Hafsa s'est radicalisée alors qu'elle n'avait que quinze ans. Après une tentative de départ en Syrie, et une interdiction de sortie du territoire, elle décide d'organiser un attentat contre une salle de spectacle parisienne. Elle est arrêtée quelques jours avant de passer à l'action.
"On savait qu’on pourrait jamais faire aussi bien que le Bataclan mais on voulait essayer de leur ressembler." Hafsa
Nous sommes en 2015. Hafsa, quinze ans, se sent seule. Elle s'isole et passe tout son temps sur les réseaux sociaux, où elle découvre les vidéos de propagande de l’Etat islamique. Ne pouvant rejoindre Daech en Syrie, Hafsa est déterminée à faire le djihad sur le territoire français.
J’ai recruté trois filles, on s’est rassemblé sur un groupe Facebook et on a commencé à chercher des lieux. J’ai trouvé une grande salle de concert, avec un bar à côté ouvert toute la nuit, pour tuer le plus de personnes possible. Hafsa
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Le projet s’organise : Hafsa et ses amies achètent des armes et mettent au point leur plan d’attaque.
On devait entrer par derrière, tirer sur la foule. Si les forces de l’ordre arrivaient, soit ils nous tiraient dessus, soit on se faisait exploser à la ceinture. Mourir en martyr, ça fait rêver tout le monde. Hafsa
Le jour J, Hafsa et ses amies sont arrêtées avant de passer à l’acte. Placée pendant un an dans le quartier mineur de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, Hafsa est ensuite transférée dans un centre éducatif fermé.
Fin novembre 2017, elle est jugée à au Tribunal pour enfants de Paris pendant deux jours avec l’une de ses co-accusées. Elle est condamnée à cinq ans de prison dont deux ans de sursis et mise à l’épreuve. Elle est aujourd'hui libre, sous contrôle judiciaire.
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Une mère veut comprendre ce qu’est devenue sa fille, Emma, quinze ans, endoctrinée par les réseaux de l’Etat islamique. Une série documentaire en cinq épisodes qui montre une société démunie face à l’islamisme. Un podcast de Rémi Dybowski Douat et Laure Marchand pour "Les Pieds sur terre".
Repères
L’Etat islamique
En 2013, l’ "Etat islamique en Irak et au Levant" voit le jour dans une Syrie dévastée par la guerre civile depuis le 15 mars 2015.
Le 29 juin 2014, depuis Mossoul, l’Irakien Abu Bakr al Bagdadi proclame l’instauration d’un "Califat" sur les territoires qu’il contrôle à cheval entre l’Irak et la Syrie. La ville de Raqqa, en Syrie, devient la capitale de ce qui s’appelle désormais l’Etat islamique.
A son apogée, le groupe terroriste compte près de 40 000 membres d’origine étrangère, venus de plus de 40 pays du monde entier, de l’Asie aux Etats-Unis en passant par l’Europe.
En juillet 2017, suite à près d'un an d'offensive, l'armée irakienne, soutenue par la coalition internationale, reprend la ville de Mossoul à l'organisation terroriste. Le 17 octobre 2017, c’est au tour de Raqqa. Les derniers djihadistes étrangers et leurs familles fuient le long de l'Euphrate vers la frontière irakienne. Au fil des mois, le territoire de l’Etat islamique se résume à quelques kilomètres carré autour de Baghouz. Le 23 mars 2019, les forces arabo-kurdes, toujours soutenues par la coalition, annoncent leur victoire sur l'Etat islamique en Syrie.
Qui sont les Françaises du djihad ?
Sur 1700 Français qui ont rejoint la Syrie depuis 2014, 391 sont des femmes selon les derniers chiffres du Ministère de l’intérieur. La plus jeune a 14 ans, la plus âgée a une soixantaine d’années. Parties pour beaucoup avec leurs enfants, certaines ont donné naissance à des enfants sur place. On estime actuellement que 550 mineurs ont vécu, ou vivent encore, en Syrie ou en Irak. La majorité a moins de 5 ans.
Le 9 octobre 2018, selon les services de renseignement français, 261 individus majeurs sont rentrés sur le territoire national après avoir séjourné en zone irako-syrienne, dont 187 hommes et 74 femmes. Une quarantaine de ces françaises sont en attente de jugement ou ont été jugées, la plupart du temps devant un tribunal correctionnel. Pour le moment, la femme condamnée le plus lourdement est une mère de famille âgée d’une soixantaine d’année, qui a écopé de 10 ans de prison en 2017, dont deux tiers de sûreté, pour avoir fait plusieurs allers-retours en Syrie. Devant la cour d’assises spéciale, la première femme de retour de Syrie doit être jugé en novembre 2019. Elle risque jusqu’à trente ans de réclusion criminelle
Selon le ministère de la justice, 95 enfants ou adolescents ont également été ramenés par leurs parents en France après un séjour en Syrie ou en Irak. 88 ont fait l’objet d’une procédure d’assistance éducative.
Aujourd’hui, 90 femmes françaises, et avec elles 210 enfants, sont détenues par les kurdes au nord de la Syrie. D’autres sont encore libres autour d’Idlib à l’ouest de la Syrie, dans une zone sous contrôle de groupes de combattants divers. Elles y vivent avec leurs enfants français.
Les Belges du djihad
Au total, 450 Belges ont rallié un groupe terroriste en zone irako-syrienne ou ont tenté de le faire. Parmi eux, 86 femmes. Au 1er mars 2019, selon les autorités belges, 130 personnes sont rentrées en Belgique.
Parmi les Belges liés à l’EI encore sur place, 55 sont détenus en prison ou retenus dans les camps sous contrôle arabo-kurde, dont 17 femmes et 28 enfants.
- Reportage : Edith Bouvier et Céline Martelet
- Réalisation : Emmanuel Geoffroy
D’après une idée originale de Rémi Dybowski Douat et Laure Marchand
Merci à Antoine Mégie, Céline Chantepy, Manu et Isabelle Prévost-Desprez, et Anne-Laure Chanel.
Bibliographie :
- La Fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, Laurent Bonelli et Fabien Carrié, Seuil, 2018.
- Un parfum de djihad, Edith Bouvier et Céline Martelet, Plon, 2018.
- Une belle équipe, Grégory Reibenberg, Héliopoles, 2016.
- Les "Amazones de la terreur" : Sur la violence politique des femmes, de la Fraction Armée rouge à Action directe, Fanny Bugnon, Payot - Bibliothèque historique de Payot, 2015.
- La Volonté de punir : essai sur le populisme pénal, Denis Salas, Hachette Littératures, 2008.
Chanson de fin : "Just Call" par John Butler Trio - Album : HOME (2018) - Label : Family Music Pty
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