Où il sera question d'une île, de visages sombres, d'une beauté assise sur ses genoux, d'un journal du XIXè siècle, de la richesse de la langue, d'économie indienne, du nom des trains, d'une famille retrouvée.
C’est une série d’images dont certaines n’appartiennent qu’à nous. Dont certaines n’existent que dans un imaginaire, dans des souvenirs. Des souvenirs de ce qu’on a été, de ce qu’on a voulu. Des images fugaces de saisons passées, de saisons noires. C’est une musique rimbaldienne qui vient teinter ces images sombres. « Un soir j’ai assis la beauté sur mes genoux./ Et je l’ai trouvée amère. Et je l’ai injuriée » écrit le poète d’une Saison en Enfer. Il y a ici ce même timide sentiment de révolte. Contre ce qu’on a été, contre les paysages qu’on a traversés. Contre ce brouillard et cette forêt nocturne où l’on a dû chasser une partie de nous même pour avancer. Il y a des étendues d’eau calmes, avec une écume de brume. Et de feuillage. Une île. Elle est habitée. On y voit une maison pile au centre. Tout seule. Parfaitement placée comme dans un décor de film. Tout comme ces routes sauvages dans les forêts qui continuent à l’infini. Se fichent bien des obstacles. Des lieux qui s’ils n’existaient pas en photo pourraient bien être ceux de rêves, de cauchemars enfantins, de fantasmes, des refuges imaginaires. Où l’on peut se cacher. Où le noir pourrait nous avaler. Avec en filigrane des visages fermés. Ceux de personnes que l’on n’a sans doute jamais connues. Mais qui sont là, qui nous accompagnent depuis l’enfance, sur un buffet, sur les murs d’un couloir, dans les arbres, dans les vagues, peut-être aussi parfois dans les nuages. « Saisons Noires », C’est une série du photographe Julien Coquentin que l’on peut voir en ce moment à Sète au festival Images singulières. Une série sur le décor de son enfance. Les forêts, les maisons, la main d’un aïeul, le ciel voilé d’un matin d’avant. Des images qui se bousculent écrit le photographe. Qui se bousculent en lui, pour raconter sa propre histoire. Qui se bousculent dans le temps aussi. «J’ignore encore écrit-il, le moment, où cette série a précisément commencé. Sans doute pas à la première photo. » La première image, c’est la sienne, et peut-être ne la donnera-t-il jamais à personne. Parce qu’il y a des souvenirs qui ne prennent de forme que pour soi-même. Des images qui n’existent pas ailleurs, pour le monde. Ajouter une saison de plus à son calendrier intérieur. Même si la nuit y domine un peu plus.
(Tapis Musical : Agnès Obel - Avenue )
L'équipe
- Production
- Réalisation