Corona : ceux qui sortent

Un policier contrôle l'attestation de déplacement d'un conducteur
Un policier contrôle l'attestation de déplacement d'un conducteur ©AFP - Pascal GUYOT
Un policier contrôle l'attestation de déplacement d'un conducteur ©AFP - Pascal GUYOT
Un policier contrôle l'attestation de déplacement d'un conducteur ©AFP - Pascal GUYOT
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Certains font quelques entorses aux règles du confinement comme Bruno pour rester fidèle à son esprit "libre et gaulois" à Lille. Confinée dehors en Ariège, Laura continue d'élever ses chèvres. Benjamin, lui, a enterré sa grand-mère dans les règles, mais s'est fait verbaliser juste à la sortie.

Habitué à se retrouver entre amis dans un bistro du centre de Lille, Bruno, 45 ans, cadre dans le domaine de la santé, a décidé de maintenir ses habitudes malgré le confinement.

J'ai appelé le gérant du bistro et  je lui ai dit qu'avec des amis on comptait passer pour faire revivre un peu l'établissement, partager un bon repas, à la française ! 

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On est passé par la porte secondaire. Nous avions nos attestations professionnelles ou au motif "de rendre visite à une personne vulnérable". Forcément, le gérant, il est affaibli psychologiquement à force de ne voir personne ! 

Il y avait parmi nous un expert-comptable, un médecin, un journaliste, moi-même dans le domaine de la santé, le gérant du bar et un retraité. 

Derrière les persiennes, nous respections les distances et trinquions de loin. Mais avec l'heure qui avance, le vin qui coule, on oublie un peu les gestes barrières. 

Laura vit en Ariège. Confinée sur les 36 hectares de sa ferme collective où elle élève des brebis avec Mélanie, cette trentenaire raconte son confinement au grand-air.

On élève 80 brebis, on est bio et on vend nos agneaux découpés sous vide. Il faut être constamment dehors car les brebis mettent bas quotidiennement.

Quand j'ai entendu le président dire que les marchés de producteurs devaient fermer mais pas les supermarchés, j'ai halluciné. Les gens achètent la salade qui vient de l'autre bout du monde tandis que des tonnes de nourriture produites sur le territoire sont jetées.

Des copains sont venus à la ferme pour se confiner avec nous. On était pris au dépourvu. Ils sont venus de Toulouse, et de Paris. On a laissé tomber les gestes barrières entre nous mais faisons attention pour les personnes extérieures. 

Benjamin, 26 ans, vit à côté de Caen. Fin Mars, à l'enterrement de sa grand-mère, il est verbalisé avec trois autres membres de sa famille à la sortie du cimetière pour "non-respect des règles de confinement".

Ma grand-mère voulait une cérémonie religieuse mais nous n'avons pas pu nous réunir dans l'église. Il n'y avait pas de fleurs car les fleuristes étaient fermés. On était quinze. Éloignés les uns des autres, nous étions tous en pleurs sans pouvoir nous consoler mutuellement. 

Ma sœur était avec moi dans la voiture. La voiture de mon cousin, devant sur la route, venait de se faire arrêter. 

Le policier nous a dit que dans le Grand Est, on n'enterrait plus les morts, qu'on les brûlait et ils nous ont mis quatre amendes avec sa collègue. 

Le ton est monté, ma sœur a éclaté en sanglots. Et ils sont passés à d'autres voitures sans d'autres explications. 

Reportage : Clément Baudet 

Réalisation : Yael Mandelbaum. Mixage : Delphine Baudet

Merci à Bruno, Laura, Benjamin, Clément Combes, Marie Petit et Emmanuel Crapet.

Chanson de fin : "Good news" de Mac Miller. 

Pour aller plus loin concernant le respect, ou non, du confinement : 

Un article sur un bar clandestin en Indre et Loire. 

Un article de Ouest-France sur la verbalisation de Benjamin et sa famille.

Un article de Franceinfo sur l'explosion de la délation. 

Un article de Capital sur les chiffres de la verbalisation en France.

Des articles du Figaro, du Monde concernant les stratagèmes des Français pour contourner le confinement. Et un article de CNews concernant la tendance des rendez-vous au supermarché. 

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