Frank Miller vous parle de l"univers de Batman et de son enfance, et Olivier Dabène à la polarisation maximale dans et autour du Venezuela. Les chroniques s'intéressent à la bonne chère et au symbole du Venezuela dans notre débat public.
- Frank Miller auteur de bande-dessinée, scénariste, réalisateur, metteur en scène américain
- Olivier Dabène Politologue.
- Olivier Delcroix Journaliste au Figaro
- Xavier Fournier journaliste, spécialiste de l'histoire des comics
Le Réveil Culturel par Tewfik Hakem :
Tewfik Hakem s'entretient avec l'auteur de bande-dessinée, scénariste, réalisateur, metteur en scène, Frank Miller, familier du comic book depuis les années 1970, star du genre super-héroïque avec _Batman,_à l'oeuvre couverte d'éloges autant par le public que par la critique. Il évoque pour nous son premier souvenir de Batman, ses parents, son enfance, ces multiples projets encore, à venir. Au Festival d'Angoulême, une 46e édition qui rend hommage aux 80 ans de Batman.
Avec la participation de Xavier Fournier, journaliste et auteur de Super héros, une histoire française, ouvrage paru en 2014 aux éditions Huginn & Munnin, et d'Olivier Delcroix, du Figaroscope qui consacre sa Une cette semaine aux super héros, et nouveau partenaire du Réveil Culturel pour une chronique mensuelle.
Tout commence quand j'avais cinq ans. Mon père était commercial, il voyageait, un jour il m'a rapporté un comic, "Batman", dans une collection de "strips" des années 40. J'ai ouvert et je me suis fait engloutir par l'histoire. Puis, je me suis dit : Il faut que je voie Batman ! Cette enquête a duré assez longtemps. Voilà mon premier souvenir de Batman. [...] Très très tôt j'ai dit à ma mère, bien avant même d'aller à l'école, que j'allais consacrer ma vie aux comics. Ma mère m'a répondu, je m'en souviendrai toujours : - fais ce que tu veux, Frank mais il faut vraiment que tu t'engages. Frank Miller
Pour Batman, on a pris contact avec moi. On me montrait les clefs du royaume magique, on me proposait de me les donner ; en parallèle, j'avais 29 ans et c'était presque la veille de mes 30 ans, j'aurais été plus vieux que Batman je m'y refusais. Par conséquent, j'ai vieilli Batman pour qu'il soit plus vieux que moi. Une fois cela, toute la logique s'est déployée, j'ai pu l'intégrer dans un univers qui ressemblait peu ou prou à la fin des années 80, avec New York en pleine déliquescence, et il fallait que Batman fasse peur, qu'on sache pourquoi. A partir de là, j'ai pris mon pied. Frank Miller
Lien Dossier Les super héros dans Le Figaro, Sortir à Paris.
Le Journal des Idées par Jacques Munier :
La dernière édition du guide Michelin est parue cette semaine, avec son lot de promotions et déceptions. C’est l’occasion de parler bonne chère.
À commencer par cette mise au point sur la viande, due à l’australien Keir Watson, ancien végétarien repenti, qui émet des doutes quant aux arguments des opposants à l’alimentation carnée. « Ceux qui alertent sur les dégâts environnementaux de l’élevage se fondent sur les pires méthodes de production », affirme-t-il dans Le Point. Et de préconiser, contre l’élevage intensif, des méthodes comme le pâturage rotatif, à développer et « démocratiser ». Déplacer les troupeaux, comme font les herbivores sauvages, permet à l’herbe de repousser, contient l’érosion des sols, augmente la photosynthèse qui absorbe le CO2, et nourrit mieux les animaux. C’est le biologiste Allan Savory qui l’a constaté en Afrique en luttant contre la désertification. Paradoxalement, « en augmentant le nombre de grands herbivores, à condition qu’ils se déplacent régulièrement », les végétaux et l’eau étaient revenus en deux ou trois ans.
