Jean-Yves Leloup et Pier Schneider vous parlent de l'exposition "Électro, de Kraftwerk à Daft Punk", et Mikaa Mered de l'ambition de la Russie réaffirmée au Forum de l’Arctique. Les chroniques s'intéressent aux mots et au Thermomix, objet technique.
- Mikaa Mered Chargé d’enseignement en géopolitique des pôles à Sciences Po et HEC
- Pier Schneider Architecte et scénographe associé à l'exposition Electro
- Jean-Yves Leloup Commissaire de l'exposition Electrosound, DJ et artiste sonore, journaliste et critique spécialisé en musique électronique
Le Réveil Culturel par Tewfik Hakem :
Tewfik Hakem s'entretient avec Jean-Yves Leloup, commissaire de l'exposition et Pier Schneider, artiste associé à l'exposition et scénographe, à l'occasion d'une exposition à la Philharmonie de Paris, Électro, de Kraftwerk à Daft Punk, jusqu'au 11 juillet 2019.
Ce n'est pas tout à fait une exposition historique, on va plutôt aborder l'électro à travers ses imaginaires, ses codes, sa culture, ses esthétiques, ses relations avec les différentes formes d'art, que ce soit la photographie, la vidéo, l'installation, l'art numérique, la scénographie de concert. Jean-Yves Leloup
On fait partie de cette génération qui a vécu les rêves des années 90, notamment dans la puissance de rassemblement des fêtes. On se rassemblait autour d'un son plutôt que d'un musicien, on se rassemblait autour d'une musique, d'un "sound system", c'était assez fort et même très puissant, à cette époque-là. Pier Schneider
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Le Journal des Idées par Jacques Munier :
« Mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde », écrivait Camus en 1944. La formule est toujours d’actualité…
C’est la citation exacte, extraite d’un texte intitulé Sur une philosophie de l'expression, paru dans la revue Poésie 44. Dans L’homme révolté Camus revient sur la question : « La logique du révolté est de s'efforcer au langage clair pour ne pas épaissir le mensonge universel ». La leçon avait une portée singulière à l’époque, après des années de manipulation des esprits par la propagande des totalitarismes. Mais il faut toujours se méfier du « prêt-à-penser » qu’induisent certains mots, ou de la confusion qu’ils peuvent engendrer. Sur le site d’information et d’analyse AOC, Éric Fassin revient sur le mot « race » que les députés ont décidé à l’unanimité, en juillet dernier, de supprimer du premier article de la constitution, au motif que le terme est « scientifiquement infondé ». Certes, mais supprimer le mot suffit-il à mettre fin au racisme ? Pour le sociologue, « cette opération revient à dépolitiser la question raciale : le discours sur la vérité occulte un régime de pouvoir ». Et s’il faut combattre la domination raciale, « ce n’est pas par amour de la vérité, mais par haine de l’injustice ». Pour les populations qui s’estiment discriminées du fait de leurs origines ou de leur couleur de peau, le mot race a une réalité bien tangible.
Le mot « privilège » a longtemps désigné les prérogatives et avantages d’une partie de la population. Mais comme le rappelle Marc-Olivier Behrer dans Le Monde, dans les années 1960, les sciences sociales américaines lui ont attribué le sens de « statut préférentiel accordé à certains en raison de la couleur de leur peau, de leur genre ou de leur sexualité », soit l’homme blanc hétérosexuel, dans le cadre d’une analyse des causes du racisme. Ce privilège était une compensation symbolique pour les petits blancs, et une manière d’empêcher que les travailleurs blancs et noirs tissent des liens de solidarité.
