénis est naturellement polygame, deux assertions aussi ineptes l’une que l’autre.
Pourtant le constructivisme a sa dignité, Machiavel était un constructiviste, le naturalisme aussi, pour peu qu’on les manie avec rigueur et non pour aligner du verbiage.
Voilà pourquoi maintenant j’attends, pour faire bonne mesure, un canular impliquant cette fois ci le ridicule naturaliste.
L'équipe
- Réalisation