En poussant à l’ouest, la dernière livraison de la revue LeRouge&leBlanc propose une balade en Montagne Saint-Émilion, l’appellation rustique aux terrasses sablo-graveleuses qui délivrent moyennant la treille un jus puissant. Retour amont avec la visite à l’esthète Jérôme Bressy dans les vignes de Rasteau. « Nous marchons parmi des ceps épais et tordus qui ont à l’évidence un âge plus que respectable ». L’artisan quotidien de la volupté sourde des lieux souligne qu’au départ « c’était une vigne centenaire complantée grenache-carignan. J’ai ajouté du mourvèdre, de la clairette, de la counoise, du vaccarèse et du cinsault. » Tout un poème de cépages, et puis une alchimie du goût. Laquelle commence dans « ce jardin de vignes » par le travail du sol. « Parce que ces argiles-ci, on ne les retourne pas n’importe comment ! » La vinification est ensuite tout un programme, impossible à résumer ici tant les méthodes et les situations diffèrent. En plus, pour Jérôme Bressy (domaine Gourt de Mautens), la quête du « grand vin » n’est pas rectiligne. De la vigne à la cave, on peut suivre « ce cheminement vers l’excellence ». L’intéressé le résume ainsi : « J’essaie de pousser le raisin pour trouver une certaine finesse de texture. »
Les Enjeux Internationaux par Xavier Martinet :
Deux présidents, deux légitimités, deux camps internationaux : la polarisation est maximale dans et autour du Venezuela. Nicolas Maduro fait face depuis mercredi à un autre président autoproclamé, Juan Guaido. Manifestations et violences se poursuivent, la communauté internationale se divise.
Le 23 janvier 2019 est devenu une date historique pour le Venezuela. Juan Guaido, jeune président de l'Assemblée nationale âgé de 35 ans, leader de l'opposition, s'est proclamé président de la République par intérim devant des dizaines de milliers de manifestants anti-Maduro à Caracas. Deux jours plus tôt, un soulèvement militaire a pu être avorté par le gouvernement chaviste. Le pays est dorénavant gouverné par deux présidents qui se dénient leur légitimité mutuellement.
Xavier Martinet s'entretient avec Olivier Dabène, professeur des Universités en science politique à Sciences-Po Paris, président de l'Observatoire politique de l'Amérique latine et des Caraïbes.
L'Humeur du matin par Guillaume Erner :
On vient d’ajouter un nouveau département à la France, il s’appelle le Venezuela.
Alors, certes, notre gouvernement ne gère pas encore le Venezuela, je crois qu’il a déjà fort à faire en métropole, et, cependant, le Venezuela est devenu un problème tout simplement de politique intérieure. Tout le monde s’y met ce matin : la France Insoumise est au taquet, Emmanuel Macron tweete et Le Figaro éditorialise, ils ne sont pas les seuls.
Le Venezuela est devenu un problème franco-français. C’est une vraie bonne nouvelle pour la Corée du Nord et Israël qui, du coup, intéressent moins et peuvent prendre des vacances. Par exemple, avant cette annexion, on entendait souvent dire d’une mesure qu’elle était « nord-coréenne » — je précise d’ailleurs que le qualificatif devait être entendu de manière péjorative — et maintenant on s’intéresse à vraiment autre chose.
Pour le dire en une phrase : Maduro est-il plus ou moins légitime qu’Emmanuel Macron ? Car, par une ironie dont l’Histoire a le secret, ceux qui discutent de la légitimité d’Emmanuel Macron ici soutiennent la légitimité de Nicolas Maduro là-bas, et j’ajoute que la phrase est strictement réversible, la réciproque est définitivement vraie.
Pour le reste, la nationalisation du pétrole vénézuélien, en vrai, ça nous chatouille l’équateur mais sans faire bouger le méridien de Greenwich. Les remarques autour de ce pays servent à mobiliser son camp politique ou bien à réveiller celui d’en face. Bien sûr, on aurait pu prendre la Syrie ou l’Erythrée, deux pays où le bonheur est disponible uniquement sur le marché noir, mais vous comprenez, la Syrie c’est compliqué, l’Erythrée on sait à peine que ça existe, tandis que le Venezuela c’est extrêmement pratique. Il y eut la Chine, Cuba, le Cambodge, mais la roue tourne.
Faute de nouveauté, le débat public s’endort, voilà pourquoi il faut remercier Juan Guaido et Nicolas Maduro de l’avoir soudainement redynamisé. Dans les semaines qui viennent, on va beaucoup parler du Venezuela, autrement dit, beaucoup parler pour ne rien dire sur la scène intérieure, parce que l’on cumule autour de cette question une ignorance des réalités locales et des lunettes idéologiques diverses.
Mais que les Vénézuéliens se rassurent, nos politiques ne sont absolument pas prêts à traverser le globe pour aller les gouverner, ce pays est voué à demeurer un symbole, celui de la dégénération symbolique de notre débat public.
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