Le mot « réforme » est si délavé par l’usage qu’on se demande s’il a encore un sens, si ce n’est celui – par défaut – de « politique », depuis que celui-ci semble avoir perdu le sien. À tel point qu’un candidat aux dernières élections présidentielles lui a substitué, dans un ouvrage publié sous ce titre, le vocable « révolution », histoire de lui redonner quelque lustre. Cette perfusion de valeur pour un terme démonétisé est d’ailleurs une pratique ancienne. Dans Le Figaro, le député LR Jean-Louis Thiériot estime qu’il faut « réformer l’économie au nom de ce qui dépasse l’économie ». Il rappelle que « De Gaulle avait placé toutes ses réformes sous le sceau de la « grandeur française » et du poids de notre pays dans le monde », que Margaret Thatcher avait brandi « la défense du « monde libre » contre le totalitarisme soviétique ». Gerhard Schröder avait évoqué, quant à lui, « la préservation de l’économie sociale de marché », un peu comme on parle de « plan de sauvegarde de l’emploi » pour euphémiser un licenciement collectif.
Les Enjeux Internationaux par Xavier Martinet :
Faire de l'Arctique une des principales zone minière et route maritime du monde : c'est l'ambition de la Russie réaffirmée au Forum de Saint Pétersbourg cette semaine, avec quatre des 8 pays du Conseil de l'Arctique. Moscou qui veut attirer les investisseurs doit aussi désamorcer certaines craintes. Forum de l’Arctique en Russie : coopérer pour mieux régner ?
Xavier Martinet s'entretient avec Mikaa Mered, professeur de géopolitique à l'ILERI et à NEOMA Business School.
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L'Humeur du matin par Guillaume Erner :
De quoi le Thermomix est-il le nom ?
Je déteste ce type de phrase « de quoi le Thermomix est-il le nom ? » : ça marche avec tout du Brexit au Thermomix, mais là je suis décidé à justifier cette formulation. Alors, auparavant, dans un souci d’universalisme, je dois dire ce qu’est le Thermomix : c’est donc un robot cuiseur très technologique, avec un écran tactile, une connexion wifi que je ne sais pas utiliser, un livre de recettes que mon fils m’a installé alors que je ne lui avais rien demandé… Enfin bref, le Thermomix est le croisement d’un iPad et d’un mixer sur une table de cuisine, avec une promesse : il fait tout, tout seul.
L’autre particularité du Thermomix est de valoir une blinde — un mois de salaire pour un gage d’amour éternel me dit ma femme — je ne peux pas vous donner son prix puisque c’est un cadeau. Et comme le Thermomix vaut cher, il a plein de concurrents, du Cookeo au Monsieur cuisine — oui, oui la version Lidl s’appelle Monsieur cuisine, drôle d’appellation genrée, laquelle signifie qu’un objet à fort contenu technologique, dans l’esprit des gens de chez Lidl en tout cas, ne peut être que masculin.
Mais l’essentiel n’est pas là, car le Thermomix repose en réalité sur une promesse mensongère : l’idée selon laquelle il fait tout, tout seul, alors qu’en réalité il vous rend esclave — esclave de son écran, de ces sonneries, de son jargon pour hacher, battre, cuire, laisser reposer, passer dans le four, mettre sur la position Varona vitesse 2. Le Thermomix fait par exemple très bien la brioche à condition que vous bloquiez 24 h dans le but d’en confectionner trois petites, le Thermomix fait très bien la brioche à condition de vous lever vers 3 h du matin pour travailler la pâte que vous aviez laissée reposer préalablement, ce qui est très pratique quand vous êtes matinalier…
Mais en fait le Thermomix est un rêve d’ingénieur concrétisé au milieu de votre cuisine, il sait tout faire mais tout est très compliqué. Le Thermomix, c’est un peu le philosophe Gilbert Simondon devenu cuisinier, le philosophe qui imaginait le devenir des objets techniques dans ce qu’il appelait la concrétisation, comme si tous les objets techniques avaient vocation à devenir des systèmes, des systèmes fermés à l’instar des moteurs diesels qui n’ont pas besoin de bougie. Le Thermomix c’est Kant devenu mécanicien, ou bien Nietzsche devenu ébéniste : sur le papier c’est beau, sur la table c’est plus encombrant qu’autre chose.
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